On parle beaucoup de la reprise en flèche de l’économie – qui passe notamment par l’emploi. Les chiffres reflètent-ils la réalité de la situation, et que disent-ils de l’inflation ?
Parfois, de nouvelles données peuvent clarifier une situation incertaine, surtout sur les marchés financiers. Et parfois, elles ne font qu’ajouter à la confusion. C’est ce qui s’est passé par exemple aux Etats-Unis, lorsque les chiffres de l’emploi pour le mois de mai ont été publiés le 4 juin dernier.
Tous les analystes étaient scotchés à leur fil d’information, en attendant avec angoisse le dernier rapport. Et il a suscité de la perplexité.
Ce rapport indiquait que 559 000 emplois avaient été créés. Un chiffre certes élevé… mais en-dessous des attentes. Le marché anticipait 670 000 emplois, voire plus. Alors que la forte augmentation d’avril avait été légèrement révisée à la hausse, celle de mars avait déjà été révisée à la baisse – de 131 000 emplois – au cours des mois d’avril et de mai.
Globalement, les données des mois de mars, avril et mai font ressortir un ralentissement de la création de nouveaux emplois.
Le taux de chômage du mois de mai a baissé de 6,1% à 5,8%. Cela a tout l’air d’une bonne nouvelle jusqu’à ce que l’on remarque que le motif de cette baisse n’était pas une forte création d’emploi mais plutôt une baisse de la participation à la main-d’œuvre.
Les statistiques ont baissé de 61,7% à 61,6% : ce n’est pas une baisse conséquente, mais elle s’inscrit dans une baisse sur le long terme qui a ramené la participation à la main-d’œuvre à des niveaux jamais constatés depuis les années 1970.
Bref, la dimension globale de la main-d’œuvre s’est réduite.
Et ce n’est pas une bonne nouvelle…
Le verre à moitié vide
Vous pouvez être au chômage dans le sens traditionnel du terme sans être comptabilisé en tant que tel par le département du Travail US.
La différence a quelque chose à voir avec la recherche active ou non d’un emploi. Seuls ceux qui recherchent activement sont comptabilisés comme chômeurs. Le problème, c’est que les rangs de ceux qui ne cherchent pas sont en train de grossir.
Parmi la population en âge de travailler (25-54 ans), il y a toujours des individus qui ne recherchent pas un emploi car ils sont pères ou mères au foyer, étudiants, jeunes retraités ou au beau milieu d’une phase de transition, dans leur vie.
Pour autant, le pourcentage de travailleurs potentiels ayant quitté la main-d’œuvre est élevé, et c’est troublant.
Certaines personnes ont arrêté de chercher un emploi car elles sont sûres de n’en trouver aucun qui corresponde à leurs compétences ou centres d’intérêt. D’autres se contentent de percevoir les généreuses indemnités de chômage que le gouvernement distribue. Certaines vivent encore dans la peur du Covid et ne veulent pas retourner sur un lieu de travail.
Je ne juge pas, je précise simplement qu’un faible taux de chômage ne signifie pas grand-chose lorsqu’il est motivé par une faible participation à la main-d’œuvre.
Les Etats-Unis disposent d’une armée de 10 à 20 millions de travailleurs dans la fleur de l’âge qui n’ont pas de travail et n’en cherchent pas. Et tant que règne cette sous-utilisation de la main-d’œuvre, les chiffres officiels de l’emploi ne révèlent pas tout.
Alors les chiffres du mois de mai ont laissé indifférent.
Ils ne sont ni horribles, ni excellents. Ils soulignent une sous-utilisation de la main-d’œuvre et peut-être un ralentissement de la croissance. Ils ne signalent pas d’inflation ou quelque chose qui s’en rapproche.
Le discours sur l’inflation
Depuis l’été dernier, le discours sur l’inflation a été le principal moteur des taux d’intérêt.
Ce discours est simple : l’économie se relance. Le chômage baisse. Les employeurs n’arrivent pas à recruter assez de personnel. Les salaires augmentent pour attirer les candidats. Les dépenses de relance (« stimulus ») arrivent par milliers de milliards de dollars. La Fed imprime de l’argent. L’économie se heurte à des contraintes de capacité.
Si l’on réunit tous ces éléments, l’inflation est imminente. Donc, les taux d’intérêt doivent grimper. Et lorsque les taux grimpent, le cours de l’or baisse.
Les marchés ont épousé ce discours.
Le rendement à maturité du bon du Trésor américain à 10 ans a grimpé de 0,508% le 4 août 2020 (à peu près à la période où l’or a enregistré un pic) à 1,745% le 31 mars 2021. Les cours de l’or sont passés de plus de 2 021 $ à 1 686 $ l’once sur la même période. Cela représente une chute de 16,5%.
Et si tout ce discours économique était entièrement faux ?