** Tout se déroule comme il le devrait — hélas !
* A présent, les Européens entrent en scène — même s’ils n’ont qu’un second rôle mineur. Fortis — une grosse société belgo-néerlandaise — va faire faillite, selon les journaux. Et les autorités de trois pays au moins essaient de la sauver. Selon le Financial Times, la société sera probablement nationalisée par le Luxembourg, la Belgique et les Pays-Bas — tous à la fois.
* Ce sera une première — une entreprise reprise par des politiciens qui parlent au moins trois langues différentes. Nous appellerions plutôt ça une "internationalisation".
* Pendant ce temps, dans les brumes britanniques, le gouvernement se prépare à nationaliser une autre grande banque — Bradford & Bingley. Les épargnants, nerveux, retirent leur argent, laissant la société dangereusement à court de cash, selon le Financial Times.
** Il n’était pas besoin d’être un génie pour voir que l’addition serait salée. C’est ce qui se passe à chaque fois qu’on atteint le sommet d’une bulle de crédit. Les gens peuvent dépenser plus qu’ils ne gagnent pendant des années ; ils finissent toujours par arriver au point où ils ne peuvent plus continuer. Les prêteurs et les investisseurs en font inévitablement trop eux aussi. Ils sont si avides de gagner quelques commissions qu’ils cessent de s’inquiéter de savoir si le prêt sera remboursé un jour.
* Mais les génies n’ont rien vu venir. Ils étaient trop impressionnés par leurs propres théories, leurs propres modèles financiers… et leurs propres bonus de plusieurs millions de dollars.
* C’est à nous — pauvres, négligés, solitaires que nous sommes, à la Chronique Agora — qu’est revenue la tâche de hisser le drapeau d’alerte au krach, jour après jour… et de dire l’évidence à quiconque voulait nous écouter : "ça passera".
* Et désormais, selon le New York Times, ça passe :
* "La fin de l’euphorie", comme le dit le Times. "C’est l’heure de l’addition pour les excès des 15 dernières années".
* Mais où est la surprise ? M. le Marché a toujours une surprise dans sa manche. Et il l’apporte toujours au moment où on s’y attend le moins.
* Jusqu’à présent, la surprise est que le secteur financier a été atteint plus durement qu’on l’attendait. Chaque fois qu’une institution craque, les autorités réagissent avec plus d’argent et plus de crédit. Chaque fois, les actions rebondissent et partout, on dit que la crise est terminée.
* Puis une autre institution rend l’âme. Et à présent, apparemment, Warren Buffett a décroché son téléphone — selon nos sources au Financial Times — pour avertir le Congrès américain que s’il n’agit pas au sujet du plan de renflouement, les choses pourraient empirer gravement.
* Oui, tout ça fait aussi partie du programme. Lorsque les gens reçoivent la facture de leurs propres erreurs, ils veulent tout naturellement la passer à quelqu’un d’autre. Et à qui mieux que ce pigeon de dernier recours — le contribuable ? L’addition, pour le plan de sauvetage de Paulson, pourrait atteindre les 1 000 milliards de dollars. C’est du moins l’estimation de Ken Rogoff, économiste à Harvard. Voyons voir… cela représente environ 12 000 $ par famille américaine. Pourtant, qui se plaint ? Où sont les émeutes ? Qui a 12 000 $ à sa disposition pour les envoyer aux autorités américaines de manière à ce qu’elles puissent les refiler à Wall Street ?
* Nous verrons bien…