Si l’argent se détourne des marchés financiers pour se réfugier dans les cryptomonnaies et que les bourses baissent, les autorités interviendront.
D’après le marché actions, les entreprises du CAC 40 en France valent 13% de plus aujourd’hui que début 2017 (voir graphique de Bloomberg ci-dessous).
En général, comme le dit le proverbe de Wall Street, « les marchés font les opinions ». Aujourd’hui, les marchés disent : « tout va bien en France ».
Les prix des actions grimpent, l’économie avance, le pays fait des progrès.
Maintenant, l’envolée des cryptomonnaies donne à tout le monde l’opportunité de devenir millionnaire…
Lorsque le marché grimpe, mois après mois, sans surprise, les gens commencent à anticiper une hausse permanente. Les investisseurs prennent plus de risques.
Les entreprises émettent plus d’actions ou s’endettent davantage.
De temps à autre, un marché sain doit surprendre. Les marchés ne servent pas simplement à donner les prix, mais à découvrir les prix. Lorsque les marchés sont sur une tendance linéaire, ils ne découvrent rien. Ils ne donnent pas d’information…
Lorsqu’un marché progresse de mois en mois depuis des années, il surprendra sans doute à la baisse.
Avec les injections monétaires de la BCE, les prix n’ont pas beaucoup de sens…
Lorsque la quantité d’argent disponible augmente, sans changement dans la quantité ou la qualité de biens dans l’économie, alors les prix devraient grimper… Plus d’argent circule, les biens et les services coûtent plus d’argent à acheter…
Dans l’économie d’aujourd’hui, la liquidité grimpe de mois en mois – la BCE injecte toujours des fonds, au rythme actuellement de 30 Mds€ par mois –, mais les prix à la consommation ne bougent pas… ou, en tout cas, ils bougent très peu.
Le taux d’inflation en France reste en-dessous des 1,5%, d’après le rapport 2017 de l’Insee :
L’argent doit aller quelque part.
Il ne va presque pas dans les biens essentiels, comme le pain ou le pétrole… et il ne va pas dans la consommation de tous les jours. Les actifs financiers, en revanche, grimpent d’année en année. L’immobilier – surtout dans le secteur du luxe – augmente.
A Paris, les prix atteignent des records en 2017, d’après l’indice du site immobilier MeilleursAgents.com :
John Maynard Keynes parlait de la façon dont l’inflation appauvrissait le « commun des gens » en écrivant :
« Grâce à une inflation incessante, les gouvernements peuvent à l’insu de tous confisquer secrètement une part importante de la richesse de leurs citoyens. Par cette méthode, ils ne font pas que confisquer : ils confisquent arbitrairement, et, alors que ce processus en appauvrit beaucoup, il en enrichit certains. Le spectacle que présente cette redistribution arbitraire n’entame pas seulement le sentiment de sécurité de la population, mais sa confiance dans le caractère équitable de la répartition actuelle de la richesse. Ceux à qui le système profite de manière exceptionnelle, au-delà de leurs mérites, et même au-delà de leurs espérances ou de leurs désirs, deviennent des ‘profiteurs’, haïs par la bourgeoisie que les politiques inflationnistes ont appauvrie autant que le prolétariat. »
Les conséquences économiques de la paix
La plupart des gens n’ont presque aucun moyen de détecter l’inflation du XXIème siècle… car ils ne font pas très attention aux prix des actifs financiers ; ils ne voient pas changer de beaucoup les prix des biens de première nécessité… et ils ne voient pas non plus les salaires baisser.
Comme toujours, l’inflation enrichit une minorité aux dépens de la majorité. L’inflation du XXIème siècle enrichit les initiés de la finance, des start-ups et des banques. Ceux-là bénéficient de la hausse des prix de leurs actifs, et de la facilité d’accès aux liquidités émise par la banque centrale.
La richesse de La Défense ou de Wall Street semble venir de nulle part, comme la hausse des prix de l’immobilier, mais la finance bénéficie des injections de capitaux venant de la BCE.
Et l’économie non financière ?
Les économies grandissent et évoluent grâce aux améliorations – aux progrès – dans l’organisation des ressources, de la production, et grâce à la technologie.
La recherche de profit incite les gens à interagir… à échanger… à innover… et à tester.
Mais comme un virus infecte un corps, certains acteurs peuvent trouver le moyen de détourner la richesse des autres et obtenir les fruits du travail, de l’innovation, et de l’effort, sans en fournir eux-mêmes…
Au XXIème siècle, la monnaie et le crédit sont des outils de choix pour détourner la richesse. En obtenant les fonds de la BCE, et en le dépensant avant les autres, une élite peut obtenir de plus en plus de parts de la richesse d’une société, aux dépens du reste.
Les « parasites » ne font pas partie de l’économie… tout comme le virus ne fait pas partie de l’organisme.
Ils ne peuvent pas « changer de cap ». Ils ne peuvent pas rejoindre l’économie de production. En cas de problème sur les marchés financiers, ils devraient répondre avec plus de liquidités et plus de plans de sauvetage.
Mais l’ascension des cryptomonnaies pourrait mettre en danger ce système. En effet, l’argent réfugié dans le bitcoin pesait 230 Mds$ au 31 décembre 2017 contre seulement 160 Mds$ au 30 novembre. +70 Mds$ en un mois donc, soit plus que les 30 Mds€ émis par la BCE. Cet argent vient bien de quelque part. Pour investir dans les cryptomonnaies, il faut vendre des actions ou des obligations ou renoncer à investir dans l’immobilier.
Si les actifs financiers commençaient à baisser mais que les cryptomonnaies attiraient trop de capitaux, alors les autorités essaieraient d’enrayer la fuite par tous les moyens.