▪ Le CAC 40 pourrait bien connaître une nouvelle année dans le rouge. Au moment où j’écris ces lignes, l’indice phare de la Bourse de Paris affiche un repli depuis le 1er janvier de 7,5%… Et les risques de contagion de la crise irlandaise ainsi que le futur chancelant de l’euro ne sont pas de nature à redonner un optimisme débridé aux marchés. J’aurais tendance à dire que, comme d’habitude, le CAC Mid&Small 190 (qui retrace l’évolution des valeurs moyennes) fait mieux que le CAC 40 : il gagne plus de 9% depuis le début de l’année.
D’après mon analyse des publications du troisième trimestre, la progression du chiffre d’affaires des sociétés composant le CMS 190 a été de 15% — après 14% au deuxième trimestre et 8% au premier trimestre. La croissance continue de profiter d’une base de comparaison favorable et il est clair que, de ce point de vue, le quatrième trimestre 2010 sera mécaniquement moins porteur. Il n’en reste pas moins que les grandes valeurs (hors banque, finance et assurance) ont vu leur chiffre d’affaires n’augmenter "que" de 12,5% au troisième trimestre.
▪ Après ce mois de novembre houleux sur fond de crise de la dette en Europe, je doute de voir le CAC 40 rebondir — comme au mois de septembre par exemple, où le rebond a été historique. Les investisseurs sur l’ensemble des places mondiales ont encore connu une année très compliquée entre bons résultats des entreprises et crispations macro-économiques. Donc la probabilité de connaître un rally de fin d’année me paraît bien faible (même si la crise irlandaise s’est "réglée" rapidement et que l’Europe fera certainement tout pour préserver son semblant de solidité).
Surtout, je voulais insister sur les différences de performances entre le DAX allemand et notre CAC 40. Pour moi, cela renforce l’idée du fossé économique qui est en train de se creuser entre les deux piliers de l’Europe. Depuis le 1er janvier, le DAX progresse de près de 16% — même si la méthode de calcul diffère entre les deux puisque le CAC 40 n’est pas calculé avec les dividendes réinvestis. Pour moi, cela révèle deux aspects de la mentalité des investisseurs :
– ils jouent clairement la croissance allemande fondée sur une industrie exportatrice forte ;
– ils craignent pour le secteur bancaire français qui détiendrait un stock de créances publiques irlandaises, grecques, portugaises et espagnoles d’un montant proche de 540 milliards d’euros ! Un chiffre qui a de quoi faire peur et qui fait des banques françaises un secteur très exposé.
Evidemment, les problèmes qui affectent aujourd’hui l’euro (le verrons-nous à une parité de 1,20 $ d’ici la fin de l’année ?) ne sont pas pour déplaire à nos voisins allemands qui craignaient de perdre en compétitivité alors que les autorités américaines ont choisi de faire marcher la planche à billets. Là encore, la micro-économie et la macro-économie s’affrontent, rendant très difficile l’appréciation par les investisseurs du sens dans lequel pourraient tourner les choses en 2011.
Ce qui est bon pour les entreprises européennes qui exportent l’est moins pour la demande intérieure européenne qui va se trouver affectée par les plans de rigueur qui fleurissent. Autant dire que 2011 s’annonce d’ores et déjà comme une année "sportive" entre guerre des monnaies, crise de la dette souveraine et revendications des pays émergents. Bien malin celui qui pourra nous dire dans quel sens iront les indices mondiaux l’an prochain.
▪ Donc devant autant de points d’interrogation, je vais être fidèle à ma stratégie : rester solidement positionné sur les sociétés de croissance qui sauront saisir les opportunités. Je suis pragmatique : ce sont elles qui auront les meilleures chances de tirer leur épingle du jeu et je reste raisonnablement optimiste pour ce segment de la cote. Encore une fois, les dirigeants de ces entreprises ont pris la mesure de la complexité croissante de l’environnement économique.
Et toutes les sociétés que je rencontre actuellement me disent avoir retrouvé leurs niveaux d’activité et de commandes d’avant crise. Je ne sais évidemment pas de quoi demain sera fait, mais il y a une chose dont je suis sûr c’est que l’exécution (la capacité pour un dirigeant de mettre en oeuvre sa stratégie) sera déterminante dans le choix des valeurs et les performances boursières.
Pour finir sur une note positive, je voudrais souligner que — malgré le fait que les sociétés ont, pour la plupart d’entre elles, effacer les stigmates de la crise — leur niveau de valorisation reste encore inférieur à celui de… 2006 !