** L’aéroport d’Heathrow est un cauchemar par de nombreux aspects. Il est si grand qu’il faut parfois des heures pour arriver d’un terminal à un autre. Pourtant, lorsque nous sommes revenu de Vancouver samedi dernier, nous avons à atterri à 10h30 ; à 11h nous étions au centre de Londres.
* Nous avons filé à travers l’aéroport… et pris le train express. Toute l’opération ne nous a pris qu’une fraction du temps nécessaire lorsque nous arrivons à Dulles, à Washington.
* Mais Londres était de mauvaise humeur à notre arrivée.
* "Une décennie douloureuse prévue pour les services publics", titrait le Guardian de vendredi. La raison de cette douleur est évidente. Les recettes fiscales sont en baisse — à cause de la dépression. Les gouvernements sont pris au piège. Leurs revenus baissent juste au moment où leurs coûts — renflouages, relances contre-cycliques et allocations chômage — grimpent.
* L’Irlande et la Californie ont fait les gros titres sur ce sujet. Mais elles ne sont de loin pas seules. Le problème est le même pour quasiment tous les gouvernements anglophones… et une bonne partie du monde occidental. Pour le reste de la planète, nous n’en savons rien.
* L’Irlande est confrontée à sa propre décennie douloureuse. Idem pour la Californie. Hier, elle faisait parler d’elle. Apparemment, un accord a été trouvé. L’état californien ne coulera pas… et remboursera même ses reconnaissances de dette. Mais ça entraînera une réduction des "services". A la Chronique Agora, chaque fois que nous associons le mot "service" au mot "gouvernement", nous avons envie de prévenir les lecteurs que nous ne n’en pensons pas un mot. La plupart des services gouvernementaux sont l’inverse d’un service… une entreprise subventionnée par le gouvernement valant moins que les sommes nécessaires pour fournir le service en question. C’est le contraire d’un service pour l’économie en général.
* Quant aux marchés, ils ont encore du chemin à faire à la baisse. Tout comme l’économie, les marchés suivent de longs cycles — de haussier à baissier, puis retour. Le premier cycle haussier d’après-guerre a mené le Dow Jones de moins de 100 points à près de 1 000 en 1966. Puis l’indice se traîna durant les 16 années qui suivirent. Si l’on tient compte de l’inflation, les investisseurs ont perdu plus de la moitié de leur argent durant cette période. Puis a commencé le grand marché haussier qui a dominé nos vies financières jusqu’en 2007. Celui-là a en fait atteint son sommet en janvier 2000 — en termes réels. Comptez l’inflation, et les investisseurs n’ont rien gagné entre 2000 et 2007. Le marché baissier actuel dure donc depuis déjà neuf ans. Mais s’il dure autant que les grands marchés baissiers du 20ème siècle — soit 18 ans environ — cela signifie qu’il n’est qu’à moitié terminé. Vous pouvez vous attendre à le voir prendre fin entre 2015 et 2020.
* Où sera le Dow à ce moment-là ? Nous pouvons hasarder une supposition. Si l’économie devait perdre, disons, 10% du PIB… la perte en termes de ventes incrémentielles éradiquerait probablement environ 50% des profits des entreprises. Et le secteur financier, qui en représentait 40% à son sommet, reviendra probablement au chiffre plus raisonnable de 10% des profits — soit une perte de 30%. Bien entendu, ces chiffres se recoupent un peu — sans compter qu’ils sont accompagnés d’une bonne dose de notre pessimisme habituel… mais partons du principe que la perte de profits, pour les entreprises, se monte à 60%. Donc si 2007 représentait une base 100 $ pour les profits des entreprises, nous pourrions en attendre 40 $ seulement à l’avenir.
* La chose la plus importante qui se produise dans un marché baissier, c’est la baisse des multiples. Les investisseurs, qui étaient prêts à payer 25 $ pour un dollar de revenus au plus haut du marché haussier commencent à penser qu’ils étaient trop optimistes. A mesure que la dépression s’approfondit, ils se mettent à voir les choses différemment. Ils constatent que les revenus continuent de chuter et se disent qu’ils devraient être plus prudents. Ils font donc baisser les PER… qui passent de 25 à cinq environ. Mais disons que les PER baissent à huit… sur des revenus du Dow qui ne sont qu’à 40% de ce qu’ils étaient en 2007. Où est-ce que ça met le plancher ? Le Dow à 1 600. Avec un peu d’inflation… mettons 2 500.
* Soyez prudent…
** "Quel genre de bétail est-ce que vous élevez en Argentine… au ranch ?" nous a demandé un ami à Vancouver.
* "Eh bien, il y a trois sortes de bétail", avons-nous expliqué. "Les bêtes qu’on nourrit au grain. Celles qu’on nourrit à l’herbe — l’Argentine est célèbre pour ça. Mais moi, j’ai des boeufs nourris au sable".
* "Au sable ?"
* "Oui, c’est plutôt sec, par là-bas. Chaque fois que j’y vais, je me demande ce qu’ils mangent. Il n’a pas vraiment plu depuis deux ans. Je ne vois quasiment pas d’herbe. Je pense qu’ils mangent du sable. On en a beaucoup, du sable…"
* "A quoi est-ce qu’ils ressemblent ?"
* "Ils sont bruns et très maigres".
* "Ca ne semble pas très appétissant"…
* "Ils ne le sont pas… ils sont presque trop durs pour être mangés. Mais ils ont un grand avantage".
* "Lequel ?"
* "Un taux de cholestérol très bas. Si, si, c’est un point important. Le boeuf nourri au sable est très faible en cholestérol. Et en graisse. Et en tout le reste. Idem pour les calories. C’est du boeuf light. Nous voulions l’appeler ‘boeuf zero’, mais nous avons préféré ‘nourri au sable’."
* "Et c’est bon ? Les gens en redemandent ?"
* "Pas très souvent. En général, ils ne peuvent manger qu’un seul steak, parce que ça use beaucoup les dents".