** "On ne saura jamais ce qui va se produire, ou quand — mais les choses se passent toujours de la même manière"…
* Nous essayions d’expliquer les mystères des cycles boursiers à l’un de nos voisins lors d’un dîner hier soir. Nous aurions aussi bien pu être en train de lui décrire le Saint-Esprit ou de lui expliquer où trouver précisément un photon. Notre interlocuteur était un homme à l’esprit pratique — un promoteur ayant lancé un gigantesque projet, plusieurs centaines d’appartements sur la côte méditerranéenne. Il voulait des réponses concrètes.
* "Y’a-t-il assez de demande pour ces nouveaux appartements ? " avons-nous demandé malicieusement.
* "Eh bien, oui… jusqu’à récemment"…
* Dans une bonne partie du monde, l’histoire est la même. Les prêteurs prêtent à contre-coeur ; ils hésitent plus par rapport à l’an dernier. Les acheteurs — qui ne peuvent obtenir du crédit facile — peuvent moins acheter. La demande et les prix baissent.
* Le Los Angeles Times nous apprend qu’en Californie, les prix ont chuté de 40% depuis le début du marché baissier de l’immobilier. Il y a un an de ça, une maison moyenne coûtait 587 000 $, affirme l’article du LA Times. A présent, vous pouvez l’acheter 350 000 $.
* Un blogueur sur le site du journal affirme avoir trouvé une maison dont le prix avait été réduit de 77% — toujours sans trouver acheteur. Nous avons regardé la photo de la maison ; pas étonnant qu’elle n’ait pas trouvé acheteur. C’est une cabane, pas une maison. Malheureusement, bon nombre des maisons en vente en Californie sont des cabanes. Au moins, maintenant, elles se vendent moins cher.
* "Nous allons devoir baisser les prix"… déclara notre ami promoteur, "ou geler le projet jusqu’à ce que la situation se retourne."
* Puis arriva la question évidente : "quand pensez-vous que les choses reviendront à la normale ? "
* Notre réponse glissa aussi facilement qu’un mouchoir de soie : "les choses sont normales en ce moment", avons-nous répliqué.
* Comme nous l’avons expliqué hier, la bonne volonté des prêteurs et la valeur du nantissement tendent à grimper ou baisser de concert. Lorsque les prêteurs hypothécaires se pressent pour donner de l’argent afin que les gens puissent acheter des maisons, on peut s’attendre à ce que les prix de l’immobilier grimpent. En fin de compte, les maisons deviennent si chères que même si les gens peuvent encore se permettre de les acheter, ils ne peuvent plus se permettre de les payer. C’est là que les prêteurs commencent à y réfléchir à deux fois. Et une fois que les prêteurs prennent peur, les prix chutent. Parfaitement normal.
** Jusqu’à présent, les choses se passent exactement comme elles le devraient. Le boom suit le krach, qui suit le boom. Encore et encore, les mêmes erreurs sont commises — mais par des gens différents.
* Sauf que les gens n’aiment pas admettre qu’ils ont fait des erreurs. Si bien que lorsque les marchés commencent à se retourner contre eux, ils s’imaginent que ce n’est qu’un coup du hasard. Ils s’attendent à voir les choses revenir rapidement à la "normale", sans se rendre compte que ce qui est normal, c’est de faire des erreurs et de perdre de l’ argent.
* Lorsque l’immobilier a commencé à chuter, les gens n’y ont d’abord pas cru. Ils avaient appris que "la pierre grimpe toujours", ou qu’"on ne peut pas se tromper avec l’immobilier". Evidemment, ils ont pris les premiers signes de ralentissement comme une opportunité d’achat. Plus tard, ils se sont rendu compte que c’était une opportunité de vente — la dernière chance de sortir avant que le toit ne s’effondre.
* De même, lorsque les banques, les hedge funds et les prêteurs hypothécaires ont commencé à envoyer des signaux d’alertes, on a pensé que les problèmes étaient temporaires et modestes. "On peut les contenir", c’est ainsi que Henry Paulson a décrit les premières petites fissures dans le marché des dettes subprime. Mais les fissures se sont élargies. A présent, certains des plus grands édifices financiers des Etats-Unis — Bear Stearns, Lehman Bros., Fannie Mae et Freddie Mac — sont tombés, ou commencent à pencher dangereusement.
* Un junk bond sur quatre est en difficulté, selon CFO.com. Et la crise du crédit est loin d’être terminée. Elle dure depuis plus d’un an ; avec la valeur du nantissement qui continue de chuter, des centaines de milliards de dollars de pertes restent probablement à découvrir, reconnaître et éponger.
* Mais peut-être que les prix du nantissement vont cesser de chuter ?… Peut-être qu’alors, les prêteurs seront plus souples en matière de crédit ?… Et peut-être que les beaux jours reviendront ?…
* "Les ventes de maisons US montrent des signes de reprise alors que le déclin des prix ralentit", titrait cette semaine l’International Herald Tribune. Les grandes lignes de cette bonne nouvelle, c’est que les prix des maisons ont moins chuté en juin qu’en mai (même si les 12 mois précédant juin montraient la chute la plus sévère de l’immobilier de toute l’histoire des Etats-Unis)… et qu’en juillet, les ventes de logements neufs et anciens ont même grimpé !
* A trois ou quatre reprises au moins au cours de l’année passée, les marchés se sont repris en apprenant que "c’est terminé". Bien entendu, un jour, ce sera "terminé"… mais ce ne sera probablement pas avant que les gens aient cessé d’attendre la fin.