Revenons sur une leçon d’économie fondamentale, qui défie les intuitions et bouscule les dogmes centralisateurs…
Au début de l’année, j’ai assisté à la LibertyCon, une conférence annuelle organisée par Students for Liberty, à Washington, D.C. J’ai pris la parole lors du banquet de remise des prix, juste après John Stossel.
Il n’est pas facile de passer après lui.
Stossel, lauréat de 19 Emmy Awards, est un auteur, un journaliste et un expert qui est surtout connu pour ses reportages d’investigation pour ABC News, Fox Business Network et Reason TV.
Au cours de son intervention, M. Stossel a félicité les centaines de libertariens en âge de fréquenter l’université qui étaient présents. « Félicitations, a-t-il déclaré. Vous faites partie des quelques personnes éclairées qui ont compris. Vous comprenez comment le monde fonctionne réellement. »
Est-ce qu’il a dit ça pour leur faire plaisir ? Je ne pense pas.
J’ai parlé à des dizaines de ces jeunes au cours du week-end, et j’ai constaté qu’ils avaient une compréhension profonde et nuancée de la manière dont la liberté politique, économique et personnelle permet à notre société moderne de s’épanouir.
Certes, la plupart des étudiants savent que la démocratie, l’Etat de droit et les droits de propriété contribuent à la prospérité. Mais ils ne comprennent guère comment notre étonnant système capitaliste répond à nos désirs et à nos besoins.
Ils apprennent dans leurs cours d’économie que les ressources sont rares et que des hommes d’affaires intéressés, à la recherche de profits – assurez-vous de prononcer ce dernier mot avec la bonne combinaison de sarcasme et de dédain – proposent de nous vendre des produits et des services plus cher qu’ils ne coûtent.
Mais cette explication de base ne suffit pas à expliquer le miracle des marchés.
Qui fait en sorte que tout le monde soit bien organisé – attribuant du travail différent à chaque entreprise, dans des secteurs divers – pour que tout se déroule rapidement et sans heurts ?
Si vous comprenez comment le monde fonctionne réellement, vous savez que la bonne réponse est… personne.
Cela semble incroyable, voire étrange, pour ceux qui pensent qu’un système de commandement et de contrôle du haut vers le bas est nécessaire pour faire avancer les choses.
J’encourage ceux qui pensent ainsi à lire l’essai classique de Leonard Read « I, Pencil », publié en 1958. M. Read, fondateur de la Foundation for Economic Education, a montré comment le libre-échange permet à des millions de personnes, sans aucun lien entre elles, de se réunir miraculeusement pour créer un produit.
Un crayon n’a rien d’extraordinaire, bien sûr. Il s’agit d’un objet simple et quotidien composé de bois, de mine, de métal et de caoutchouc. Pourtant, aussi simple que soit un crayon, aucun individu ne peut en créer un, ni même ne sait comment le faire.
Les arbres doivent être récoltés. Le bois doit être coupé, transporté et travaillé. Savez-vous comment faire tout cela ?
La mine, qui est en fait du graphite, doit être extraite, mélangée à de l’hydroxyde d’ammonium, taillée, séchée et cuite. Possédez-vous ces compétences ?
Le bois reçoit six couches de laque, ce qui nécessite de cultiver des graines de ricin et de les raffiner pour obtenir de l’huile de ricin. Le morceau de métal, appelé virole, est en laiton. D’autres ouvriers et artisans doivent extraire du zinc et du cuivre et les transformer en feuilles. La gomme est un produit caoutchouteux fabriqué à partir d’huile de colza et de chlorure de soufre.
Ce ne sont là que quelques-unes des milliers d’étapes nécessaires à la création des crayons. Des millions de personnes participent à leur création.
Pourtant, personne ne se trouve dans un bureau central pour donner des ordres à tout le monde et leur demander de faire leur part pour créer ces crayons.
En effet, les travailleurs vivent souvent dans des pays différents, parlent des langues différentes et suivent des coutumes différentes. Ils ne se connaissent pas et ne s’apprécieraient peut-être pas s’ils se connaissaient.
Pourtant, les marchés les incitent à coopérer, sans que la plupart d’entre eux sachent que le crayon est le produit final de leur travail.
Encore une fois, il n’y a pas une seule personne – y compris le président de l’entreprise de crayons – qui comprenne toutes les étapes nécessaires à la création du produit.
Il n’y a pas de maître à penser ici, personne ne dicte ou ne dirige de force les innombrables actions qui permettent aux crayons de voir le jour.
L’économiste autrichien Freidrich Hayek appelait cela « l’ordre spontané ».
Il est difficile de comprendre comment quelqu’un qui a conscience du fonctionnement de ce processus étonnant peut favoriser la « planification centrale ».
Surtout lorsque les entreprises produisent régulièrement non seulement des crayons, mais aussi des superordinateurs, des téléphones intelligents, des vaccins, des bateaux de croisière et des avions gros porteurs.
L’idée clé – formulée à l’origine dans le célèbre ouvrage d’Adam Smith, La Richesse des nations – est qu’aucune force extérieure, coercition ou atteinte aux libertés n’est nécessaire pour qu’une coopération économique se produise.
Dans leur quête de profits et de parts de marché, les entreprises innovent, produisent et distribuent.
Personne n’en profite plus que le consommateur. Pourtant, la plupart des personnalités politiques et des journalistes ne le comprennent pas.
Il leur semble intuitif qu’un groupe de personnes engagées, bienveillantes et bien intentionnées – appelons-les les fonctionnaires – prenant des décisions en notre nom devrait être en mesure d’obtenir de meilleurs résultats qu’un groupe de vendeurs peu éclairés à la recherche de profits.
C’est peut-être inconcevable pour eux. Mais c’est ainsi que le monde fonctionne réellement.