▪ Ces derniers jours, le pétrole fait les gros titres des médias et, à la moindre baisse des indices de 0,5%, on vous explique que, bien entendu, c’est à cause de la hausse de l’or noir.
Cette affirmation répétée à longueur de journée a le don de m’agacer. La corrélation est strictement identique depuis de nombreux mois entre les indices et le pétrole. Mais ce sont sûrement les mêmes spécialistes qui nous annonçaient un pétrole à 10 $ en 2010…
Il y a deux ans, alors que tout le monde prédisait une poursuite de la chute du pétrole, j’étais très haussier sur l’or noir et, fin avril 2009, je parlais déjà du rebond du pétrole avec comme objectif 60 $ puis 90 $… A l’époque, le baril était autour des 52 $ !
Donc les marchés s’empressent de trouver dans la hausse du pétrole l’explication à la consolidation. Ils auraient vu donc une corrélation inverse. Voyons voir.
▪ Quel type de corrélation entre Brent et indice ?
Bizarrement, il y a six mois, lorsque le pétrole prenait 10%, personne n’évoquait ce type de corrélation. Or il suffit de regarder un graphique du pétrole et du S&P 500 sur ces six derniers mois (ou même sur ces dernières années) pour voir la très forte corrélation entre le baril et les indices à moyen terme. La corrélation aurait-elle subitement changé ?
Examinons ensemble les deux graphiques du S&P 500 et du Brent en données 2 jours (chaque chandelier représente ici deux journées de Bourse) avant d’analyser celle du Brent plus en détail.
Pour agrandir le graphique, cliquez dessus
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C’est pourtant limpide : la corrélation sur ces trois dernières années est évidente à moyen terme. Elle l’est également sur ces six derniers mois. Ainsi, chaque mouvement significatif sur le pétrole s’est fait de pair (et non à l’inverse) avec un mouvement dans le même sens sur les indices. Les commentateurs qui s’expriment sur ce sujet brûlant depuis quelques semaines feraient bien d’ouvrir les yeux…
Bien entendu, cela ne veut pas dire que l’ampleur des mouvements sur les deux classes d’actifs est similaire — et je suis bien sûr conscient qu’un pétrole à 70 $ ou 140 $ n’a pas les mêmes conséquences sur l’économie. On peut toutefois s’interroger sur l’incidence réelle sur la croissance. Est-ce que la croissance était trois fois plus forte en 2009 avec un pétrole à 40 $ ?
Enfin, autre élément intéressant, il existe parfois des décalages entre les plus hauts et les plus bas sur ces deux marchés, je vous l’accorde. Mais c’est parce que le pétrole a souvent un rôle précurseur, comme lors de son point bas fin 2008, et c’est pourquoi je suis très attentivement ces corrélations pour mes abonnés à Levier 7.
Concentrons-nous maintenant sur la configuration du pétrole lui-même avec ce graphique du Brent en données journalières :
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▪ Brent : une prime élevée par rapport au LCO
Tout d’abord, j’attire votre attention sur un point important : la forte augmentation depuis la fin de l’année dernière du spread (l’écart) entre le Brent, coté à Londres et le Light Crude Oil, coté à New York. Le spread a quasiment été de 20 $ en faveur du Brent, qui se payait donc plus cher en février — suite aux événements dans les pays arabes — avant de commencer à se réduire ces dernières semaines.
Les pays européens dépendent certes un peu plus des livraisons du Moyen-Orient, mais cette prime semble excessive et intenable à moyen terme. En outre, contrairement à une idée reçue, le LCO est de meilleure qualité que le Brent. A terme, l’écart devrait donc redevenir marginal — de l’ordre de 2 $ ou 3 $. Dès lors, une correction sur le pétrole pèserait probablement plus sur le Brent que sur le LCO.
Pour revenir maintenant à l’analyse technique du Brent, l’échec sous la résistance des 120 $, le 24 février, a laissé sur notre graphique un chandelier avec une longue « ombre haute » qui matérialise l’échec assez net sous cette résistance et la réaction des vendeurs. Les indicateurs mathématiques confirment cette idée, en particulier le RSI à 14 jours. Après avoir dépassé la zone des 69 pendant quelques jours, l’oscillateur est en effet repassé au-dessous de ce niveau, devenu résistance. C’est un signal de vente qui confirme les premiers signes de faiblesse sur les prix.
A court terme, nous sommes donc dans un rebond avant une correction significative sous ce niveau de résistance des 120 $. Vous pourrez donc vendre sur les rebonds et viser un retour sur les 97,50 $ au minimum.
Ce niveau de support sera déterminant pour déterminer ensuite la correction des indices. A moyen terme, la configuration est semblable à celle des indices et en particulier du S&P 500 et le pétrole nous donne donc de précieuses indications pour confirmer les mouvements sur les indices.
Ces corrélations entre le pétrole, comme les matières premières en général avec les indices nous donnent souvent de précieuses indications pour confirmer un scénario sur les actions.
[Sébastien Duhamel a travaillé pour des courtiers et des sociétés de gestion. Au cours de ces dernières années, il a exercé son métier auprès des plus grandes institutions financières (Goldman Sachs, J.P. Morgan, Barclays, Société Générale…). Depuis quelques années, il collabore avec les Publications Agora, où il est responsable du service Levier7]
Première parution dans le Billet du Trader du 16/03/2011.
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