** Enfin le gros titre que nous attendions :
* "Les Américains réduisent radicalement leurs dépenses", déclare le New York Times.
* La nouvelle n’est pas encore officielle. Peut-être que le New York Times met la charrue avant les bœufs. Mais les preuves provenant des chaînes de magasins, des sociétés de cartes de crédit et des sondages sur la confiance des consommateurs pointent toutes vers la même direction — le bas. "A tous les niveaux de la société américaine", déclare le NY Times, "des ouvriers aux gens aisés", on dépense moins d’argent.
* Décembre a été "un bain de sang" pour les commerces au détail, continue le journal. Parce que les consommateurs s’inquiètent d’une récession. Ils ont peur d’ouvrir leur portefeuille, craignant que les quelques dollars qui leur restent soient difficiles à remplacer.
* Jusqu’à présent, les rapports montrent que les bénéfices des entreprises tiennent le coup, mais que les emplois disparaissent. Même à Wall Street — ou peut-être faudrait-il dire en particulier à Wall Street — les emplois et l’argent faciles semblent bel et bien être derrière nous. Citigroup, par exemple, annonce le licenciement de 24 000 employés cette année… alors que la société essaie de se remettre de ses pertes de 24 milliards de dollars environ.
** Bien entendu, la baisse des dépenses de consommation nous semble inévitable. Lorsque les prix des maisons ont atteint leur sommet, nous nous sommes demandé pendant combien de temps les consommateurs pourraient continuer à dépenser de l’argent qu’ils n’ont pas pour des choses dont ils n’ont pas besoin. La réponse était : plus longtemps que nous le pensions.
* Et voilà que l’inévitable semble se produire : c’est ce que dit le New York Times. Si cette réduction des dépenses continue — ce qui semble également inévitable — il en résultera une crise économique.
* De quelle gravité ? Pendant combien de temps ? Ceux qui connaissent les réponses à ces questions n’écrivent pas d’opinions financières. Nous doutons qu’ils respirent.
* Ce que nous savons, c’est ce que nous avons toujours su. A la fin d’une expansion de crédit — particulièrement lorsqu’elle a été aussi irrationnellement exubérante que celle que nous venons de vivre — il faut payer une rançon au diable. Les gens n’aiment pas payer leurs dettes au Malin. Ils cherchent plutôt des moyens d’esquiver et d’éviter… ou du moins de transférer les coûts à quelqu’un d’autre.
* Les banques centrales et les politiciens, qui ont diligemment travaillé au cours des quatre dernières décennies, n’ont pas vraiment maîtrisé le cycle économique… pas plus qu’ils n’ont réussi à suivre les arcs-en-ciel jusqu’au pot d’or censé se trouver à leur extrémité. Au lieu de cela, ils ont perfectionné l’art de socialiser le risque. En d’autres termes, ils ont trouvé de nouvelles méthodes, plus acceptables socialement, de prendre les pertes de ceux qui les méritent pour les transférer au grand public. C’est ce qu’on appelle en général "l’inflation", un mot qui décrit le processus consistant à faire grimper les prix à la consommation sans que le consommateur ne comprenne pourquoi. Le coût de la vie augmente pour les ménages… mais les spéculateurs, les débiteurs, les investisseurs et les acheteurs de maisons qui ont fait jouer l’effet de levier peuvent modérer leurs pertes. Pendant un temps, les autorités ont tout du magicien faiseur de miracles. Les politiciens sont réélus. On chante les louanges des banques centrales parce qu’elles ont maintenu la croissance.
* Aujourd’hui, nous avons des banques centrales et des gouvernements activistes aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne (la Banque centrale européenne n’est pas encore sûre ; elle se décidera quand l’Espagne et l’Irlande commenceront à hurler, selon nous). Ils sont prêts à faire tout ce qu’il faudra pour éviter une crise sérieuse. Aux Etats-Unis, ils baissent les taux et injectent des liquidités. En Grande-Bretagne, ils sont même prêts à nationaliser une grande banque. L’idée est la même partout — déguiser les pertes en les répartissant parmi les contribuables.
* L’or, anticipant un affaiblissement de la monnaie papier, a dépassé les 900 $. L’indice des matières premières a atteint un nouveau sommet historique.
* En dépit de la poussée d’inflation générée par les gardiens de la monnaie américaine, le nombre d’obligations US "en détresse" a grimpé de 800% au cours des six derniers mois — tandis que Moody’s prédit pour 2008 un taux de défaillance cinq fois supérieur à celui de 2007.
* La fin d’une expansion de crédit n’est de loin pas aussi amusante, pour les consommateurs et les investisseurs, que son début. La fin d’un cycle du crédit n’est distrayante que pour les gens possédant de l’or… les gens qui ont pris des positions contrariennes par rapport aux excès commis durant la période d’argent facile… et les gens qui écrivent des commentaires financiers comme la Chronique Agora.