** "Merci Seigneur d’avoir créé l’Argentine", nous disait avant-hier notre vieil ami Doug Casey.
* Presque toutes les nouvelles économiques sont mauvaises. Les consommateurs ralentissent leurs dépenses — les actions des revendeurs au détail ont baissé de 40% par rapport à leur niveau record. Même Walmart — la chaîne de magasins où les gens vont quand ils ne veulent pas dépenser trop d’argent — a chuté de 20%.
* Les usines américaines — du moins celles qui ont tenu — ralentissent elles aussi leur activité. La semaine dernière, il a été dit que la production des usines avait baissé de 6% au troisième trimestre ; la plus grosse chute depuis 17 ans.
** Dimanche, nous sommes allé à l’église à Buenos Aires, au son des cornemuses. Une église non loin de notre appartement propose une messe en anglais. Juste devant était posté un joueur de cornemuse vêtu de l’uniforme complet des natifs des Highlands écossais. Que faisait-il ici ? Nous n’en savons rien. Nous avons descendu la rue jusqu’à une autre église.
* "Rendons à César ce qui appartient à César", était la phrase clé du sermon de dimanche. Nous ne parlons pas très bien espagnol. Mais nous avons déjà entendu cette histoire, et nous en connaissons l’intrigue. Durant l’époque romaine, les autorités du Levant ont essayé de tendre un piège à Jésus. Ils pensaient avoir affaire à un rebelle… un mécontent… un fauteur de troubles. S’ils avaient pu lui faire dire qu’un homme ne devrait pas payer ses impôts, ils auraient pu lui passer les menottes et l’enfermer à perpétuité. Mais Jésus était bien trop intelligent pour eux. Plutôt que de tomber dans leur piège, il leur a sorti une réplique sacrément maligne : il leur a jeté une pièce frappée de la trogne de l’empereur, et leur a dit la fameuse phrase. Qu’est ce que cela signifiait ? Personne n’a jamais vraiment su.
* Mais la devise de César était ce que les Césars en avaient fait. Ils avaient créé des pièces en or et en argent… qu’ils ont ensuite dépréciées avec d’autres métaux. Et quand les gens ont essayé de les rendre à César pour payer leurs impôts — à valeur nominale — pendant un temps au moins, les percepteurs de l’empereur les ont refusées ! Ils voulaient une monnaie de plus de valeur.
* "Les empires bâtis sur des dettes commencent à se fissurer" est une autre phrase clé de la semaine ; elle nous vient cette fois-ci du New York Times. L’empire romain a vu trop grand… a trop dépensé… et a commencé à s’écrouler peu après la mort de Jésus. Aujourd’hui, un autre empire semble avoir vu trop grand…mais nous en reparlerons plus tard…
** L’Argentine est pleine de surprises. La première étant que le pays de la pampa a bien résisté à la tempête financière qui a secoué le monde. Ce week-end, le Financial Times a annoncé que :
* "Les Etats-Unis traversent leur pire récession en 26 ans".
* L’Europe subit également un grave ralentissement. Et l’Asie — eh bien, si les prix des actions laissent présager des problèmes économiques à venir, l’Asie va subir le pire effondrement de tous.
* Et l’Argentine ? Le pays semble avoir été épargné. Il est béni par sa mauvaise gestion interne…sauvé par sa propre incompétence.
* Incompétence… paresse… et médiocrité sont selon nous beaucoup trop sous-estimées. "Ce ne sont pas toujours les plus rapides qui remportent la course… ni les plus forts qui gagnent la guerre", dit la Bible. Bien sûr. Il arrive que ce soit celui qui s’est tordu la cheville qui remporte la course… et que ce soit les pacifistes qui gagnent la guerre !
* Evidemment, quand tout avance bien, le bien avance vite.
* Mais en ce moment, tout n’avance pas si bien, et ceux qui sont allés trop vite le regrettent amèrement. En d’autres termes, si Lehman n’avait pas été si prompt à tirer avantage de la bulle du crédit, il n’aurait pas mis la clé sous la porte.
* Ce qui nous a mis cette idée en tête, c’est ce que nous avons lu dans l’avion. Nous avons acheté un livre à l’aéroport de Madrid — une biographie d’Heinz Guderian. Ce nom vous rappelle-t-il quelque chose, cher lecteur ? Il devrait. Parce que si les chars d’Heinz Guderian n’avaient pas traversé si vite la Pologne au printemps 1939, Adolf Hitler n’aurait pas été encouragé à envahir la France. Ensuite, si la nouvelle invention de Guderian — la Guerre éclair — n’avait pas été un tel succès en France, Hitler aurait rangé sa carte de la Russie au fond d’un tiroir, il aurait fait la paix avec l’Angleterre et la Seconde guerre mondiale telle que nous la connaissons n’aurait pas eu lieu.
* Mais dans les premiers jours de la Seconde guerre mondiale, la bataille a été remportée par les plus rapides ! Heinz Guderian faisait partie de cette poignée de militaires — un groupe qui comprenait Charles de Gaulle et Georges F. Patton — qui commençaient à comprendre que le monde avait changé. Dans la guerre de Lincoln contre les états du sud, Stonewall Jackson a énoncé une idée clé : l’attaquant perdait toujours. Un soldat avait peu de chances de traverser un terrain à découvert quand des défenseurs déterminés étaient postés de l’autre côté. L’invention de la mitraillette a semblé rendre cette idée évidente pour tout le monde — même si les généraux de la Seconde guerre mondiale oubliaient cette leçon avec une régularité navrante… et à un prix effroyable.
* Les chars ont tout changé. Brusquement, l’avantage a basculé à l’attaquant. Heinz Guderian, avec ses divisions de chars, pouvait balayer le nord de la France à une telle vitesse que les commandants français n’avaient pas le temps de comprendre ce qui se passait. Ils ne pouvaient organiser aucune défense ; le temps qu’ils aient mis en place une ligne de défense, Guderian l’avait déjà traversée. Les Français avaient beau avoir plus de chars que les Allemands, ils n’avaient aucun plan de défense contre la Guerre-éclair ; c’était la première fois qu’ils en voyaient une.
* Si Guderian avait été un crétin ou un fou, tout aurait pu tourner à leur avantage. Mais les Allemands ont été maudits par leur propre réussite.
* Quand le régime nazi a chuté, les Peron ont distribué des passeports pour permettre aux officiels en haute place de s’échapper dans la pampa. Mais d’après ce qu’on peut voir ici, les fugitifs nazis ont oublié d’amener dans leurs valises leur génie de l’organisation. L’Argentine titube. Même au milieu du plus grand boom des prix de l’agriculture en 30 ans, l’Argentine n’a pas réussi à faire le moindre bénéfice. Le pays est riche en terres cultivées. Il est riche en minéraux. Il possède l’un des plus grands lacs souterrains du monde. Le temps que les Argentins soient prêts à tirer avantage de la hausse des prix — le boom était terminé.
* "Oui, j’aime bien ce pays", a dit Doug. "Ce doit être le seul endroit au monde où les prix n’ont pas baissé. Parce qu’ils n’ont jamais augmenté. L’Argentine n’est pas touchée par la crise du crédit principalement parce qu’elle n’a jamais eu de crédit. Même le gouvernement. Il faudrait être fou pour prêter de l’argent à l’Argentine".