▪ Le G7 et le G20 sont bien en phase : il ne saurait être reproché à un pays de mettre en oeuvre des mesures de soutien visant à soutenir son économie (y compris un recours massif à la planche à billets) tant que cela s’inscrit dans le cadre d’une politique à usage strictement interne.
Nous allons illustrer cette prise de position de façon plus imagée : après une forte chute de neige, les Américains ont utilisé dès 2009 leur chasse-neige (baptisé quantitative easing, auquel ont succédé les matricules QE2 puis QE3) pour dégager l’entrée de leur usine. Ce faisant, ils ont repoussé des mètres cubes de substance blanche compactée devant les portails japonais et européen.
Les Japonais à leur tour ont fait vrombir leur grosse « fraise » (c’est le nom que porte une déneigeuse dotée d’un tambour rotatif particulière efficace contre les congères) pour libérer un passage devant leur atelier — toujours dans le cadre d’une initiative « à usage strictement interne ».
L’Europe, qui ne possède ni lame, ni fraise (dont l’usage en tant que tel est strictement prohibé), se retrouve avec un véritable mur de neige devant les issues de son économie. Cependant, elle ne saurait dénoncer les « mauvaises intentions » de qui que ce soit puisque chacun s’est contenté de s’ouvrir depuis l’intérieur un chemin vers l’extérieur.
Le ministre des Finances canadien, Jim Flaherty — qui s’y connaît en neige vu le climat régnant à Ottawa — a reconnu qu’il était difficile de « distinguer une politique monétaire visant strictement à soutenir l’économie nationale d’une politique ayant pour objectif de manipuler le taux de change ».
Nous supposons de la même manière qu’il est difficile de faire la différence entre une grêle de coups de poing dans l’estomac qui vous laisse cassé en deux, le souffle coupé, et une bourrade amicale ayant pour but d’éprouver la solidité de vos abdominaux.
Entre le gentil boxeur poids lourd américain de 120 kg et le gentil sumotori japonais de 150 kg qui viennent de nous prendre en sandwich, le G20 nous recommande d’arborer un large sourire et de nous réjouir de ce témoignage d’amitié un peu viril.
Et c’est bien la ligne défendue par Ben Bernanke qui a été reprise et approuvée par les grands argentiers réunis ce week-end à Moscou.
▪ Wall Street déroge — légèrement — à la tradition
Wall Street n’a jamais douté qu’il puisse en être ainsi et n’a rien lâché à la veille d’un « pont » de trois jours pour cause de President’s Day ce lundi. La tradition voulant que les indices américains clôturent systématiquement au plus haut du jour et de la semaine (depuis début janvier) n’a pas été totalement respectée — mais de nombreux indices ont battu de nouveaux records historiques en intraday.
Ce fut le cas notamment du Dow Transport (ou DJT) à 5 983 points vers 20h, histoire de marquer d’une pierre blanche la séance des « Trois sorcières » du vendredi 15 février. Il a tout de même clôturé en repli de -0,02% à 5 946,5 points. Nouveau plus haut absolu aussi sur le Russell 2000 à 927,3 points (inscrit à l’ouverture).
Et l’essentiel, pour les plus optimistes, c’est que le S&P 500 (-0,1% vendredi soir mais +0,1% en hebdomadaire) aligne une septième semaine de hausse consécutive. Il est à noter que l’indice a testé au cours de la même séance et à quelques heures d’intervalle ses deux extrêmes de la semaine : 1 514 et 1 524. Elle s’est donc soldée par la plus faible variation sur cinq séances (0,6%) depuis plus de 25 ans.
Le Dow Jones échoue d’un rien dans sa tentative : les +0,06% (à 13 981 points après avoir inscrit un plus bas à 13 907 points vers 20h30) gagnés ce vendredi ne suffisent pas à finir la semaine en territoire positif (-0,1%).
Même score hebdomadaire pour le Nasdaq, qui a reculé de 0,2% — alors qu’il progressait d’autant vers 16h.
▪ Quant aux statistiques…
Les statistiques américaines publiées vendredi se sont neutralisées. Le recul surprise de 0,1% de la production industrielle en janvier (contre +0,2% attendu) a été contrebalancé par l’envol inattendu de -7,8 vers +10 de l’indice Empire State. Rappelons qu’il représente l’activité manufacturière telle que mesurée par la Fed de New York (une région où l’industrie ne pèse pas très lourd).
Le taux d’utilisation des capacités industrielles a reculé de 79,3 vers 79,1 en janvier. La production manufacturière a chuté de 0,4%, contre +0,2% attendu… Mais ces mauvais chiffres ont également été tempérés par la hausse de 75 vers 76,3 de la confiance des consommateurs américains pour le mois de février 2013, d’après l’étude mensuelle de l’Université du Michigan et Reuters.
L’une des informations les plus symboliques demeure cependant la note interne de Wal-Mart diffusée « par erreur » et qui fait état d’un début de mois de février « catastrophique ». Or Wal-Mart publiera ses résultats en milieu de semaine ; l’entreprise sera la dernière à le faire parmi les poids lourds du Dow Jones et du S&P 500.
Jusqu’à présent, 70% des trimestriels ressortent supérieur à des consensus systématiquement minorés (c’est de tradition). Mais ce qui reste un motif de satisfaction, c’est que le taux de progression des bénéfices s’établit à 6% contre 3% anticipé.
Attention toutefois au biais positif que constituent des méga-profits bancaires ne correspondant à aucune création de richesse mais à des jeux d’écriture comptable avec l’effacement « au doigt mouillé » de dizaines de milliards de dollar de provisions pour créances douteuses… dont personne ne connaît la valeur réelle.