Internet et le partage de l’information n’ont pas créé la croissance promise. Et déjà de nouveaux venus viennent concurrencer les grands acteurs surcotés.
La situation actuelle, nous diraient les vétérans, c’est une bulle qui cherche son épingle. Il pourrait s’agir des résultats trimestriels. Il pourrait s’agir de la guerre commerciale. Il pourrait s’agir de la prochaine hausse des taux. Nous ne savons pas quel sera l’objet pointu en question.
Donald J. Trump espère que les deux ne se rencontreront jamais. Personne n’a plus à perdre… et personne ne luttera plus férocement pour que la rencontre n’ait pas lieu. Dans le Wall Street Journal hier :
« Le président Trump a augmenté l’intensité de ses attaques contre le président de la Réserve fédérale, Jerome Powell, déclarant que le président de la banque centrale [des États-Unis] menaçait la croissance économique et semblait prendre plaisir à augmenter les taux d’intérêt.
Dans un entretien au Wall Street Journal mardi, M. Trump a reconnu l’indépendance dont la Fed profite depuis longtemps pour décider de la politique économique, tout en indiquant clairement qu’il envoyait intentionnellement un message direct à M. Powell pour lui dire qu’il souhaitait des taux d’intérêt plus bas. »
Même maintenant, deux ans après le début d’un cycle de « normalisation », la Fed prête encore à des taux proches du niveau de l’inflation des prix à la consommation, voire inférieurs. La plupart des économistes diraient qu’il est l’heure de retirer le bol de punch.
Et voilà que le président américain arrive avec une bouteille de gin pour relever un peu le breuvage. M. Trump est soit un génie de l’économie… soit un complet imbécile.
Toutes les fêtes doivent prendre fin. Toutes les bulles finissent par croiser leur épingle.
La révolution de l’information a tourné court
En attendant, nous explorons le phénomène de la Révolution de l’information en général, et Google et Facebook en particulier.
En deux mots : il y a beaucoup d’air dans ces deux entreprises ; il finira inévitablement par s’échapper. Nous allons voir pourquoi et comment.
La Révolution de l’information nous a effectivement fourni plus d’informations… mais qui a le temps pour cela ?
Qui pense qu’il nous faut plus d’informations ? Qui va voir sa femme pour lui dire : « Chérie, nous n’avons plus d’informations dans les placards » ? Et combien de gens vont voir leur psy pour leur raconter qu’ils n’ont pas eu assez d’informations étant enfants ?
Lorsque la Révolution de l’information a commencé dans les année 90, on pensait que le taux de croissance accélérerait parce que les gens auraient accès — un accès quasi-illimité — à l’information.
C’est ce qu’on pensait il y a 20 ans. Que s’est-il passé ? Les taux de croissance ont-ils grimpé depuis ?
Lorsque le nouveau siècle a commencé, l’économie tournait à 4% de croissance du PIB depuis 18 trimestres… c’est-à-dire depuis plus de quatre ans. Désormais, elle tient les 2% environ.
On peut même en douter, car les autorités ont changé leur manière de calculer l’inflation… de sorte que le taux de croissance réel pourrait être plus bas… voire négatif.
L’économie n’a pas accéléré. Elle a calé. Les taux de croissance ont commencé à chuter dans les années 70. La Révolution de l’information n’a pas inversé la tendance.
Aujourd’hui, la croissance du PIB est la moitié de ce qu’elle était dans les années 60 et 70… en dépit des plus grandes avancées des technologies de la communication de toute l’Histoire — et alors qu’on a plus de chercheurs, d’ingénieurs, d’universitaires, d’entrepreneurs, d’investisseurs… et de capitaux que jamais.
Un échec de plus
Une autre chose qui ne s’est pas produite : le capital n’est pas devenu plus productif.
Rappelez-vous, l’idée était que l’information et l’informatique réduiraient le besoin de capital. Le capital — l’épargne — serait bien plus efficace.
Ainsi, au lieu de 100 millions de dollars pour lancer une nouvelle entreprise, 50 millions seulement seraient nécessaires. Vous pourriez lancer deux fois plus de nouvelles entreprises avec la même somme.
Deux fois plus de nouveaux produits. Deux fois plus de production. Deux fois plus de progrès.
Est-ce bien ce qui s’est passé ? Non. Pas du tout. Le nombre de nouvelles entreprises aurait dû doubler. Au lieu de ça, il a chuté. Les lancements d’entreprises, entre les années 1990 et aujourd’hui, ont été divisés par deux, approximativement.
Le capital n’est pas devenu plus efficace, lui non plus. La Fed a ajouté 3 800 milliards de dollars d’ersatz de capital à l’économie depuis 2009… et cela a produit la reprise la plus faible de l’Histoire.
Quelle conclusion pouvons-nous tirer de cela ? Eh bien, l’information n’est de loin pas aussi précieuse que le pensaient les gens. Chacune d’entre elles doit être examinée… triée… et traitée.
L’information distrait. Elle embrouille. Elle monopolise le temps et l’attention. Comme le fumier, elle peut être utile… mais si vous en accumulez trop au même endroit, cela commence à puer.
Fin annoncée pour Facebook et Google ?
Mais l’information, c’est ce que refourguent Google et Facebook. Ce sont des médias basés sur la publicité. Les budgets publicitaires dépendent des ventes. Les ventes dépendent des consommateurs. Les consommateurs dépendent des salaires. Et les salaires dépendent du temps.
Le nombre d’heures disponibles est limité… et les salaires réels stagnent ou à peu près depuis 40 ans. Ne vous attendez donc pas à voir les budgets publicitaires grimper beaucoup.
Google et Facebook ont marqué le monde de leur empreinte non pas en augmentant la richesse planétaire (ils n’ont pas augmenté la productivité ou la croissance des salaires)… mais simplement en prenant des parts de marché aux journaux, aux magazines et à la télévision.
Malgré cela, les investisseurs donnent aux deux géants de la tech des PER — aux environs de 20 tous les deux — dignes de valeurs de croissance. Et leur capitalisation boursière combinée dépasse les 1 100 milliards de dollars.
Or — devinez quoi ? — Google et Facebook ne se développent plus beaucoup. A présent, de nouvelles entreprises techno leur prennent des parts de marché.
Teeka Tiwari nous a dit aux Bermudes que les vrais fans de techno n’utilisaient plus Google ou Facebook. Ils sont passés à la technologie blockchain.
Ces nouvelles entreprises ne collectent et ne vendent pas les données comme le font Google et Facebook ; elles laissent plutôt les utilisateurs contrôler leurs propres données (nous ne savons pas comment elles gagnent de l’argent, ceci dit — peut-être n’en gagnent-elle pas).
[NDLR : La blockchain présente un vrai potentiel — et quelques valeurs sont particulièrement bien placées pour en profiter : découvrez lesquelles en cliquant ici.]
Le départ des jeunes utilisateurs arrive au pire moment possible — juste avant une grosse baisse des marchés.
Cela laisse les « vieux » géants de la tech dans le pétrin : leur part de marché décline, dans un secteur à la croissance basse (les médias dépendant de la publicité)… et alors que le marché boursier commence à flancher.
Oui, c’est ce qui arrive lorsque l’épingle et la bulle finissent par se rencontrer. Les PER se dégonflent.
Au lieu de 20 fois les bénéfices, Google et Facebook se vendront peut-être bientôt 10 fois leurs bénéfices… à mesure que les budgets publicitaires… et les parts de marché… se contractent. Au lieu de valoir plus de 1 000 milliards de dollars, ils auront de la chance s’ils ne valent ne serait-ce que la moitié dans cinq ans.
A suivre…
2 commentaires
Un peu sévère le Bill là !! 🙂
C’est sure que toutes les promesses ne sont pas au rendez-vous.
En même temps, les pays émergents ont pris des part de marché aux US (et à l’Europe)
Du coup, sans google amazon airbnb … que serait l’économie US aujourd’hui ?
Je défends pas les valorisations des GAFA, loin de là.
Mais elles ont apporté une révolution dans notre mode de vie, dont personnellement, je ne peux me passer.
Et elles créent des emplois sans voler personne (voir plus bas le lien http pour les vrais voleurs)
Aussi, les chiffres de Google donnent le vertige 137 milliards de CA, autant en trésorerie, et 34 de résultat.
Facebook c’est 55 milliards de CA, 44 de trésorerie et 21 de résultat.
Je ne paierai pas le PER de 20 en 2018, pour ces boites. Mais s’il y a des escrocs aux US (en dehors de la valorisation boursière) c’est pas elles.
Faut regarder par ici…
http://www.leparisien.fr/societe/les-tasses-a-cafe-a-1200-dollars-de-l-armee-de-l-air-americaine-font-scandale-25-10-2018-7927521.php
Rien que Linux, développé grâce à la collaboration via internet de milliers de développeurs partout dans le monde, et qui permet de faire tourner la plupart des serveurs (et des smartphones Android) du monde… Gratuitement.
Sans parler des économies et rapidité à s’envoyer des e-mails plutôt que courriers ou fax, de donner un ordre de virement immédiat, de commander à distance sans se déplacer, et j’en passe. Une gigantesque source d’économie !
Mais je parle plus d’informatique, techniques, outils, d’échange d’information, que d’information elle même.
Pour que l’information, abondante, traitée intelligemment, permette de faire des économies et/ou des gains de productivité, économiser des coûts ou produire de la richesse, il faut y accéder, et ce n’est pas encore fait: la mise en place des outils de collecte et d’accès, de transformation et d’expiration, pour tous, n’est que récente : elle a été privée (Google, Facebook, mais aussi les états, banques, etc.) et mise en silos. Le mouvement ‘open data’ vient seulement de commencer, permettant à toute entreprise, petite ou grande, pauvre ‘wannabee’ startup ou multinationale richissime, d’enfin avoir de quoi exploiter intelligemment leurs outils: études de marchés pertinentes et exploitées en temps réel, sur mesure, comme des CRM permettant non pas de faire une promo identique pour tous, mais pertinente à chacun. Rares, très rares sont les entreprises à comprendre le potentiel que les données, l’information, en fait pas si abondante que ça encore (mais les outils, si), peut leur apporter et comment: les décideurs, patrons nés au siècle dernier, ont un temps plus long que ces progrès technologiques… C’est d’ailleurs pourquoi les patrons de start-up qui réussissent étonnement sont si jeunes, nés avec cette vision centrée sur les données. Tesla vs Toyota, Microsoft vs IBM, Google vs Microsoft, Facebook vs Google, SpaceX vs Arianespace, Salesforce vs SAP, Amazon vs Walmart, Netflix vs Canal+… Nous entrons, doucement, dans une ère du ‘soft’ vs ‘hard’, ou l’organisation d’une entreprise doit être souple, vivante, ouverte, » agile », collaborative non pas qu’avec ses collègues mais tous, partenaires mais surtout clients, et faire des produits ‘non finis’ mais en constante évolution, comme les autos Tesla dont on met à jour le système régulièrement enrichi par l’apprentissage des autres conducteurs ! Même les fusées, auparavant jetables, deviennent recyclées et évolutives…
Collecter l’information pertinente (et pas des posts Facebook…) depuis les IoT, leur usage réel par leur usagers, les clients, et l’analyser, l’exploiter, modifier le produit à distance, de manière personnalisée, et avec l’ajout du client lui-même collaborant à son ‘produit version n+1’, tout cela n’arrivera qu’avec l’arrivée enfin de quelques maillons encore manquants, la 5G, le changement de génération des directions, des clients eux-mêmes d’ailleurs, des habitudes de consommer et de payer (à l’usage et non l’achat, par abonnement et pas cash, partagé et pas perso…). Ça arrive ça arrive, à pas de géant… Et dans la nouvelle génération… De pays, l’Asie, pas chez nous, la vieille Europe voire USA, sur laquelle vous semblez trop vous focaliser.