Voulez-vous vivre comme un millionnaire vénézuélien ? Rien de plus simple !
C’est la « décision du siècle ».
Comme la décision de se marier, de créer une entreprise ou de braquer une banque, elle affectera notre qualité de vie pour les décennies à venir.
La décision d’une bonne partie de l’Europe d’entrer en guerre en 1914 a préparé le terrain pour la révolution russe, les nazis en Allemagne, la Seconde Guerre mondiale, la montée de Mao en Chine… et 100 millions de morts. Cette décision aussi sera regrettée par de nombreuses générations.
Mathématiquement, les décideurs américains ont une chance sur deux d’avoir raison. C’est soit oui soit non… vers le haut ou vers le bas… et maintenant ou jamais. Mais, politiquement, les chances favorisent fortement le mauvais choix.
Soit ils abandonnent volontairement leur politique d’inflation… soit ils la laissent suivre son cours. La douleur sera sévère, dans un sens ou dans l’autre. Arrêter l’inflation maintenant signifiera des pertes énormes sur les actions, les obligations et l’immobilier. Les entreprises feront faillite. Des millions de personnes perdront leur emploi alors que l’économie corrigera deux décennies de méfaits de la Fed.
Mais s’en tenir à la politique d’inflation sera bien pire. Plus elle durera, plus l’économie sera faussée, endettée et fragile. « Quand l’argent s’en va, tout s’en va » – y compris le système politique… et les normes sociales dont dépend notre société civilisée.
Aujourd’hui, nous regardons le passé pour anticiper l’avenir. Commençons donc par la « dépression oubliée de 1920 ».
Rapide et intense
Au début de la Première Guerre mondiale, les prix à la consommation aux Etats-Unis augmentaient de 1 à 2%. A la fin de celle-ci, ils augmentaient à un taux annuel de près de 15%. Puis, en 1919, la correction est arrivée. Les troupes sont rentrées chez elles et ont cherché du travail… les dépenses de guerre se sont arrêtées… et l’économie est entrée en récession. Les actions américaines ont perdu la moitié de leur valeur. Les bénéfices des entreprises ont chuté de 90%. Les faillites d’entreprises ont triplé. Et les prix à la consommation ont chuté de 18%.
La douleur a été rapide et intense. Mais le dollar était toujours aussi bon que l’or auquel il était adossé. Et la jeune Fed n’est pas intervenue. Le capitalisme avait été blessé dans les tranchées, mais, moins de 24 mois après la signature de l’armistice, il s’était complètement remis. Et ce n’est pas pour rien que la période qui suivit fut appelée les « années folles ». La dépression de 1920 avait éliminé les distorsions dues à la guerre, laissant l’économie prête pour une forte croissance axée sur la consommation.
Une inflation intentionnelle, décidée par le gouvernement, est une chose très différente. D’une part, elle peut durer beaucoup, beaucoup plus longtemps – environ 16 ans en moyenne. Mais elle aussi finit par prendre fin.
L’exemple le plus récent vient du Venezuela. Bloomberg nous renseigne sur le train de vie d’une certaine catégorie de la population :
« Plus de deux douzaines de tours de bureaux s’élèvent dans les ruelles étroites de Las Mercedes. Au rez-de-chaussée de la tour Jalisco de 15 étages, les passants peuvent s’émerveiller devant trois Ferrari rouges exposées chez un concessionnaire.
Le cabriolet Portofino à quatre places, le moins cher, coûte plus de 200 000 $, ce qui équivaut au salaire annuel de 590 fonctionnaires de premier échelon. De l’autre côté de la rue, un immeuble d’appartements est en construction. Une brochure annonce une piscine sur le toit, un salon de jeux, une salle de sport et un espace de travail en commun.
Au coin de la rue, des magasins vendent des vêtements Hermès et Pronovias. Non loin de là, une boutique expose des talons aiguilles à 1 000 $ de Gianvito Rossi, le créateur milanais. »
A la poursuite de l’inflation
Que s’est-il passé ?
Les autorités vénézuéliennes ont-elles avoué qu’elles avaient échoué ? Se sont-elles excusées, ont-elles renoncé à leur politique d’inflation, promis d’équilibrer le budget et de soutenir le bolivar avec de l’or ?
Non… elles ont poursuivi l’inflation tant qu’elles le pouvaient.
Le Venezuela avait depuis longtemps l’habitude de dépenser plus qu’il ne pouvait se permettre… et de masquer la différence avec de la « monnaie imprimée ». Il y a 16 ans, le taux d’inflation atteignait déjà un niveau à deux chiffres. Ensuite, il a fallu des années supplémentaires pour qu’il atteigne les trois chiffres. Pendant ces années – de 2006 à 2011 – un observateur aurait pu conclure que l’inflation des prix à la consommation était plus ou moins « stable », se situant dans une fourchette de 20 à 30 %.
Mais ensuite, en 2015, le taux d’inflation a atteint 256%. Trois ans plus tard, il atteignait presque un million de pourcents (selon les données du FMI) et l’économie vénézuélienne faisait passer Marioupol pour un modèle de paix et de prospérité.
Il était facile de devenir milliardaire en bolivars, du jour au lendemain. Il suffisait d’aller à Caracas et de s’accroupir. Des milliards de bolivars traînaient dans les rues… et ça ne valait pas la peine de les ramasser. A cette époque, la monnaie nationale avait tellement peu de valeur que les gens l’utilisaient pour faire des feux chez eux, ou pour emballer des objets fragiles.
La situation du pays était catastrophique. Cinq millions de personnes désespérées sont parties – et beaucoup avec à peine plus que les vêtements qu’elles portaient. L’inflation a atteint près de 3 millions de pourcents. Les étagères étaient vides, et les estomacs aussi.
Du bolivar au dollar
Les autorités vénézuéliennes pouvaient encore ajouter des zéros à leurs billets. Mais qui les prendrait ? Leur « taxe d’inflation » n’a rien rapporté. Et leurs impôts réguliers ne rapportaient que des bolivars sans valeur. (Les Romains avaient déjà fait l’expérience de dévaluer tellement leur propre monnaie au point qu’ils la refusaient pour le paiement des impôts.)
En d’autres termes, pour les dirigeants du pays, l’inflation n’était plus payante. En 2018, il n’y avait plus rien à gagner à dévaluer la monnaie. Elle n’avait plus de valeur. Alors, les autorités ont autorisé les gens à utiliser une autre monnaie : le dollar.
Selon Bloomberg :
« Encore plus parlant, en 2018, Maduro a laissé le dollar américain circuler légalement. Tout le monde, des cadres aux vendeurs de rue, se ballade désormais avec des billets verts, ce qui aurait pu conduire à une peine de prison sous Chávez. »
Et maintenant, avec une nouvelle monnaie bien plus stable à disposition, l’économie commence à se redresser.
Pendant ce temps, aux Etats-Unis, le cycle de l’inflation ne fait que commencer. L’IPC est toujours inférieur à 10% (officiellement). Les décideurs au pouvoir peuvent encore faire grimper le prix des actions et des obligations en imprimant plus d’argent. Ils peuvent encore apaiser la foule, également, avec des chèques cadeaux. Et ils peuvent surtout poursuivre leurs activités préférées – régler le thermostat de la Terre, « l’égalité », la guerre sans fin contre des ennemis désignés à l’étranger… et le contrôle des sociétés, rendu nécessaire par les « terroristes » de nos « patries ».
Mais attendez. « Le peuple » déteste la hausse des prix. Ils ne verront pas d’un bon œil les politiciens qui la permettent. N’est-ce pas une raison suffisante pour que l’équipe Biden se détourne de l’inflation maintenant ?
2 commentaires
Eh oui.
Les humains n’apprennent jamais de leurs erreurs.
Car ils sont dominés par leur sentiment d’orgueil qui les amène à penser qu’il feront mieux, même lorsqu’ils empruntent une voie que l’on sait erronée par les enseignements de l’Histoire.
L’inflation au Venezuela a été causée avant tout par les sanctions idéologiques, illégales et génocidaires des USA (et ses ingérences belliqueuses) ne laissant aucune marge de manœuvre économique au gouvernement élu démocratiquement (au moins autant que celui des USA, mais certainement plus) vénézuélien.