** Un de nos lecteurs, C.F., a écrit à Bill Bonner pour nous poser quelques questions… entamons donc le dialogue !
** C.F. "1) – Je suis un lecteur assidu de vos articles, lesquels constituent une source importante d’information lucide et indépendante, relativement rare au milieu du déluge de mensonges et de manipulations de la réalité qu’on s’acharne à nous servir dans tous les moyens de communication".
– A cela, ma foi, je ne peux répondre qu’un très grand merci de la part de toute l’équipe !
** C.F."2) – Vos réflexions conduisent presque obligatoirement à la toile de fonds de votre pensée, qui est celle de l’absurde des mesures annoncées ou mises en oeuvre par les gouvernements mondiaux (surtout les Etats-Unis et l’Europe) pour résoudre ‘la crise’. Vous sous-entendez même que ‘la crise’ se résoudra beaucoup mieux d’elle-même sans intervention des Etats qu’avec cet endettement massif des trésors publics et les déficits astronomiques provoqués par l’hystérie interventionniste. Je ne peux être plus d’accord avec vous".
– Le terme d’"hystérie interventionniste" me fait penser à un article que j’avais lu sur des trappeurs victimes d’un ours dans les forêts canadiennes. L’un des trappeurs, victime d’une panique incontrôlable, s’était enfui en hurlant. L’autre s’était jeté à terre et avait fait le mort. "Que croyez-vous qu’il arriva ?" comme dirait Voltaire… L’ours se précipita sur le premier trappeur, qu’il mutila gravement. L’autre s’en sortit avec une belle frayeur et quelques coups de griffe, l’ours ayant tout de même voulu satisfaire sa curiosité (et si vous êtes comme moi, vous vous demandez à cet instant pourquoi le second trappeur n’a pas crié au premier trappeur de l’imiter… mais on s’éloigne du sujet).
– Quelle métaphore parfaite, cher lecteur ! Je n’ai même pas besoin d’en changer le thème : c’est bel et bien un ours qui dévore actuellement les marchés ainsi que l’économie tout entière — et les autorités ont choisi d’imiter le premier trappeur. Elles détalent dans les bois en poussant des hurlements et en agitant les bras. Gageons que l’ours ne tardera pas à enfoncer ses crocs un peu plus profondément dans leur chair.
** C.F. "3) – En plus, notre perplexité s’accroît encore quand nous constatons que les dettes en question ne pourront en toute logique être remboursées avant deux ou trois générations, et même cella à condition que la croissance économique reprenne, avec les conséquences imprévisibles sur l’environnement et la demande d’énergie".
** C.F. "4) – Cependant, une pensée s’impose, et c’est à ce sujet que j’aimerais avoir votre opinion : et si la dette n’était pas destinée à être remboursée ? Et si un nouveau coup était déjà préparé, comme la dévalorisation brutale du dollar, la création d’une autre monnaie, ou un coup encore plus sordide ? La question de l’or peut être ici de la plus grande importance. Si les monnaies s’effondrent par manque de soutien économique et si l’on revient à l’étalon-or, par exemple, qui possède assez de réserves pour émettre un nouveau papier et contrôler l’économie mondiale ? D’ailleurs, il y aura-t-il dans l’avenir une économie mondiale ou on reviendra aux mesures de protection ?"
– A cela, nous ne pouvons que répondre avec les mêmes arguments que ceux que nous vous faisons subir à longueur de Chronique. La dette n’est PAS destinée à être remboursée. Le "coup en douce" est DEJA en train d’être mis en place — la dévalorisation du dollar, l’émission de devises, l’inflation galopante qui ne manquera pas de refaire surface tôt ou tard, le report de la dette aux prochaines générations. Bill Bonner le disait dans MoneyWeek il y a quelques jours :
– "[L’état de l’économie mondiale] empeste. Bernanke et Obama offrent des solutions. Mais leurs plans pour sauver la planète de la correction ne sont guère que des escroqueries. Ils proposent de renflouer les erreurs d’une génération avec des milliers de milliards de dollars de dettes imposées à la génération suivante".
– Bernanke & Co. veulent manipuler les événements et asservir les lois de l’économie à leurs desseins. Mais M. le Marché et Mme l’Economie ne se laissent pas faire aussi facilement ; comme Dame Nature, ils ont une fâcheuse propension à se retourner soudain contre vous… au moment où l’on s’y attend le moins… et d’une manière qu’on n’avait absolument pas imaginée.
** C.F. "5) – Pour finir, on revient obligatoirement à une autre question : la crise est-elle orchestrée quelque part, pour que quelqu’un en tire bénéfice, ou bien tout le monde est devenu fou ? A qui le crime profite-t-il ? Va-t-on progressivement vers des états de plus en plus totalitaires manipulés par quelques hallucinés assoiffés de puissance ? Une chose est certaine : le chômage et la pauvreté conduisent inévitablement à la violence sociale et aux conflits ethniques et raciaux. A l’heure de l’insécurité les gens demanderont une main forte : on leur servira une poignée de fer et des sacrifices de sang".
– Pour ce qui est de ce dernier point, je ne saurais répondre. Nous sommes certes friands de théorie du complot, à la Chronique… mais l’économie mondiale me semble être une machine trop gigantesque et complexe pour être "télécommandée" de la sorte. En revanche, que de multiples parasites se soient greffés sur le système sain, rongeant, corrodant et corrompant ses mécanismes — jusqu’à provoquer sinon sa mort, du moins une grave maladie… voilà qui me semble parfaitement possible.
Chômage et pauvreté — mais aussi des mutations profondes au niveau géopolitique, comme l’expliquait Jean-Claude Périvier dans le dernier numéro de Défis & Profits : "en réalité, nous sommes passés d’un monde bipolaire à un monde multipolaire en moins de 20 ans. Les motifs d’inquiétude sont plus nombreux que jamais, d’autant qu’ils surviennent avec un affaiblissement relatif des Etats-Unis".
Tout cela alimente les tensions — qui se traduisent pour l’instant en termes plus économiques que géopolitiques… La question, désormais, est de savoir si la leçon infligée par la crise actuelle va porter ses fruits… ou s’il faudra en arriver au châtiment corporel pour que tout le monde en revienne à plus de raison.
Meilleures salutations,
Françoise Garteiser
La Chronique Agora