▪ En mai dernier dans un article intitulé « Jean-Claude Trichet est-il devenu fou ? », nous expliquions pourquoi, à notre sens, le mouvement d’augmentation des taux d’intérêt initié à cette époque avait peu de chance de s’avérer durable.
La confirmation est arrivée le 3 novembre 2011 avec une baisse du taux directeur de la Banque centrale européenne, la BCE.
▪ Le piège des taux bas se referme
Le nouveau gouverneur de la BCE, l’Italien Mario Draghi, a décidé pour son baptême du feu médiatique et sa prise de fonction de baisser de 0,25 point le taux d’intérêt alors qu’il donnera sa première conférence de presse jeudi prochain (le 10 novembre).
Ce qu’il faut comprendre, et que nous avions largement anticipé, c’est que l’Europe (et de façon générale l’ensemble des pays dits développés) sont désormais tombés dans le « piège des taux bas ».
Le meilleur exemple pour illustrer ce phénomène du piège des taux bas est bien sûr le Japon qui, depuis plusieurs décennies maintenant, est dans l’impossibilité financière d’augmenter ses taux d’intérêt.
▪ Pourquoi je parle de « piège des taux bas » ?
Parce que, pour financer non pas le remboursement de la dette mais les simples intérêts de la dette, il est indispensable que les taux soient au maximum proches de zéro. La moindre augmentation met en péril les finances publiques de l’ensemble des nations.
La deuxième raison de l’impossibilité de l’augmentation des taux est qu’il n’y a tout simplement pas de croissance, ni de retour à la croissance. Là aussi le Japon illustre parfaitement cette situation d’absence de croissance sur le très long terme.
▪ Qui se réjouit de cette baisse des taux ?
Cette nouvelle est excellente pour l’or.
Cette nouvelle est excellente pour les banques qui vont pouvoir augmenter leurs marges en se refinançant moins cher auprès de la BCE et en prêtant plus cher à leurs clients (reconstitution des marges).
Cette nouvelle est excellente pour les entreprises. Car, en abaissant les taux cela peut permettre à l’euro de baisser légèrement par rapport au dollar, donnant ainsi un peu d’air à nos exportateurs.
Cette nouvelle est excellente pour les emprunteurs à taux variables.
Cette nouvelle est excellente pour limiter et accompagner les risques d’une nouvelle récession inéluctable (à laquelle s’attend la BCE) en Europe en raison des plans d’austérité massifs touchant la quasi-totalité des pays européens.
▪ Nous attendons désormais le « piège de la planche à billets »
Les Italiens ont surnommé Mario Draghi… Super Mario ! Notre nouveau gouverneur de la BCE n’a plus qu’à annoncer enfin un programme « non conventionnel d’assouplissements quantitatifs » pour enflammer les marchés financiers à la hausse.
Cette expression barbare signifie tout simplement que la BCE utiliserait la planche à billets en fonction des besoins (voyez mon article sur l’inévitable monétisation de la dette). Comme la Suisse. Comme les Etats-Unis. Comme le Royaume-Uni.
Le message adressé aujourd’hui par Mario Draghi est une inflexion importante. Nous avons désormais une certitude. Les taux ne peuvent plus monter. Nous attendons pour les prochains mois la mise en marche de la planche à billets. Si les attaques se poursuivent contre l’Italie, ce sera la seule solution envisageable.
Jusqu’à présent les Allemands refusent totalement cette solution. Si la situation s’aggrave, ils devront accepter le recours à la planche à billets, ou… sortir de l’euro. La sortie de l’Allemagne de l’euro est le scénario le moins envisagé et pourtant, à notre sens, c’est celui qui a le plus de chance de se produire. Les rumeurs commencent à gronder sur le sujet.
Ce serait sans doute la meilleure solution pour mettre fin au psychodrame européen.
Première parution dans le Billet du Trader du 07/11/2011.