** Deux titres dans la presse, tous deux frauduleux :
* "L’économie chinoise rebondit", titrait l’International Herald Tribune.
* "Les profits de JP Morgan grimpent en flèche en dépit du retournement, titre un autre.
* Le lecteur ou le téléspectateur moyen n’ira pas plus loin. "Ah", se dira-t-il, "des bonnes nouvelles ; le pire est passé. La Chine est une jeune pousse de la taille de l’Amazonie. Et JP Morgan est leader du secteur financier. Si le secteur financier va bien, c’est que l’économie mondiale tout entière va bien".
* Mais à la Chronique Agora, c’est plus fort que nous. Si nous voyons une médaille, nous cherchons son revers. Nous voyons des ordures… nous cherchons le rat.
* Nous commençons avec la publication des profits de JP Morgan, parce que c’est le plus intrigant. Commençons par planter le décor :
* Ce dernier demi-siècle, le crédit s’est développé plus vite encore que les tailles de vêtements. Tout ça a rendu le colportage de crédit extrêmement profitable. Les profits du secteur financier ont grimpé jusqu’à représenter 40% du total américain. Et toutes les mères de famille voulaient que son rejeton devienne trader dans une banque d’investissement.
* Puis, en 2007 et en 2008, la bulle du secteur financier a éclaté. De nombreuses banques et institutions financières ont fait faillite… ou ont été renflouées par le gouvernement. Au lieu d’être le secteur le plus prestigieux du monde… la finance est devenue la scène de son plus grand krach.
* A présent, de ce que nous avons pu constater, un changement fondamental s’est produit. Les gens n’ont plus hâte de s’endetter plus lourdement. Non… ils cherchent plutôt à rembourser leurs dettes au plus vite… c’est-à-dire à se débarrasser de la finance… et s’éloigner autant que possible du secteur financier. Les taux d’épargne américains, par exemple, sont passés de zéro à 7% au cours des 12 derniers mois seulement.
* Mais au beau milieu de ce changement historique et remarquable, nous apprenons qu’au moins quelques-unes des plus grandes sociétés du secteur financier — JP Morgan et Goldman Sachs — gagnent des milliards de profits.
* "Alors même que la société doit absorber le pire ralentissement économique de ces dernières décennies, JP Morgan Chase a annoncé jeudi avoir enregistré un profit de 2,7 milliards de dollars au deuxième trimestre, provenant de résultats spectaculaires dans les activités de banque et de trading".
* C’était à peu près la même histoire que pour Goldman. Aucune des deux banques n’a fait ces profits "à l’ancienne" — c’est-à-dire en prêtant de l’argent pour des projets qui en valaient la peine ; elles ont gagné leur oseille grâce au "trading" et à la "banque d’investissement". En d’autres termes, elles ont engrangé des milliards en spéculant.
* Quiconque pense qu’il s’agit là de preuves d’une reprise économique devrait travailler pour le gouvernement. Seul un économiste gouvernemental ou un déficient mental (pardonnez-nous cette redondance) pourrait penser qu’une véritable prospérité peut être construite sur les bases de la spéculation de grandes institutions financières. On peut comprendre pourquoi en posant une question simple : contre qui tradent-ils ?
* La spéculation est un jeu qui tourne à vide. Peu importe qui l’emporte, l’économie ne s’en trouve pas mieux ; elle n’a pas un centime de plus de ressources. Goldman et JP Morgan annoncent, à eux deux, des bénéfices de plus six milliards de dollars. Qui était de l’autre côté de ces transactions ?
* Il y a aussi quelque chose de louche dans toute l’affaire. Le trading n’est pas seulement un match nul, c’est aussi un coup de chance. Les traders perdent de l’argent à peu près aussi souvent qu’ils en gagnent. Evidemment, normalement, les traders des grandes banques ont un avantage ; ce ne sont pas des idiots. Ils gagnent de l’argent en prenant celui des traders amateurs, qui sont des idiots, eux. Mais quel trader amateur avance six milliards de dollars ?
* Notre supposition : la partie est truquée. Ils tirent parti des programmes de relance de la Fed… et tradent contre le plus grand pigeon du monde : le contribuable américain. Comment ? Nous le découvrirons bientôt…
** Pendant ce temps, on apprend que les affaires reprennent pour la Chine.
* "Les dépenses gouvernementales ont poussé la croissance du PIB à 7,9% au deuxième trimestre", annonce l’International Herald Tribune, "… nourrie par un considérable plan de relance économique et une politique de prêt agressive de la part des banques… un chiffre étonnamment vigoureux durant un ralentissement économique mondial"…
* "… alors que la plupart des autres grandes économies se contractent et subissent la pire crise économique de ces dernières décennies, la Chine semble avoir franchi un tournant"…
* "La croissance au deuxième trimestre a été alimentée par des ventes solides dans les secteurs automobile et immobilier, un rebond de l’industrie et de gigantesques dépenses d’infrastructures qui ont soutenu les prix mondiaux des matières premières".
* En cherchant un peu plus loin, on s’aperçoit que les prêts bancaires et la spéculation immobilière se sont emballés. Et les actions à Shanghai ont grimpé de 75% à ce jour cette année.
* Bon, maintenant, essayons de comprendre tout ça. Le monde est en crise. La Chine vend des choses au monde. Pourtant, la Chine est en plein boom.
* Comment est-ce possible ? A nouveau, il y a quelque chose de louche là-dedans… comme si le gouvernement trafiquait les chiffres… comme si les spéculateurs avaient perdu l’esprit… et comme si tout cela n’était que le résultat de la sorte de "stimulants" malavisés qui nous ont mis dans le pétrin au départ…
* Boom… boom… ka-booooom !