Par Simone Wapler (*)
Une idée reçue veut que le placement en actions soit toujours gagnant à long terme. C’est faux. La seule bonne stratégie consiste à entrer et à sortir aux bons moments et sur les bons secteurs. En fait, les financiers, les gestionnaires et les opérateurs de marché ont intérêt à ce qu’il y ait en permanence le plus de transactions possible.
Mais, à regarder les chiffres sur le long terme, cette idée de gain garanti est erronée. D’abord parce qu’il est impossible pour un particulier de répliquer la performance de l’indice qui sert de référence, ensuite à cause de la fiscalité.
Vendez à temps les mauvaises valeurs
En général, les partisans de la théorie "toujours gagnant à long terme" vous présentent l’évolution dans le temps d’un indice actions bien connu, par exemple le CAC 40. Notons au passage que celui-ci n’existe que depuis 1988, ce qui représente seulement 20 ans de recul.
Ils estiment également que n’importe qui est capable de suivre cet indice. C’est possible aujourd’hui grâce aux fonds indiciels cotés en continu : les trackers. Mais ce n’était pas vrai avant leur création, il n’y a qu’une dizaine d’années. Auparavant, répliquer un indice nécessitait pour l’investisseur d’avoir toutes les actions qui composent l’indice, correctement pondérées en fonction de leur capitalisation.
Préférez les trackers
Un travail de titan… ou de fourmi. Pour être gagnant, il fallait systématiquement sortir de son portefeuille les mauvaises valeurs, celles qui avaient quitté l’indice — que celui qui ne s’est jamais trouvé scotché avec une mauvaise valeur lève la main ! Le suivi servile de l’indice est donc purement théorique et il faut savoir que 90% des gérants font moins bien que leur indice de référence. Dans ces conditions, donnez la préférence aux fonds indiciels.
Relativisez les courbes historiques
Seconde hypothèse fausse, les tenants de la théorie "toujours gagnant à long terme" supposent que vous réinvestissiez tous les dividendes. Ils ignorent l’impôt. Pour pouvoir réinjecter la totalité des dividendes, vous devriez en réalité remettre au pot.
Sortez dès que vous savez que vous aurez besoin de votre argent
Enfin, la vie d’un investisseur dure de 30 à 40 ans. La plupart des gens commencent par acquérir de l’immobilier, avant de se constituer un portefeuille. Ensuite, lorsqu’ils se sont retirés de la vie active, ils soldent le plus gros de leur portefeuille afin d’avoir un revenu fixe.
Pensez à l’inflation
Enfin, n’oubliez pas que, depuis la fin des accords de Bretton Woods, nous vivons dans un monde de monnaies purement fiduciaires. Au cours de la formidable poussée du CAC 40 à partir du milieu des années 70, il y a, bien sûr, la valorisation de nos fleurons nationaux, dont certains sont des champions mondiaux dans leur spécialité.
Mais il y a aussi la fourberie de l’inflation. En 1988, la capitalisation pondérée de l’ensemble des valeurs du CAC 40 était rapportée à l’indice 1 000. Mais on comprend bien que, s’il y a de l’inflation, cette base de capitalisation doit être pondérée de cette dernière. Il faut donc réviser l’indice en fonction de celle-ci.
Que vaut une base de 108 de 1854 aujourd’hui ? L’inflation est restée relativement stable — en raison du franc-or — jusqu’en 1911. Puis sont venues deux guerres mondiales, le passage au nouveau franc, les dévaluations en série, les chocs pétroliers et, enfin, l’euro. Faute de référence fiable, mieux vaut se baser sur l’or pour estimer l’inflation.
Sortez quand la conjoncture devient trop mauvaise
Une once d’or valait 25 $ en 1853, elle en vaut 900 aujourd’hui. La base 100 de 1853 représenterait de nos jours 4 000. Certes, le raisonnement est imparfait, mais il l’est beaucoup moins que le langage convenu du style "rentrez pour le long terme, vous serez gagnant". Pour investir de façon fructueuse en Bourse, il faut s’efforcer de prendre une partie des périodes de hausse et de sortir durant les périodes de baisse.
[NDLR : Plus facile à dire qu’à faire ? Pas vraiment… il suffit de profiter des bons conseils !]
Meilleures salutations,
Simone Wapler
Pour la Chronique Agora
(*) Simone Wapler est analyste, journaliste et ingénieur de formation. Elle a déjà contribué à des publications telles que Le Point, Enjeux, Les Echos, Chart’s… Spécialisée dans les valeurs industrielles, les matières premières, les énergies, l’or, les minières Simone Wapler est passionnée par et les investissements "tangibles".
Elle analyse chaque mois le secteur aurifère dans la lettre d’investissement Vos Finances – La Lettre du Patrimoine et elle intervient régulièrement dans l’Edito Matières Premières & Devises ou dans différents rapports d’investissements.
Elle est aussi la rédactrice en chef du magazine MoneyWeek.