▪ Eh bien, ils auront fini par l’avoir, leur rally de Noël… Regardez la journée d’hier, vous verrez que tout va bien dans le meilleur des mondes — surtout aux Etats-Unis. Il fallait que les marchés grimpent avant la fin de l’année, c’est chose faite.
Comment ? Que dites-vous ? La crise européenne ? Bof… non, elle n’est pas résolue, mais on trouvera bien quelque chose ! L’euro est « irréversible », c’est Mario Draghi qui l’a dit — et chacun sait que la parole d’un banquier central est d’or. Quant à l’économie américaine, c’est la plus dynamique et la plus résiliente au monde — ça aussi, c’est un banquier central qui l’a dit, de mémoire.
Donc pourquoi s’inquiéter ?
Il n’y a pas à dire, cher lecteur, les marchés ont une mémoire de poisson rouge… et tant mieux : ne dit-on pas parfois de l’ignorance qu’elle est une félicité ?
En tout cas, c’est ainsi que le CAC 40 a pu s’envoler de 2,76% hier, repassant la barrière des 3 000 et terminant à 3 055,39 points (et tant pis si le volume — 2,4 milliards d’euros échangés seulement — est sans doute pour beaucoup dans cette amplitude).
Le Footsie londonien engrangeait plus modestement +1,02%, tandis qu’à Francfort, on faisait sauter les bouchons de champagne avec +3,11% pour le DAX. Même l’euro a gagné un peu de terrain sur le dollar.
Côté US, même humeur joyeuse. Le Dow Jones a fusé de 2,87%, à 12 103,58 points. Le S&P 500 grimpait quant à lui de 2,98%, à 1 241,30 points… et enfin le Nasdaq emmenait les technologiques pas moins de 3,19% plus haut, à 2 603,73 points.
▪ Mais enfin, vous direz-vous, qu’est-ce qu’ils ont à n’être jamais contents, à la Chronique Agora !
Le département du Commerce US a annoncé hier que les mises en chantier ont grimpé de 9,3% le mois dernier — on n’avait plus vu un tel niveau depuis mars 2010, selon Investir. Si l’immobilier se reprend aux Etats-Unis, le reste ne devrait plus tarder à suivre…
En Europe aussi, il y avait de bonnes nouvelles : l’indice IFO du climat des affaires en Allemagne a gagné 0,6 point à 107,2 (contre un repli à 106,1 attendu).
Et surtout, surtout… les obligations espagnoles ont retrouvé la faveur des investisseurs lors d’une adjudication de dette : « non seulement l’Espagne a vendu plus de dette que prévu (5,64 milliards d’euros) », explique encore Investir, « mais en plus les rendements étaient en forte baisse, de l’ordre de deux à trois fois. Le rendement moyen du papier à trois mois est retombé à 1,735% contre 5,11% lors d’une adjudication précédente, tandis que celui de l’émission à six mois s’est détendu à 2,435% contre 5,227% ».
Et voilà très précisément ce qui nous met de mauvaise humeur, cher lecteur : le retour au « comme avant ». La continuation de l’endettement, des déficits et de la zombification de l’économie, au lieu de purger le système une bonne fois pour toutes — pour repartir sur des bases saines.
L’Espagne peut continuer à s’endetter, youpi ! Il en sera sans doute de même pour l’Italie, la Grèce, la France et tutti quanti. Prêtons 150 milliards d’euros au FMI afin qu’il nous les re-prête dans quelques semaines, arrangeons quelques sommets ici et là pour pacifier les marchés, faisons marcher la planche à billets : après nous le déluge — même s’il a lieu demain.
En attendant, nous, nous continuons de guetter les signes d’une vraie reprise… et d’acheter de l’or, à défaut de nous construire une arche.