La Chronique Agora

Un futur… possible

Nous sommes entrés dans un engrange fatal – les autorités auront-elles ce qu’il faut pour nous en sortir ?

Le confinement est en vigueur dans la vallée de Calchaqui depuis vendredi minuit. Nous étions déjà assigné à résidence… désormais, c’est le cas de tout le monde.

Les gens doivent rentrer chez eux et y rester pendant deux semaines.

Une réunion de crise s’est tenue sur notre véranda. « Qu’allons-nous faire ? » a demandé notre capataz (intendant).

« Vous ne pouvez pas arrêter le travail », a souligné un voisin, venu à cheval voir si nous avions besoin de quelque chose. « Il faut nourrir le bétail. Nous sommes des fermiers, nous devons travailler quoi que dise le gouvernement. »

« Je sais », a continué le capataz. « Les vignes sont prêtes à être vendangées. Si on ne cueille pas le raisin d’ici la fin de la semaine, c’est toute la production annuelle qui pourrait se perdre.

« Mais la route menant au ranch est si mauvaise que le camion ne peut pas venir pour les vendanges. J’ai appelé les autorités locales ; elles ont dit qu’elles ne pouvaient rien faire parce que tout le monde est censé rester à la maison.

« Quant aux vendangeurs, ils viennent d’un autre village, ils ne sont pas censés venir au ranch.

« Et si vous vous faites attraper sur la route, ils vous mettent en prison. Enfin, c’est ce qu’on raconte. »

Crise économique

Des raisins qui restent sur la vigne. Du vin qui n’est pas fait. Des bouteilles qui ne sont pas expédiées… ni stockées en magasin… ni achetées par les consommateurs. Même pour notre minuscule opération, cela représente toute une année de travail – perdue.

Les revenus des ventes sont utilisés pour payer les salaires… acheter du carburant… et maintenir l’entreprise en vie. Aujourd’hui, elle pourrait disparaître. Multipliez ça par plusieurs millions ou milliards, et vous avez la crise économique actuelle.

Partout dans le monde, les fourneaux des restaurants sont froids. Les usines sont aussi calmes que des églises (les grands constructeurs automobiles américains ont annoncé la semaine dernière qu’ils arrêtaient leurs chaînes de production).

Les salaires ne sont ni gagnés… ni dépensés. Selon Bank of America, la récession a déjà commencé. Tout à coup, l’économie qui dépendait de « plus » se retrouve avec beaucoup « moins ».

Les taxes ne sont pas payées sur des profits non enregistrés grâce à des ventes de biens jamais produits par des travailleurs qui ne travaillent pas, des camionneurs qui ne conduisent pas et des acheteurs qui n’achètent pas. Et nous n’en sommes qu’au début.

Ce qui nous attend

Alors voici un résumé… notre supposition quant à ce qui nous attend :

Le monde où on gagne et on dépense est en train de s’éteindre. Sans revenus, les entreprises, les ménages et les gouvernements seront tous dans l’incapacité de payer leurs factures.

Les actions vont grimper (un « rebond de chat mort », comme l’appellent les vétérans) suite aux annonces de renflouage, avant de reperdre 50% de leur valeur.

Les entreprises feront défaut sur leur dette de 16 000 Mds$. Des millions de gens perdront leur emploi. Selon le secrétaire au Trésor US, Steven Mnuchin, plus de 20% de la main d’œuvre américaine pourrait se retrouver au chômage.

Les autorités imprimeront de la monnaie par milliers de milliards pour réparer les dégâts. Les dépenses grimperont. Mais la baisse de production… et l’augmentation de la devise en circulation… feront grimper les prix.

A l’été, le virus ralentira. L’économie commencera à se remettre. Mais partout dans le monde, les gens commenceront à se méfier du dollar et autres devises fiduciaires. Les prix grimperont à mesure que la croissance réelle est étouffée par les craintes d’inflation.

Il est très probable que le virus revienne à l’automne, même s’il n’y a aucun moyen de connaître sa gravité à ce moment-là. A un moment ou à un autre, de toute façon, il n’y aura plus assez de cash pour compenser le mépris croissant qu’on accordera aux espèces.

Les distributeurs de billets seront vides. L’économie – encore fragile, avec des taux d’intérêts inférieurs à l’inflation – aura besoin de nouveaux renflouages et d’encore plus d’argent par hélicoptère pour continuer à tourner.

Les autorités seront alors confrontées à un choix terrible. Imprimer plus d’argent pourrait entraîner l’hyperinflation, comme pour l’Allemagne de Weimar, le Zimbabwe ou le Venezuela.

Ne pas imprimer, ce serait risquer une profonde dépression… un choc en mode « mettons tous ces clowns à la porte » aux prochaines élections… voire une révolution.

Quel Paul Volcker se lèvera et mettra fin à l’impression monétaire ? Quel Ronald Reagan le soutiendra ?

Les autorités feront leur choix… le choix fait par Von Havenstein en Allemagne et Gono au Zimbabwe. Elles imprimeront. Les actions grimperont en flèche à mesure que les investisseurs, appliquant la rotation sectorielle, abandonnent les obligations. Le marché obligataire s’effondrera. Les dettes seront effacées par l’inflation – idem pour les crédits basés sur la dette.

Des scènes de dépravation financière, de débauche économique et des orgies de dégradation sociale, de violence et de chaos – inimaginables pour l’instant – seront visibles sur tous nos écrans.

Bien sûr ce n’est là qu’un futur possible.

Le futur, le vrai ? Il va falloir attendre pour le voir.

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