▪ Le CAC 40 va-t-il inscrire ce vendredi une mythique septième séance de hausse consécutive ? Le dollar va-t-il tester un nouveau plancher annuel de 1,50/euro tandis que le pétrole s’installera au-dessus des 115 $ ?
Le Nasdaq inscrira-t-il un nouveau zénith au-delà des 2 870 points, son meilleur score intraday depuis le 24 janvier 2001 ? La croissance américaine se redressera-t-elle au-dessus des 2% au deuxième trimestre 2001 ?
Les réponses importent beaucoup moins que le constat de l’aspect surréaliste de la juxtaposition de ces questions.
Comment le Nasdaq parvient-il à battre ses records de l’automne 2007 alors que la conjoncture américaine est juste deux fois moins vigoureuse qu’à l’époque ? Rappelons que la consommation des ménages américains (et européens) replonge au mois de mars ; ne parlons pas du Japon où les ventes de détail s’effondrent de 8,5%.
Comment le DAX 30 parvient-il à atteindre un nouveau sommet annuel à pratiquement 7 500 points alors que le dollar dévisse de 10% par rapport à ses niveaux de la mi-février ? Cette date marque le précédent zénith long terme au contact des 7 440 points.
Comment les investisseurs s’exonèrent-ils des signaux d’alertes inflationnistes en provenance du compartiment des matières premières avec une once d’or à 1 535 $ et un Brent à 126 $ ?
La contradiction n’est qu’apparente : il suffit simplement d’adopter le principe selon lequel il ne faut pas chercher à raisonner le marché.
Puisque tout monte, les taux d’intérêt (sauf aux Etats-Unis), le pétrole, les céréales, les oeuvres d’art, les métaux précieux, les actions… il n’y a qu’à se laisser porter par la vague et profiter de l’aubaine !
C’est un peu comme un parieur qui se serait égaré dans les paddocks de l’hippodrome juste au moment où une bande margoulins est en train de débattre de l’ordre d’arrivée du prochain tiercé. Mais bien sûr, les paris sont truqués, le commissaire de course et les jockeys montant les trois favoris sont corrompus.
Le but de la manoeuvre consiste à miser sur les plus grosses cotes afin de maximiser les gains. De la même façon, ceux qui manipulent les indices retiennent l’hypothèse la moins probable — et si possible la plus absurde — afin de laminer tous les intervenants qui s’imaginent que le marché constitue la somme des stratégies appliquées par les intervenants dotés du plus solide bon sens.
▪ Le bons sens consistait à fuir la Bourse au troisième trimestre 2007. A cette époque, les échanges interbancaires commençaient à se figer suite à la désintégration de la confiance dans les dérivés de crédit.
Mais Wall Street avait opté pour la fuite en avant. La sphère médiatique (aux ordres de la sphère financière) martèlerait jusqu’au bout que la hausse des actions prouvait que le danger d’un accident systémique lié au secteur du crédit — ou même d’une correction mineure dans l’immobilier — était inexistant.
Les faiseurs d’opinion s’appuyaient sur un avis qui avait valeur d’oracle irréfutable et de Tables de la Loi ; un avis suivi religieusement par les experts de tout acabit — un avis que seul l’inestimable Ben Bernanke pouvait répéter inlassablement sans se voir traiter de crétin et de menteur.
Car c’est bien lui qui a endormi l’opinion durant plus d’un an (de l’été 2007 à l’été 2008). Il a soutenu que le secteur du logement marquerait au pire une pause avant de repartir de plus belle à la hausse. D’après lui, le risque d’impact négatif de la crise des subprime apparaissait négligeable compte tenu de la solidité du système bancaire américain.
Il affirmait hier que la résurgence de l’inflation était « temporaire » et que sa politique monétaire laxiste ne contrevenait pas à l’objectif de stabilité des prix de la Fed et de préservation de la valeur du dollar. Nous pouvons donc le croire sur parole !
▪ Seuls quelques idiots de cambistes se sont empressés de vendre du dollar mercredi soir. Cela a réjoui Wall Street puisque la désintégration du billet vert dope la compétitivité des entreprises américaines.
Les indices US en ont profité pour battre avec entrain de nouveaux records annuels. La place boursière a validé les scénarios les plus haussiers des 80% de professionnels qui affirment haut et fort leur optimisme inoxydable. Mais la plupart d’entre eux — à titre personnel — achètent surtout de l’or tout en serrant les stops sur les actions.
Wall Street a paru hésiter ce jeudi en première partie de séance. Les indices américains sont ensuite passés de 0 à +0,3% entre 17h00 et 17h30, ce qui a entraîné une clôture au plus haut du jour à Paris (+0,91% à 4 105 points) ainsi qu’à Francfort (+0,95% à 7 475 points).
Le DAX inscrit ainsi un nouveau zénith annuel à 4 780 points. Pendant ce temps, le dollar a perdu 10% depuis le précédent record des 7 440 points de la mi-février.
Voilà un nouvel exemple du recours systématique à la manipulation des cours destinée à entretenir la hausse somnambulique des indices boursiers. C’est la politique du miracle permanent ; plus l’actualité économique apparaît de nature à doucher l’optimisme du marché, plus les acheteurs se sentent pousser des ailes.
▪ Avez-vous seulement gardé le souvenir d’un mauvais chiffre qui ait fait plier Wall Street depuis le 31 décembre dernier ?
Même Fukushima débouche sur une série de sept semaines de progression consécutives des indices américains. La mécanique haussière se trouve opportunément relancée par la menace de dégradation de la dette US par Standard & Poors il y a 10 jours, et hop ! Sept séances de gain consécutives pour le Nasdaq dans la foulée.
Plus c’est ubuesque, plus le marché se régale ! Il applaudit l’échec complet du QE2 de la Fed en termes de croissance (elle rechute de 3,1% à 1,8% depuis sa mise en oeuvre) et de créations d’emplois.
▪ Les inscriptions hebdomadaires au chômage ont bondi de 25 000 lors de la semaine du 23 avril (à 429 000). La moyenne mobile sur quatre semaines a vivement progressé : elle grimpe de 2%, à 408 500. Cette fois-ci, aucun biais statistique ou conjoncturel n’explique cette dégradation.
Le dollar continue d’enfoncer des planchers annuels (à 1,4830/euro) et sa perte dépasse maintenant les 4% en 10 jours. C’est l’équivalent de la hausse de Wall Street ou des places européennes, ce qui illustre un véritable phénomène de vases communicants.
Nous essayons depuis des mois d’investir en recherchant des gisements de création de valeur. Mais finalement, tout se résume à des jeux d’écriture, du trading algorithmique haute fréquence, des prises à contre-pied systématiques du moindre consensus baissier pour le seul profit de ceux qui les orchestrent. Le but étant de ramener le VIX (l’indice du stress) sous le plancher technique des 15, ce qui est chose faite depuis 48 heures.
Et dans quel but d’après vous ?
Demandez-vous seulement s’il s’est produit une seule fois au cours des 50 dernières années cette combinaison prodigieuse et totalement contre nature d’une once d’or qui pulvérise record sur record (1 539 $ jeudi soir) tandis que le VIX enfonce plancher sur plancher.
Le VIX, c’est le baromètre de la sphère du virtuel carburant à la monnaie de singe. Le métal précieux, c’est exactement l’inverse. Devinez lequel préfigure la teneur des mois à venir ?
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*1,35 euro par appel + 0,34 euro / minute.
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