▪ Après plusieurs années à faire usage d' »outils de politique monétaire non-conventionnels », comme le président Bernanke les a décrits dans son discours à Jackson Hole, l’économie américaine continue à afficher une léthargie tout aussi non-conventionnelle.
Néanmoins, Ben le Fou considère que ses outils non-conventionnels — nous, nous les qualifions plutôt de « loufoques » — ont rendu l’économie plus forte qu’elle ne l’aurait été sinon.
En langage clair, les outils de politique monétaire non-conventionnels de Bernanke consistent à manipuler et/ou à « communiquer » son intention de le faire. [Parmi les autres outils, on compte les manipulations cachées de marché qui n’apparaissent pas dans les minutes des réunions du Federal Open Market Committee (FOMC) ni dans les transcriptions des discours de Jackson Hole].
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NE TOMBEZ PAS DANS LE PIEGE !
Malgré les mesures prises par Mario Draghi, malgré le « oui » de l’Allemagne au MES… l’avenir de la Zone euro est loin d’être assuré.
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« Aujourd’hui, forts de plusieurs années d’expérience de politiques non-conventionnelles à la fois aux Etats-Unis et dans d’autres économies développées », a expliqué le président de la Fed la semaine dernière à Jackson Hole, « nous connaissons mieux le fonctionnement de telles politiques. Il apparaît clairement, d’après cette expérience, que de telles politiques peuvent être efficaces et que, sans elles, la récession de 2007-2009 aurait été plus accentuée et que la reprise actuelle aurait été plus lente qu’elle ne l’est aujourd’hui »…
Même en prenant les dires de Bernanke pour paroles d’évangile, les résultats seraient pitoyables. Grosso modo, Bernanke a imprimé des dollars à hauteur d’environ 15% du PIB et, au final, a permis au PIB du pays de croître de 3%.
C’est ce qu’on appelle une « transaction ratée ».
▪ 17 500 $ par ménage américain
Voici une « simulation de modèle » intéressante : que serait-il arrivé à l’économie si Bernanke avait pris les 2 000 milliards de dollars qu’il a imprimés et les avait distribués à tous les ménages des Etats-Unis au lieu de les reverser aux banques de Wall Street ? Selon cette simulation, chaque ménage américain aurait reçu un chèque d’environ 17 507 $.
On peut imaginer qu’une manne de 17 500 $ par ménage aurait produit quelque chose de mieux qu’une hausse de 3% du PIB.
Mais ce n’est pas ce qui est arrivé. Au lieu de cela, le patron de la Fed a dilapidé tout cet argent à acheter des obligations en difficulté que les banques de Wall Street ne pouvaient vendre à personne d’autre — et il va continuer de le faire, comme il l’a annoncé hier.
Cet « outil de politique monétaire » n’est certes pas un caprice. Bernanke a expliqué que ses outils non traditionnels étaient tous « guidés par des principes généraux et par quelques études pertinentes ».
▪ Quatre preuves que ça ne marche pas
Toujours pas convaincu ? Etudions un peu l’économie « meilleure » que Ben Bernanke a produite et voyons à quoi elle ressemble…
1) En moyenne, l’ensemble des Américains en âge de travailler est plus pauvre aujourd’hui qu’en 2009, ce qui correspond à peu près au moment où Bernanke a commencé à sortir ses outils de politique monétaire non traditionnels. Le revenu moyen est en baisse dans chaque groupe d’âge de 25 à 64 ans. Malgré cela, Bernanke affirme que les Américains en âge de travailler sont plus riches qu’ils ne l’auraient été sans lui.
2) Le taux de chômage (officiel) du pays semble ne pas pouvoir passer en dessous de la barre des 8%. En outre, le nombre total d’Américains salariés aujourd’hui est inférieur à celui de la fin de l’année 2008, même si la population active américaine a continué de croître au cours de ce même laps de temps. Même Bernanke reconnaît que la croissance de l’emploi est « loin d’être satisfaisante ». Néanmoins, le président affirme que le taux de chômage aurait été encore pire sans l’aide de la Fed.
3) Dans le secteur industriel, l’indice ISM qui rend compte de l’activité manufacturière aux Etats-Unis s’effondre depuis 19 mois, et a réalisé une croissance nulle depuis quatre ans. Pour le président Bernanke, c’est là un meilleur résultat que cela aurait pu être.
4) La plupart des grandes entreprises américaines affichent une faible rentabilité… et ne prévoient guère de changement à cela. McDonald’s a récemment annoncé son pire chiffre d’affaires trimestriel depuis deux ans. Priceline, PepsiCo et Procter & Gamble ont tous trois enregistré des résultats tout aussi mauvais. « Certes, ce sont de mauvaises nouvelles », dirait probablement Bernanke, « mais soyez heureux de ne pas vivre ce qui aurait pu arriver ».
Peut-être. Mais qui peut dire ce qui est « mieux que » ?
▪ Bilan financier élevé, bilan réel nul
Comme le reconnaît le président lui-même, « alors qu’il existe des preuves substantielles que les rachats d’actifs par la Réserve fédérale ont abaissé les rendements long terme et ont détendu les conditions financières générales, obtenir une estimation précise des effets de ces opérations sur l’économie en général est difficile car il n’est pas possible d’observer comment l’économie se comporterait en l’absence de ces mesures ».
Autrement dit, les statistiques qui n’existent pas ne mentent pas. La seule chose que nous pouvons tenir pour certaine est que le bilan de la Fed est BEAUCOUP plus élevé qu’il aurait été sans cela… et l’économie est encore au point mort.
Le bilan de la Réserve fédérale a plus que triplé au cours des quatre dernières années. Et pourtant, au cours de cette même période, l’indice ISM manufacturier a connu une croissance nulle. Bizarrement, malgré l’hyperactivité de plusieurs milliers de milliards de dollars de la Fed et ses manipulations de marché, l’activité manufacturière américaine ne va pas mieux que l’activité manufacturière en Europe et en Chine. En fait, toutes trois se suivent de très près.
Ainsi, peut-être l’économie se porterait-elle simplement beaucoup mieux aujourd’hui si le président avait consacré ces quatre dernières années à jouer au golf, au lieu de manipuler ouvertement et secrètement les marchés financiers.
Peut-être le temps est-il simplement venu d’écrire un petit mot de remerciement au président :
Cher Ben,
Un grand merci pour ton aide. Mais tu peux te reposer maintenant. Vraiment, tout va bien.