Stop ! Cette fois, je prends la défense de l’Allemagne
Je vais laisser parler l’Allemande qui est en moi… exceptionnellement. Entre 2000 et 2007, alors que les Français, les Grecs et le reste du "Club Med" jouaient les cigales avec un entrain non dissimulé, nous autres Allemands jouions les fourmis et suions sang et eau.
Au pays des cigales, il fait bon vivre…
Dépenses publiques et déficits riment avec train de vie sympathique. Creusons, creusons les dettes…et consommons plus que de raison. Seul aujourd’hui compte. Au diable les problèmes de paiement des retraites, le trou béant de la Sécurité sociale, le manque de flexibilité du marché du travail et de compétitivité de nos entreprises…
Au pays des fourmis, on sue sang et eau
Avez-vous une idée du coût de la Réunification ? 1 300 milliards d’euros ! Est-ce que vous imaginez un instant ce que cela représente, 1 300 milliards d’euros ?! C’est l’équivalent du montant de la dette française, tombée d’un coup sur le dos des Allemands un jour de novembre 1989…
Arrive alors le chancelier Schröder. Une bénédiction… Il a FAIT les réformes du marché du travail, des retraites, réduits les coûts sociaux, gel les salaires. Un courage politique inouï.
Les Allemands perdent leur pouvoir d’achat, l’Etat providence bismarckien vole en éclats, mais l’équilibre budgétaire exigé par l’Europe est atteint. Et la Réunification est digérée.
Une prouesse hallucinante à la hauteur du courage des Allemands.
Aujourd’hui, les Allemands veulent venir en aide aux plus démunis d’entre eux
C’est la question centrale chez nous en ce moment : "comment venir en aide aux revenus les plus faibles". Et là, patatras… surgit la question grecque.
Imaginez un instant ce que psychologiquement et émotionnellement un Allemand peut ressentir… lorsque, après avoir "sué sang et eau" pour revenir dans les clous de Maastricht alors que les cigales s’amusaient, on lui dit qu’il faut qu’il paye personnellement pour les Grecs, sinon l’euro implosera. Lui qui a déjà tant payé…
Imaginez un instant ce qu’un Allemand peut ressentir quand les Grecs s’autorisent du "rentrent dedans" avec leur histoire de nazisme. Lui, qui ne l’a pas vécu et qui s’évertue à accepter sa douloureuse histoire.
Imaginez un instant ce qu’un Allemand peut ressentir lorsque Mme Lagarde en rajoute une couche en disant grosso modo que l’Allemagne est responsable des déficits des cigales…
Clairement, l’opinion publique est révulsée
Politiquement déjà affaiblie, Mme Merkel qui doit affronter les élections en Rhénanie, est piégée. Et Mme Lagarde ne fait que l’enfoncer. Ridicule ! Alors ne vous étonnez de voir la chancelière monter au créneau devant l’Assemblée des députés.
Ne vous étonnez pas de voir le ministre des Finances (issu de la CSU Bavaroise – aile droite) taper du poing sur la table.
Ne vous étonnez pas de voir germer les idées de "sortir les mauvais élèves de l’euro", de "frapper à la porte du FMI" voire carrément de "sortir de l’euro".
C’est une réaction d’exaspération politique !
Révélatrice des tensions extrêmes dans un pays en pris de violentes convulsions. Alors d’accord. De tout temps, l’Allemagne a été tournée vers l’extérieure. Son économie est basée sur l’offre, et sa croissance vient de ses exportations. D’où les excédents.
Le "Club Med", France inclus, compte des pays dont la croissance vient de la consommation qu’ils dopent à coups de crédit/dette. Leurs exportations sont faibles car ils n’ont pas fait les réformes pour être compétitifs. D’où les déficits.
Ma conclusion ? La voilà :
Entre 2000 et 2007, les Allemands ont fait des réformes indispensables pour créer les "conditions" de création de richesse. Le pari étant que la richesse ainsi générée serait redistribuée. Ce qui dopera la consommation et rééquilibrera le modèle de croissance. Sauf que la crise est arrivée, et a reporté la phase de redistribution dans le temps.
Les Allemands ont fait ce qu’il y avait à faire de leur côté, pour redresser les déséquilibres au sein de l’Europe.
En revanche, le "Club Med" lui, n’a rien fait
Ces pays, France inclus, doivent se réformer en profondeur pour redevenir compétitifs, résorber leurs déficits et avoir un modèle de croissance plus équilibré. Et force est de constater qu’ils n’ont pas commencé ne serait-ce qu’un début de réforme.