La loi PACTE a été définitivement adoptée par le Parlement le 11 avril et prévoit deux aménagements intéressants pour les contrats d’assurance-vie.
En novembre 2016, Emmanuel Macron publiait Révolution : C’est notre combat pour la France. Un an plus tard, la loi de Finances pour 2018 accouchait en particulier d’un impôt proportionnel, ou flat tax, pour le moins biscornu, qui complique en fait plus qu’il ne simplifie la fiscalité de certains placements, en particulier l’assurance-vie.
Lorsque le plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE) a été lancé, le 23 octobre 2017, la loi qui devait en découler était annoncée comme la grande réforme du quinquennat en matière de finances personnelles – quoique la loi concerne également moult autres sujets.
A l’époque, Bruno Le Maire n’y allait pas avec le dos de la cuillère. C’est bien à une révolution d’ampleur jupitérienne que l’on devait assister.
C’était aussi le temps où Amélie de Montchalin voulait changer le comportement des « épargnants français [qui] ont été ‘biberonnés’ collectivement, par un système très organisé par l’État, à l’épargne réglementée et à l’épargne sans risque ». Concrètement, expliquait alors Les Echos :
« Le Trésor […] préconisait purement et simplement la fin du contrat d’assurance-vie en euros. Bercy prônait que tous les nouveaux contrats souscrits en euros voient la traditionnelle garantie en capital mise en cause en cas de détention sur une durée limitée, et à l’inverse bonifiée en cas de détention longue, autour d’une durée pivot de 8 à 10 ans. Le but était d’inciter les épargnants à placer à plus long terme, et d’accepter en conséquence plus de risque en investissant en actions ».
Puis, fin mars 2018, Bruno Le Maire a dévoilé son projet de réforme de l’épargne et la baudruche s’est subitement dégonflée, en particulier au sujet de l’assurance-vie.
« Les assureurs sont montés en ligne pour obtenir une réforme plus consensuelle. Tout laisse penser que la future loi PACTE leur donnera gain de cause ».
Le journal économique ne s’est pas trompé.
Il n’en reste pas moins que la loi PACTE opère a minima un sérieux dépoussiérage des règles du jeu en matière de placements. Ce n’est clairement pas une révolution de l’épargne tous azimuts, mais la législation a globalement été assouplie et simplifiée.
Je ne vous promets pas de vous livrer un résumé exhaustif des 400 pages de la loi, mais je vais faire de mon mieux pour vous présenter les évolutions susceptibles de concerner une grande partie d’entre vous.
Commençons avec le contrat d’assurance-vie. Le « placement préféré des Français » bénéficie d’au moins deux améliorations intéressantes.
Assurance-vie : de la transférabilité externe à la transférabilité interne
Tout d’abord, le contrat d’assurance-vie devient transférable sans pénalité fiscale, c’est-à-dire en conservant le bénéfice de son antériorité. Attention cependant à ne pas vous emballer trop vite, cela n’est pas demain la veille que vous allez pouvoir vous débarrasser de votre contrat « Nuances 3D » au profit d’une « Rolls-Royce » d’un simple claquement de doigts.
La loi PACTE impose en effet une limite à une totale liberté en matière de transférabilité : celle-ci sera restreinte aux autres contrats proposés au sein de la même compagnie d’assurance.
Le gouvernement a renoncé à une transférabilité totale au motif qu’« elle risquait de déstabiliser les assureurs et elle aurait désavantagé les assurés, qui se seraient vus servir des rendements diminués, du fait d’une gestion plus prudente des actifs », selon Capital.
Cette filière absorbant « près de 40% de l’émission de la dette française », comme le rappelle le site francetransactions.com, l’enjeu pour l’Etat est effectivement colossal. Du point de vue des épargnants, la Banque de France a précisé au mois de mars que la mise en place de la portabilité totale ferait baisser les rendements de 0,2% sur les fonds euros.
Il s’agissait pourtant d’une évolution qu’auraient appréciée une très large majorité des Français, si l’on s’en remet au sondage réalisé en septembre 2018 par YouGov pour la Fintech Nalo.
Ce chiffre monte même à 86% pour les Français déjà détenteurs d’un contrat d’assurance-vie.
Nalo n’est d’ailleurs pas la seule fintech à avoir tenté de peser en faveur d’une libéralisation totale de la transférabilité des contrats d’assurance-vie. 499 nouveaux intervenants, comme Binck Bank, avaient bien sûr tout à y gagner, d’où la lettre ouverte qu’ils ont adressée aux parlementaires.
La commission des Finances a toutefois préféré faire la révolution au milieu du gué avec une sorte de Fourgous amélioré, en retoquant les amendements en faveur d’une transférabilité externe qui avaient été déposés par deux députés de la majorité LREM, Amélie de Montchalin et Joël Giraud, à l’époque respectivement membre de la commission des Finances et rapporteur du Budget.
L’exécutif avait de toute façon confirmé qu’il n’était pas en faveur de cette évolution puisque Bruno Le Maire avait déclaré que « la portabilité fait peser des risques excessifs sur l’économie, les assureurs et la fiscalité. […] L’épargnant pourrait immédiatement changer d’établissement s’il trouvait mieux ailleurs. »
Permettre aux épargnants d’aller au mieux-disant en faisant jouer la concurrence à plein régime, remettant ainsi en cause le contrôle de 80% de ce gâteau à 1 700 Mds € par 10 bancassureurs, vous n’y pensez tout de même pas, ma bonne dame ? « Dommage ! Le lobby des compagnies d’assurance-vie est-il trop fort pour le nouveau monde ? » commente le CGPI Guillaume Fonteneau…
Voilà pour les faits. Reste à déterminer si cet amendement est véritablement une bonne nouvelle pour vous, ou bien s’il s’agit surtout d’une bonne nouvelle pour votre assureur. Nous y reviendrons bientôt.