▪ Vendredi, nous avons entamé notre discours, d’une grande élévation morale, à l’attention de la Promotion 2015. Nous avons expliqué que les jeunes diplômés de l’année était non seulement les étudiants universitaires les plus lourdement endettés de l’histoire, mais également ceux qui présentaient le moins de probabilités de rembourser leurs dettes. Aux Etats-Unis, les revenus baissent depuis qu’ils ont cinq ans environ. Il en va de même pour la croissance du PIB. Aujourd’hui, nous continuons le discours que personne ne veut nous entendre prononcer.
Félicitations, Promotion 2015.
Vous êtes les héritiers de sottises, d’absurdités, de théories insensées et de milliers de milliards de dollars de dettes.
Les systèmes, les programmes et les institutions que vos parents ont mis en place sont pour la majorité des escroqueries sans valeur ; pire, ils produisent aussi le plus souvent des situations contraires au but affiché. Les programmes d’aide sociale n’aident pas les gens à échapper à la pauvreté : ils la garantissent. Les programmes médicaux n’assurent pas une bonne santé ; ils rendent dépendants au secteur pharmaceutique. Les dépenses militaires ne nous mettent pas plus en sécurité ; elles financent des drones, des interventions maladroites et des assassinats, et transforment des étrangers en ennemis. Nous terminons non seulement plus pauvres, mais moins en sécurité. Toutes ces affirmations prennent trop longtemps à expliquer et prouver, mais voici un petit exemple que vous apprécierez certainement.
▪ Vive la pauvreté !
Le gouvernement américain a mis en place un programme de prêts étudiants ; en principe, il s’agissait de vous aider à parfaire votre éducation et ainsi gagner plus d’argent. Avec ces revenus plus élevés, vous pourriez rembourser votre prêt. Sauf que ce programme a déjà le taux de défaut de paiement le plus élevé de l’histoire. Et ce n’est probablement qu’un début, le total de la dette étudiante en cours étant censée grimper jusqu’à 3 300 milliards de dollars d’ici 2025.
Que faire si vous ne pouvez pas payer ? Eh bien, les autorités ont la solution. Le problème, c’est qu’elle vous contraint à vous transformer précisément en ce que le programme était censé éviter.
le programme vous encourage à vivre dans la pauvreté pendant un quart de siècle afin de vous débarrasser de votre prêt étudiant |
Voilà comment ça fonctionne. Tant que vos revenus sont très bas, on vous permet de faire de petits versements « pour la forme » tous les mois. Assurez 300 paiements de la sorte et votre dette est considérée comme épongée, peu importe si vous n’en avez payé qu’une fraction. En d’autres termes, le programme vous encourage à vivre dans la pauvreté pendant un quart de siècle afin de vous débarrasser de votre prêt étudiant.
Ce sera sans doute facile quoiqu’il arrive. D’abord parce que vous n’avez pas appris grand’chose à l’université qui vous rende utile à un employeur. Ensuite parce que vos parents ont truqué l’économie à tel point qu’il sera de toute façon très difficile de progresser financièrement. Les revenus des ménages baissent depuis 15 ans — c’est-à-dire depuis le début du siècle. Les salaires horaires réels, pour les hommes, sont en quasi-stagnation depuis 40 ans.
▪ Ni travail ni entreprenariat
Les bons emplois sont difficiles à trouver. Aux Etats-Unis, notamment, il y a moins de postes permettant de « faire bouillir la marmite » qu’il n’y en avait en 1999. Et vous pouvez faire une croix sur l’idée de vous lancer par vous-même. Le rythme de lancement de nouvelles entreprises s’effondre. C’est grâce à vos parents, là aussi. Le système entier est destiné à les protéger eux, leur Sécurité sociale, leurs soins de santé, leurs actions boursières et leurs entreprises.
Les protéger contre quoi ? Contre vous. Vous êtes l’avenir. Vous êtes la concurrence. Vous êtes ceux qui devraient vouloir faire bouger les choses et abattre les murs de la bureaucratie, des taxes, de la paperasserie et des réglementations qui vous empêchent de lancer des entreprises, obtenir de bons emplois et construire un vrai patrimoine. Vous devriez parler de révolution… renverser les milliers de milliards de dettes de vos parents et vous désengager de leurs guerres contre la pauvreté, l’illettrisme, les Irakiens, les Afghans… et ainsi de suite. Vous devez mettre fin à ces programmes stupides, inutiles et coûteux de manière à obtenir des ressources pour payer vos propres programmes et lancer vos propres guerres idiotes.
Vous devez couper les vivres aux zombies de vos parents — les millions et millions de personnes improductives qui reçoivent de l’argent du gouvernement — de manière à pouvoir vous permettre une famille… vos propres projets préférés… et quelques zombies bien à vous.
Vous devez aussi mettre fin au système monétaire suicidaire de vos parents, basé sur le crédit |
Vous devez aussi mettre fin au système monétaire suicidaire de vos parents, basé sur le crédit. Vous n’êtes pas au courant, n’est-ce pas ? Vos professeurs de politique, d’économie et de finance n’en ont pas parlé, j’imagine… Eh bien, le système est corrompu et auto-destructeur. Il ne fonctionne qu’en augmentant la quantité de dette dans la société, y compris votre propre dette étudiante. Et ça ne marche que jusqu’à ce que la bulle de dette devienne si grosse qu’elle explose.
▪ Leurs engagements, votre argent
Mais il y a une logique à ça… une logique sinistre qui vous transforme en pigeons pour les générations suivantes. Dépenser à crédit favorise les propriétaires actuels de capitaux… et les gens qui ont des droits sur l’argent du gouvernement. Je m’explique. Lorsque le gouvernement emprunte de l’argent, soit il le donne à un zombie pour que ce dernier le dépense, soit il le dépense directement. Généralement, l’argent va à une personne plus âgée — vos parents ou grands-parents — sous une forme ou une autre d’allocations, de retraite, d’emploi, de contrat ou de programme de soutien. Lorsque cet argent est dépensé, il va dans les coffres des entreprises. Cela augmente les profits… et les cours. Qui possède ces entreprises ? Vous ? Non ? Qui, alors ?
Vos parents et grands-parents en profitent à nouveau. Ce sont les propriétaires des actifs du pays. En augmentant le crédit, ils transfèrent la richesse réelle de l’avenir vers le présent… et de vous à eux.
C’est l’argent que vous n’avez pas encore gagné.
Je vous explique ça en détail : le gouvernement emprunte un dollar. Il donne ce dollar à l’un de ses zombies favoris — un chercheur, un drogué ou quelqu’un qui fabrique des bombes. L’argent va, d’une manière ou d’une autre, à une entreprise — qui le comptabilise comme une vente. Si elle a une marge de 10%, 10 cents sont enregistrés comme profit. Et si le titre cette entreprise s’échange à un PER de 20 sur les marchés, le prix grimpe de deux dollars. Par conséquent, la personne — qui pourrait être votre parent — détenant la valeur est deux dollars plus riche.
Sauf que le gouvernement doit désormais un dollar supplémentaire. Qui va le payer ? Vous. Vos parents et vos grands-parents prennent leur retraite… touchent leur pension et des soins de santé. Ils pensent qu’ils pourront aussi vendre leurs actions… et leur maison… et avoir encore plus d’argent à dépenser.
A présent, tout dépend de vous. Vous devez avoir un emploi pour pouvoir payer leur Sécurité sociale. Vous devez payer vos impôts pour qu’ils puissent continuer à mener leurs guerres. Vous devez aussi acheter une maison afin qu’ils puissent déménager en Floride pour leur retraite.
Vous devez voter pour leurs candidats… travailler pour leurs entreprises… et payer leurs factures.
▪ Les conditions ont changé
Nous étions plus libres… et plus riches… que vous le serez… |
Voilà l’épreuve à laquelle vous êtes confrontés. Vous arrivez dans l’économie au bout d’une expansion du crédit qui a duré 60 ans. La dette a connu un boom. L’économie aussi. Nous — vos parents — avons profité d’une expansion économique qui a commencé lorsque nous sommes nés et s’est poursuivie, avec de courtes interruptions seulement, jusqu’à ce que nous prenions notre retraite. Nous sommes sortis de l’école avec peu ou pas de dette étudiante. Nous pouvions lancer des entreprises relativement facilement. Nous pouvions emprunter pour financer nos entreprises et nos vies. Nous pouvions embaucher, débaucher, changer de travail… acheter et vendre des maisons… déménager d’un endroit à l’autre… Nous étions plus libres… et plus riches… que vous le serez…
… à moins de pouvoir effacer l’ardoise de nos dettes, nos guerres idiotes, nos programmes benêts et nos tentatives de retarder l’avenir et de vous empêcher de vivre vos propres vies riches, pleines et libres.
Si vous ne relevez pas ce défi, vous hériterez de nos factures, nos réglementations, nos restrictions, nos obligations, nos illusions, nos préjugés et nos vanités. Vous hériterez aussi d’une crise financière — pire que la crise de 2008-2009 — et d’une longue et lente période de maussaderie économique. L’expansion de dette des 60 dernières années se transformera en une morne contraction de la dette, entraînant peut-être l’économie dans une nouvelle Grande dépression.
Soit vous trouvez un moyen de vous débarrasser de la dette de vos parents… de faire défaut… ou de l’effacer par l’inflation, soit vous vacillerez sous son poids pendant encore de nombreuses années.
Soit vous vous libérez des âneries que vos parents ont commises à votre encontre… soit vous méritez ce qui vous arrive.
Félicitations, les pigeons.
2 commentaires
Les arguments sont connus, seule la conclusion pose problème. Nous savons, grâce à la Chronique Agora que 80% des actifs sont détenus par les 1% les plus riches de la population. Ce ne sont donc pas les parents des étudiants endettés qui profitent des bénéfices engendrés par l’endettement public, mais ces 1%. La conclusion qui s’impose sans surprise pour vos lecteurs, est que les pauvres, sans pouvoir et sans dents, deviennent plus pauvres et les riches, détenteurs du pouvoir et à la mâchoire solide, plus riches.
On peut parler de l’économie toute la journée, mais il y a aussi d’autres soucis pour cette jeune génération qui se lance dans le monde professionnel. J’ai peur que la plupart des jeunes n’aient pas des connaissances nécessaires des finances pour faire des bons choix. Moi, je n’avais jamais eu du travail jusqu’à l’âge de 24, et je sais que je ne suis pas la seule sans expérience. Pour éviter la dette et la faillite, il faut enseigner à nos jeunes, les adolescents, la responsabilité financière.