"… nous devons donc nous garder de toute influence injustifiée, qu’elle ait ou non été sollicitée, exercée par le complexe militaro-industriel. Le risque potentiel d’une désastreuse ascension d’un pouvoir illégitime existe et persistera. Nous ne devons jamais laisser le poids de cette combinaison mettre en danger nos libertés et nos processus démocratiques. Nous ne devrions jamais rien prendre pour argent comptant. Seule une communauté de citoyens prompts à la réaction et bien informés pourra imposer un véritable entrelacement de l’énorme machinerie industrielle et militaire de la défense avec nos méthodes et nos buts pacifiques, de telle sorte que sécurité et liberté puissent prospérer ensemble".
— Discours d’adieu du président Dwight D. Eisenhower le 17 janvier 1961
▪ Eh bien… encore une bonne semaine pour le Dow. L’or, pendant ce temps, a stagné.
Nous ne sommes sûr de rien… mais nous conseillons aux lecteurs de ne pas prendre ce train en marche. Ses wagons pourraient dérailler à tout moment. La dette de marge est de retour à ses niveaux de 2007. Le sentiment est haussier pour une écrasante majorité d’investisseurs. Les prix frôlent des niveaux record. Les PER sont si élevés qu’il est presque certain que les vendeurs s’en tireront mieux que les acheteurs. Les débutants sont de retour sur les marchés… il est temps que les investisseurs sérieux sortent.
Nous laissons notre drapeau d’Alerte au Krach flotter, comme avertissement.
Et nous changeons de sujet…
▪ Des guerres de choix, non de nécessité
Quand Eisenhower a prononcé le discours ci-dessus, de nombreuses personnes sont restées perplexes. Eisenhower était un militaire de carrière. Comment pouvait-il se montrer si déloyal envers sa classe professionnelle, se sont demandés les gens ?
Mais Dwight savait une chose que la plupart des gens ignorent. Il comprenait les va-t-en-guerre. Et il savait que les zombies armés sont les plus dangereux de tous.
Nous avons vu Eisenhower en chair et en os il y a de nombreuses années, un peu avant sa mort. Nous rendions visite à notre propre père à l’hôpital militaire Walter Reed, à Washington. Nous marchions dans le couloir avec Papa, un vétéran de la Deuxième guerre mondiale, quand il s’est soudain redressé et a salué. Cela faisait au moins vingt ans qu’il n’avait pas porté l’uniforme, mais le réflexe était toujours là. Lorsque le Général Eisenhower est passé à côté de nous en fauteuil roulant, Papa s’est mis au garde-à-vous.
A présent, 40 années ont passé. L’avertissement d’Eisenhower, ignoré et oublié, s’est transformé en malédiction. Pour ses propres desseins — l’argent, le pouvoir, le statut –, le "complexe militaro-industriel" nous entraîne dans une guerre après l’autre.
Notre vieil ami Steve Chapman :
"Les Etats-Unis peuvent se vanter d’avoir l’armée la plus puissante sur Terre. Nous avons 1,4 million de personnel actif, des milliers de chars, de navires et d’avions, et 5 000 têtes nucléaires".
"Nous dépensons plus pour la défense que les 13 pays suivants pris ensemble".
"Depuis 1991, note l’universitaire John Mearsheimer, spécialiste de la sécurité, les Etats-Unis ont été en guerre deux années sur trois"…
"… Nous sommes plus en sécurité que n’importe quel pays au cours de toute l’histoire planétaire. Ce que quasiment toutes nos interventions militaires récentes ont en commun, c’est qu’elles impliquaient des pays qui ne nous avaient pas attaqués : la Libye, l’Irak, la Serbie, Haïti, la Somalie, le Panama, la Grenade et le Vietnam".
"Avec l’exception notable de l’invasion de l’Afghanistan, nous ne menons pas des guerres de nécessité. Nous menons des guerres de choix".
▪ Pourquoi les Etats-Unis choisissent-ils de mettre le nez dans les affaires des autres ?
Quel résultat obtiennent-ils en retour — à part des milliers de milliards de dollars dépensés… et des jeunes gens qui rentrent amputés et avec des tendances suicidaires ?
Alors pourquoi le font-ils ? Les faucons, les colombes, la stratégie géopolitique, la sécurité nationale — rien de tout ça n’a de rapport avec la question. Ce n’est que du vent. Des sottises. Des bavardages télévisés. La véritable raison pour laquelle les Etats-Unis dépensent autant et se lancent dans tant de guerres, c’est qu’ils ont développé toute une classe de zombies militaires. Leur carrière, leur guerre, leur rang social, leur vie sexuelle — tout dépend du fait de se mêler des affaires des autres.
Il y a quelques années, nous avons écrit avec Addison Wiggin un livre intitulé L’Empire des dettes. Nous expliquions ce phénomène comme étant inévitable pour les grandes puissances. Dès qu’elles peuvent se faire obéir des autres, elles aspirent à l’empire, disions-nous.
Dans un nouveau livre à venir, nous l’expliquons autrement : les humains sont devenus ce qu’ils sont durant la période du paléolithique. A l’époque, si l’on en croit l’archéologie et les déductions qu’on en a tirées, si les hommes d’une tribu n’étaient pas prêts à se défendre — férocement et sans poser de questions –, la survie de la tribu était en danger. Leur territoire et leurs femmes pouvaient leur être enlevés. Ces instincts pré-civilisés sont désormais programmés dans la race humaine. Dans un contexte moderne, les guerres américaines semblent sottes, stupides et contre-productives. Mais elles sont aussi populaires qu’un championnat de foot.
Ces deux explications ont du mérite. Mais Eisenhower comprenait les choses différemment. Il voyait de quelle manière des forces internes puissantes poussent une machine militaire à devenir un empire… et à faire la guerre. Un "éducateur" essaiera de se donner de l’importance en insistant pour plus d’éducation. Un boucher voudra plus de viande au menu. Et un homme ayant un pistolet en main déclarera — avec un sérieux parfait et une sincérité solennelle — qu’il faut tuer quelqu’un en Syrie pour protéger notre virilité !
1 commentaire
Parce que vous êtes perspicace et réaliste et, que je sache, vous ne dissimulez rien du système économique et financier actuel, vos chroniques sont intéressantes à plus d’un titre, et en générale de longue portée. L’on ne peut que vous en complimenter et vous en remercier.
Et vous êtes l’un des mieux placés par l’expérience que vous avez de la réalité économique du monde actuel. Particulièrement, du – vecteur – qui, au delà de toutes sortes d’écrans, dirige à présent le monde, c’est dire le marché. Le marché « consomme » le monde, le digère, mais dégrade tout autour de lui; c’est là un type de phénomène d’entropie accélérée. Nous sommes dans une époque – mercurienne -, ai-je l’habitude de dire moi aussi par expérence. Dans les derniers avatars de la Tradition gréco-latine, Mercure est le dieu des commerçants et des voleurs. Normalement, les Tradition culturelles sont originellement fondées dans une vérité du monde qui se perpétue dans toutes les formes des diverses époques, donc dans le présent. Il se trouve que le mercure (nom du dieu des commerçants et des voleurs, donc aussi des traders) est un métal liquide, il est le seul élément qui peut dissoudre l’or. L’or qui est incorruptible par ailleurs. Qui aime le plus l’or (alias l’argent) sinon les voleurs et les traders ? Le marché, dont vous êtes l’un des meilleurs spécialistes, relève, c’est évident, du dieu Mercure et ses principes. Mais Mercure, alias le marché, le marché devenu omnipotent, risque de venir à bout des structures qui ont formé le monde et qui le soutiennent, mais sans rien produire à la place de fécond, de créatif, de stable, de structuré et durable. C’est là une tragédie potentielle.
Ceci m’amène à cette formulation qui m’avait sauté aux yeux et éclairé quant à la véracité auquelle elle se rapporte. Voici cette formulation d’une justesse exceptionnelle qui qualifie le monde (encore) contemporain:
— « »Le capitalisme (et son prétendu opposé le socialo-communisme) n’ont pu fonctionner que parce qu’ils ont hérité d’une série de types anthropologiques qu’ils n’ont pas créés et qu’ils n’auraient pas pu créer eux-même: des juges incorruptibles, des fonctionnaires intègres et wébériens, des éducateurs qui se consacrent à leur vocation, des ouvriers qui ont un minimum de conscience professionnelle, etc. Ces types ne surgissent pas et ne peuvent pas surgir d’eux-mêmes, ils ont été créés dans des périodes historiques antérieures, par référence à des valeurs alors consacrées et incontestables: l’honnêteté, le service de l’État, la transmission du savoir, la belle ouvrage, etc. » » —
D’après Marcel Mauss, Karl Polanyi, repris par Cornélius Castoriadis, et ce fut l’intuition de George Orwell.
S’agissant des États-Unis, et dans le même ordre d’idée, il y a longtemps que j’avais relevé dans un article dont, hélas, je n’avais pas noté les références, cette indication sur la stratégie des États-Unis, élaborée à long terme qui correspond tout à fait à ce qui est dit ici plus haut:
— « »L’objectif de Washington depuis les année 1920, et surtout depuis 1945, est d’étendre les principes fondamentaux de la démocratie occidentale à toute la planète, en établissant un système mondial de gouvernement représentatif. – Notre concpt d’universalité – exige que le système inclue tous les peuples, y compris les éléments disparates. N. Gordon Levin et Théodore de Barry affirment que l’américanisation de la politique internationale a pour but de diffuser – les valeurs universelles du progressisme libéral – « » —
Donc l’homogénéisation du monde, activée par l’application de la stratégie des États-Unis sur le long et très long terme, est un vecteur de premier plan pour ouvrir – y compris de force – le marché du monde à la puissance américaine en dissolvant les particulatités et les spécificités créatrices qui avaient été élaborées au fil des siècles par des savoir-faire accumulés, des principes, des mœurs et des attitudes variées que le – marché – aujourd’hui exploite et dissout, ou bien dénature, pour des profits financiers réalisés au détriments des sociétés. Quand les États-Unis veulent se débarasser de tels et tels régimes, les États-Unis prévoient de les attaquer, s’il le faut avec des preuves inventées de « justification » de l’attaque (donc violences) au nom de la « démocratie » et des « droits de l’hommes »… Donc ces régimes attaqués se défendent, donc exercent des violences (provoquées), ce qui permet de les accuser de crimes contre l’humanité… et le tour est joué… Depuis des décennies, les innombrables interventions militaires des États-Unis, sans parler des influences et des manipulations médiaques de grandes envergures dont D. Rockefeller alla jusqu’à remercier chaleureusement la longue complicité des média… prouvent cette stratégie infernale.
Qui, ou quoi y a-t-il au bout de cette stratégie?? Le néant?