▪ Nous avons assisté vendredi à l’une des plus étranges fins de séance de l’année 2013. Le CAC 40 est repassé de -0,7% à -0,25% entre 17h et 17h15 — avant de replonger de 35 points en un quart d’heure pour en terminer pratiquement au plus bas du jour, en repli de -1,2% (et -1,06% pour l’Euro-Stoxx 50).
C’est assez incompréhensible et cela a eu pour conséquence de faire basculer le bilan hebdomadaire du CAC 40 dans le rouge (de +0,8% vers -0,2%).
Quelle en est la raison ? Nous savons avec 48 heures de recul qu’aucune actualité positive n’a constitué le prétexte de la remontée des indices à une demi-heure de la clôture. Il n’y avait pas davantage de raisons de sortir du marché en quatrième vitesse au moment du fixing.
Tout ce que nous savons, c’est que les vendeurs restés en position depuis le début de la séance ont cru s’être fait piéger à l’entrée de la dernière ligne droite. Toutefois, ce sont les acheteurs qui l’ont été au fixing avec un trou d’air de -15 points à 3 948 points.
A l’image des places européennes et de façon tout aussi brutale, Wall Street a subi un sell off spectaculaire au cours des 90 dernières minutes. La baisse s’est radicalisée au cours des toutes dernières minutes : le Dow Jones a décroché de 1,36%, le S&P 500 de 1,42%.
Ce vendredi 31 mai a déjoué tous les pronostics. Une majorité d’investisseurs tablait sur une ultime séance de hausse pour clôturer en beauté le plus joli mois de mai boursier depuis 2007. Les attentes étaient d’autant plus haussières que depuis début janvier, Wall Street termine toujours en hausse le vendredi.
Toujours… à l’exception du 15 mars (-0,2%) et du 5 avril (-0,3%… rien de bien méchant).
Oui, après 19 hausses sur une série de 21 vendredi, le scénario survenu ce 31 mai a surpris (piégé) beaucoup de monde.
Wall Street a chuté de 1,2% vendredi (moyenne des principaux indices) contre +0,3% à +0,5% en fin de matinée. Cela fait plus de 1,6% de repli linéaire par rapport aux plus hauts du jour.
▪ Séance de baisse… mais scores annuels encore positifs
Les opérateurs parlent « d’ajustements de positions » en fin de mois… Cela constitue une explication un peu courte, compte tenu de l’absence totale de volatilité lors des quatre fins de mois précédentes : jamais plus de 0,3% de variation, avec un nombre égal de séances de hausse et de baisse.
Tout a basculé au cours des 90 dernières minutes ; les scores hebdomadaires étaient encore positifs vers 20h30. Sur l’ensemble de la semaine, le Dow a perdu 1,2%, le S&P 500 -1,1% et le Nasdaq -0,1% (le score hebdomadaire a basculé dans le rouge à la toute dernière minute pour les valeurs technologiques).
Malgré une fin de semaine sans équivalent depuis le 28 décembre 2012 (-1,2% un vendredi), l’indice S&P 500 affiche +2,1% sur l’ensemble du mois de mai. Il s’agit là du septième mois de hausse consécutif ; la performance annuelle de 14,5% est la plus élevée observée en cinq mois depuis 1997.
Le Dow Jones s’est adjugé 1,9% et le Nasdaq 3,8% — soit deux fois plus de gains, ce qui comble largement le handicap accumulé de janvier à avril.
Beaucoup de stratèges anticipaient une « Grande rotation » des bons du Trésor US en faveur des actions. Si les T-Bonds ont lourdement corrigé, avec des rendements solidement installés au-dessus des 2,1%, les actions n’ont pas bénéficié des arbitrages initiés dès le 21 mai dernier.
Elles n’avaient cependant pas perdu de terrain, les investisseurs saluant une série d’indicateurs économiques nettement meilleurs que prévus.
Le dernier en date, c’est l’indice d’activité économique de la région de Chicago. Le PMI a complètement déjoué les pronostics les plus optimistes avec un score « miracle » de 58,7 contre 51 anticipés (après 49 en avril). Cela contrebalançait les mauvais chiffres publiés à 14h30.
▪ Le PMI rebat les cartes
Les ménages américains n’ont pas fait de folies malgré « l’effet richesse » induit par la hausse de la bourse et de l’immobilier (repli de 0,2% des dépenses en mai). Cela alors que le marché attendait un léger sursaut de 0,1% ou 0,2%. Cette frilosité des consommateurs pourrait s’expliquer par une baisse simultanée de leurs revenus, qui accusent une baisse inattendue de 0,1% en avril.
Ces mauvais chiffres éloignaient le risque que la Réserve fédérale se hâte de ralentir le rythme de ses rachats d’actifs… Cependant, la publication du PMI de Chicago a rebattu les cartes et entraîné une révision de certaines anticipations trop optimistes.
La hausse des marchés reposait depuis la mi-novembre sur la visibilité que dispensent les marchés obligataires. Elle partait de la conviction que la Fed (ainsi que la Banque du Japon) sera capable de maintenir les taux presqu’éternellement à proximité de zéro.
La remontée du rendement du T-Bond de 1,62% vers 2,13% en l’espace de quatre semaines remet en cause cette conviction… Cependant, les actions n’ont réagi que très tardivement : elles n’ont chuté qu’au cours des deux dernières heures de la semaine et du mois.
Wall Street nous fait penser à un canard qui continuait de courir sans tête… mais qui vient de heurter la porte de son enclos.