Le comportement du secteur bancaire va être intéressant à suivre. Les banques françaises vont probablement devoir se recapitaliser pour respecter la réglementation de Bâle 4.
En effet, pour se mettre en accord avec les « règles prudentielles » qui régissent le secteur, certaines banques seront contraintes de lever de nouveaux capitaux propres afin d’assurer leurs ratios de solvabilité.
Le fond de l’histoire c’est qu’il faut savoir que les banques françaises (exception culturelle sans doute…) s’autorisent leur petite cuisine interne pour calculer et déclarer la valeur de certains de leurs actifs. Notamment immobiliers. On appelle ce genre de méthodologie « modèles internes ». C’est bien pratique pour pouvoir présenter des bilans tout beaux tout propres.
Or c’est là que se pose un (léger) problème.
En cette fin de semaine, les participants au comité de Bâle 4 se réuniront en Suède avec pour objectif d’imposer une méthode standard pour la valorisation de ces actifs. En clair et en décodé : « rentrez dans le rang et faites votre compta comme tout le monde ».
Très embêtant tout ça… car si nos banques y sont contraintes, le montant minimum nécessaire de capitaux immobilisés va bondir… et obliger à une vague de recapitalisation.
Bon, tout le monde est sur le pont pour préserver nos petites recettes de cuisine française et éviter que cela n’arrive. Vous pouvez compter sur les lobbies pour pousser au maximum ; même le gouverneur de la Banque de France s’en est mêlé en déclarant qu’il « s’opposerait à un accord qui ne prendrait pas assez en compte les méthodes de calcul de risque utilisées par les banques ».
Ben voyons… faut pas se gêner non plus !
Suivant ce principe, je vais d’ailleurs de ce pas expliquer à l’administration fiscale que je déclare mes revenus de trading selon mes calculs de « modèle interne » et que tout alignement sur une « méthodologie standard » sera refusé car pouvant mettre en danger l’équilibre précaire de mes revenus. Et s’ils ne sont pas d’accord, je leur envoie ma mère pour leur mettre la pression (je n’ai pas de relation à la Banque de France, je fais avec mes moyens).
Bon, trêve de plaisanteries, vous avez compris l’idée. Bâle 4 = danger pour le secteur bancaire français.
Du coup, j’ai ciblé une des pires banques du secteur en France pour vous montrer ce que cela pouvait donner en terme boursiers : le Credit Agricole (FR0000045072 – ACA)
Si les accords de Bâle constituent un risque à moyen terme, quatre autres facteurs militent pour la plus grande prudence.
- Le premier, c’est que le consensus valorise l’entreprise à 15 €. Niveau qui vient d’être atteint.
- Le deuxième étant que ce niveau de 15 € est loin d’être anodin. Graphiquement, il correspond à une zone de résistance de très long terme sur laquelle la valeur a violemment buté à quatre reprises depuis 2009 (pastilles jaunes).
- Le troisième montre que depuis le dernier « top » marqué par ACA en 2015, le flux acheteur est en train de se raréfier. A tel point que nous avons carrément affaire à une rotation baissière : les grosses mains soldent progressivement leurs positions. C’est ce qu’indique l’indicateur permettant de mesurer les flux (l’OBVD). Il est baissier sur la période (flèches orange sur prix et OBVD) alors que les prix, eux, sont revenus au même niveau. La tendance actuelle (petit canal bleu haussier) s’en retrouve donc extrêmement fragilisée alors que les prix abordent la zone de résistance graphique de très long terme.
- Quatrième et dernier point : les vagues d’impulsion que nous montre l’indicateur de tendance MACD. Eh bien les impulsions haussières n’ont jamais réussi à dépasser le niveau actuel, et ce depuis début 2014 (rectangle rouge horizontal).
Conclusion : 1 + 2 + 3 + 4 = risque baissier imminent !
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Comment confirmer ce risque baissier ?
Ceux qui me lisent régulièrement auront l’habitude de ma méthode : si le risque baissier que nous venons d’identifier sur le graphique hebdomadaire doit se concrétiser, alors nous devons au préalable avoir un signal négatif sur la vue journalière.
Pour faire court, simple et rapide, j’attends un retournement baissier de l’indicateur de momentum (SMI ; prenez votre indicateur préféré du moment que ce n’est pas un oscillateur de surachat / survente).
Le potentiel de baisse sera dans un premier temps un comblement du gap vers 12,50 €, mais surtout un retour sur la zone de support « S1 », soit 15% plus bas.
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Pour mémoire, j’aime assez cette zone « S1 ». Elle a servi à nos deux derniers trades sur ACA et a bien fonctionné : le premier pour vendre à découvert la valeur ; le deuxième en sens inverse, à l’achat. Si les dieux du trading sont toujours avec nous, nous aurons l’occasion d’un troisième trade.
Allez, bonne séance et pas d’imprudence : les marchés commencent à donner des signes de fébrilité. Rendez-vous demain, vendredi.
Gilles Leclerc
Première publication dans La Bourse au Quotidien, le 14/06/2017
1 commentaire
Les modèles internes ne sont pas une exception culturelle
Soit vous êtes de mauvaise foi soit vous n’avez pas travaillé votre sujet.
Les modèles internes sont une possibilité « officielle » depuis Bâle 2. Ils doivent être validés par les superviseurs nationaux (et par la BCE). A tel point que La Banque Postale est toujours en modèle standard car n’ayant pas convaincu le superviseur.
Les banques françaises et européennes sont contre ce retour en arrière pour plusieurs raisons:
– elles ont investi du temps et de l’argent pour mettre au point ces modèles internes (bon ça on s’en fout d’accord )
– célastique va faire baisser leurs rentabilité (c’est normal qu’elles defenient leur beefsteak)
– les banques américaines s’affranchissent déjà d’une partie des règles de bale et avec Trump ça ne va pas s’arranger
– avec le brexit les banques anglaises vont peut être prendre le même chemin.
Bref on défend l’industrie française. ..On peut aussi défendre le secteur bancaire français. .?