Autrefois, en Occident, les marchands de bonheur se recrutaient dans l’Eglise. Un bon chrétien pouvait espérer être heureux. Pas en ce bas monde, évidemment, on n’était point si sot pour s’engager autant, mais plus tard, durant la vie éternelle. Pour cela, le chrétien devait essentiellement « aimer son prochain comme soi-même ». Précepte simple à comprendre, mais de pratique plus difficile.
« Aussitôt tintera l’argent jeté dans la caisse, aussitôt l’âme s’envolera du Purgatoire », vanta le prédicateur dominicain Johann Tetzel |
Ceux qui éprouvaient du mal à l’appliquer pouvaient s’acheter des indulgences. « Aussitôt tintera l’argent jeté dans la caisse, aussitôt l’âme s’envolera du Purgatoire », vanta le prédicateur dominicain Johann Tetzel.
Avec de telles promesses, le commerce des indulgences et la simonie (le monnayage d’avantages) devinrent florissants. Au 16ème siècle, Jacob Fugger, le grand banquier d’Augsbourg, se vit ainsi rembourser un important prêt consenti à Albrecht von Brandenburg en droits de négoce d’indulgences accordé par le pape Léon X. La formule fameuse de Johann Tetzel fut cependant épinglée en publicité mensongère par Luther. Protestants et catholiques s’écharpèrent.
Toutefois, malgré ses excès, la religion restait mesurée et se bornait à promettre le bonheur à titre individuel pour plus tard. Un contrat à terme et nominatif, en quelque sorte. C’était à chacun de s’acheter son bonheur, selon ses moyens. Pour les plus démunis, la misère terrestre était adoucie puisque l’avenir pouvait être merveilleux. L’ordre régnait puisque tout serait réglé dans l’au-delà… et qu’est-ce qu’un mauvais moment terrestre à passer face à l’éternité ?
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Un grand pas fut franchi lorsque la politique remplaça la religion. Un contrat collectif à date certaine remplaça l’ancien. L’Etat-Providence fut déifié. Avec lui, le bonheur est pour tout le monde, ici et maintenant, de la crèche à la tombe.
Promesses et collectivité
Tout homme politique qui veut un succès électoral ne peut moins promettre. Certes, m’objecterez-vous, Churchill proposa bien « de la sueur, du sang et des larmes »… mais d’abord c’était aux Anglais (qui sont habitués à manger de la vache enragée ou folle) et ensuite c’était la guerre.
Le bonheur collectif immédiat en ce bas monde s’avéra une promesse beaucoup plus coûteuse que celle du bonheur individuel dans l’au-delà. N’importe quelle dépense publique se justifie désormais par le « mieux-être » qu’elle procurera à la « collectivité ». « Solidarité » et « social » sont deux mots qui justifient tout et n’importe quoi.
En lieu et place des indulgences que chacun consentait à payer, les impôts se développèrent grâce à cette religion laïque. Ce faisant, le consentement à la taxation devint moins populaire et les paradis devinrent fiscaux.
Lorsque les impôts ne furent plus suffisants, le commerce très lucratif des dettes se développa à son tour. Là encore, des banquiers prirent les choses en main. En lieu et place de la simonie, charges, rentes et privilèges se négocient entre la noblesse d’Etat et ses grands argentiers du monde financier.
« Aussitôt tintera l’argent de vos impôts jeté dans la caisse, aussitôt le bonheur vous submergera ».
Mais il semblerait que le bonheur ne s’achète ni avec des impôts ni à crédit |
Mais il semblerait que le bonheur ne s’achète ni avec des impôts ni à crédit. La croissance s’évanouit, les impôts et les dettes augmentent.
Parlons chiffres puisque ceci est une chronique financière
Un rapport de Citigroup publié en mars 2016 indiquait que si les dettes publiques officielles étaient de 44 000 milliards de dollars, les engagements de retraite insuffisamment provisionnés par les Etats-Providence se montaient eux à 78 000 milliards de dollars.
Il y a aussi les promesses non financées en matière de santé, en matière d’assurance-chômage...
Qui va payer ? Les banquiers centraux pensent que de la fausse monnaie ou des chèques cadeaux peuvent faire l’affaire. Le gouvernement du Japon, pays surendetté s’il en est, songe à émettre des bons d’achat qui seraient distribués aux jeunes à bas revenus. Plus efficace que de larguer des billets qui pourraient être thésaurisés, pensent les technocrates keynésiens dans leur dernier délire en date.
Décidément, les religions laïques sont bien dangereuses.
5 commentaires
Excellent article
Chère Simone,
On vous aime bien (si si !), mais vous devriez appliquer le même principe de suspicion que vous appliquez avec talent, humour et néanmoins bonhomie aux « vérités » économiques officielles, i.e. répandues par les mass media, aux autres « vérités » répandues par ces mêmes mass media, notamment religieuses. Il est patent que vous ignorez la réalité théologique et historique sur les indulgences. Vous pouvez combler ce manque en consultant par exemple, au n° 417, le traité de doctrine – immuable – de l’abbé Boulenger ( 1927) :
https://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=1&cad=rja&uact=8&ved=0ahUKEwin1fbRkY7MAhWDWhoKHUHKA9AQFggkMAA&url=http%3A%2F%2Fwww.salve-regina.com%2Fimages%2F9%2F92%2FLa_doctrine_catholique_-_Abb%25C3%25A9_Boulanger_-_3_tomes_complet.doc&usg=AFQjCNGEB9p5EssYAVgCUHzPF4Rxt1yrkA
On est catholique ou on ne l’est pas, mais si l’on veut connaître un point de doctrine catholique, quitte à ne pas y adhérer, il ne faut pas aller voir ce que les ennemis de l’Eglise en disent mais l’Eglise elle-même (se méfier des contrefaçons !).
Avec mes meilleurs sentiments,
Essel
@Essel,
Relisez attentivement Exode 20: 9-11…
@Simone Wapler,
Lisez attentivement Apocalypse 2:9 et Apocalypse 3:9
Avec mes meilleurs sentiments à tous.
Chère Simone. Excusez cette familiarité, qui n’empêche pas l’admiration. Car je vous pardonne volontiers l’à peu près théologique, pourvu que l’essentiel, le parallèle entre simonie éclésiastique et magouilles électorales soit juste. Eh oui, le marxisme fut une religion succédant au christianisme et comme lui basé sur des promesses. Ses héritiers, socialo-progressistes, droite et gôche confondues creusent toujours la même ornière. La dernière promesse en date, le féminisme, ignore résolument l’incontournable altérité des sexes, magnifiant un HOMME prétendu tout puissant et pervers (qui n’a jamais existé) et promettant aux femmes qu’un jour elles lui seront égales par la magie des promesses politiciennes. Comme agiter la baguette magique à chaque échéance électorale ne suffit qu’un instant éphémère, il fallut pour que l’illusion dure des décennies tripatouiller l’économie, donner la priorité à la consommation et aux consommatrices aux dépends de la production et des producteurs… Les impôts n’y suffisant pas, on eut recours à la dette, puis aux tripatouillages monétaires et aujourd’hui aux taux négatifs, en attendant mieux. La seule variable qui fut oubliée, dans ces calculs savants fut la constante humaine, pourtant invariable ! Trop d’impôt tue l’impôt et manipuler la monnaie mène à la banqueroute ! On le sait depuis l’antiquité. Au moins. Mais ce n’est pas cela qui peut freiner la caste politicienne qui prospère en parasite sur le dos des gogo(e)s drogué(e)s par des promesses intenables.
Ajoutons que des 2 promesses illusoires laquelle est la plus fantaisiste ?
1) Une femme est un homme si elle le veut et un homme est une femme qui s’ignore.
2) L’argent peut se créer ex-nihilo.
Si les peuples ont cru à la première, pourquoi ne croiraient-ils pas à la seconde ?