Les offres, en matière de gestion de patrimoine indépendant, sont nombreuses… mais de qualité variable : quelle solution privilégier en fonction de votre patrimoine et de vos besoins ?
Le conseil en gestion de patrimoine indépendant connaît – et c’est plutôt une bonne nouvelle – une très forte croissance depuis une vingtaine d’années.
En effet, avec la mine d’informations accessibles sur Internet, les Français sont à présent sinon de plus en plus informés, en tout cas de plus en plus conscients qu’il existe bien souvent de meilleures solutions et un meilleur service pour gérer, suivre et optimiser leur patrimoine que leur banque.
Reste la notion de la transparence, sur laquelle il y a encore bien des progrès à faire. Ainsi, pour un acteur de la gestion de patrimoine, il est souvent mal perçu de dire combien et comment on gagne. Par ailleurs, cette rétribution est souvent liée presque exclusivement au placement de produits.
Néanmoins, on enregistre sur ce terrain-là, aussi, des progrès notables, l’amélioration générale du contrôle auprès des acteurs du marché et l’augmentation des obligations réglementaires tendant à faire petit à petit disparaître les acteurs les moins rigoureux.
Résultat des courses, on compte aujourd’hui en France un peu plus de 5 000 gestionnaires de patrimoine indépendants.
A quoi servent-ils exactement ?
Les CGPI (conseillers en gestion de patrimoine indépendants), dont le nombre exact demeure difficile à évaluer, sont souvent des personnes qui travaillent seules (ou avec leur conjoint), depuis leur domicile et qui gèrent un petit portefeuille de clients fidèles.
Certains font cependant aussi ce que l’on appelle du « family office », apparenté également à de la conciergerie de luxe. Les CGPI qui proposent ce type de services gèrent donc les avoirs des clients, mais aussi toute la partie déclarative, administrative et/ou juridique des « affaires » de ces derniers.
Une norme désuète
Une norme ISO européenne a par ailleurs été créée il y a quelques années et bien qu’elle soit appliquée par plusieurs opérateurs, elle n’est toujours pas obligatoire à ce jour. Il s’agit de la norme ISO 22222, qui régit la procédure et la méthode de travail des conseillers en gestion de patrimoine.
Las ! Cette norme, et c’est une véritable hérésie, n’est plus du tout adaptée depuis plus de cinq ans en raison des évolutions réglementaires et des différentes transpositions de ces dernières années. Autrement dit, si un cabinet vous explique qu’il est certifié ISO 22222 et s’en vante, il est sévèrement en retard sur son temps.
Néanmoins, dans ce secteur concurrentiel, la voie est actuellement ouverte à des modèles économiques basés sur la transparence et l’offre de services se veut beaucoup plus dense qu’il y a quelques années.
Autre évolution notable : certaines filiales de banques ont des services dédiés (souvent appelés « gestion privée », « asset management » ou encore « private banking ») qui sont en quelque sorte sur la pente descendante, par manque d’objectivité et d’accès à tout le marché.
Les clients sont en effet, je l’ai dit, de plus en plus avertis et informés. Ils sont donc davantage en mesure de comprendre l’importance de privilégier un conseil neutre, objectif et indépendant… plutôt que de passer par une société qui n’a que des produits « maison » à proposer.
Et, s’il y a encore des « ingénieurs patrimoniaux » de grande qualité dans de nombreux établissements, il subsiste un manque de liberté certain quant aux solutions proposées, même si les choses se sont beaucoup améliorées pour la partie du conseil juridique.
Quant aux réseaux de cabinets indépendants, ils sont spécialisés, offrent une réelle expertise et bénéficient d’une approche indépendante. C’est, à mon sens, la garantie d’obtenir un conseil objectif et donc a priori de qualité.
Ces derniers mois, j’ai en outre constaté des rapprochements professionnels entre de grands noms de l’expertise comptable et des cabinets de taille intermédiaire dont il découle des binômes de qualité alliant l’expertise produit avec le conseil.
Un business model à réinventer
Dans ce secteur, la rémunération est donc principalement basée sur le placement de produits financiers et/ou corrélée à l’envergure des actifs des clients. Elle est donc totalement déconnectée de la performance réelle à laquelle le client peut prétendre, ce qui peut poser un problème.
Pour le contrer, le régulateur « pond » depuis plusieurs années des lois amenant les acteurs à plus de transparence, ce qui fait que les clients n’acceptent plus forcément les marges historiques pratiquées par le passé.
De leur côté, les institutions vont devoir industrialiser tous les postes non-rémunérateurs afin de regagner et de retrouver des marges, ce qui implique de segmenter la clientèle et renforce la possibilité que le conseil soit un peu moins présent pour ses clients.
A titre d’exemple, lorsqu’un indépendant doit réaliser un contrat d’assurance ou faire souscrire des SCPI, un PEA voire un CTO (compte-titres ordinaire), il se doit de vous donner des documents informatifs. Et ce, en respectant une chronologie précise. Cela prend entre 20 et 25 heures de travail, une moyenne que j’ai pu constater dans mon ancien cabinet… et qui ne bouge pas, que le versement contrat (ou la souscription de parts) soit de 3 000 € ou de 3 M€.
Vous comprendrez bien que la commission perçue n’est en revanche pas la même, mais, à cause des obligations administratives, les cabinets n’ont pas d’autres choix que de trouver des solutions.
Industrialiser les procédures administratives par le biais d’outils digitaux en fait partie, mais plus globalement, il convient de tout mettre en œuvre pour mettre au point un modèle économique viable, sans quoi l’accès à certains produits ne sera plus possible aux petits porteurs.
Avec sa quête perpétuelle et exacerbée de transparence, le régulateur contraint l’ensemble des cabinets et autres family offices à une visibilité totale quant aux activités et aux prestations de services d’investissement fournis auprès des clients.
Mais autant je trouve positif que ceux-ci puissent avoir facilement accès à ces informations, autant on a tendance à oublier que les clients ont de plus en plus besoin d’avoir du conseil pour développer, structurer et pérenniser leur portefeuille. Raison pour laquelle ils se tournent de plus en plus vers les family offices. Or, je ne suis pas sûr que le mille-feuille administratif leur apporte une plus grande transparence au bout du compte…
Réfléchir avec le client
Pour en venir au family office, son intérêt est d’avoir une capacité à donner une projection à court, moyen et/ou long termes au client, tant sur la construction que sur la réalisation de son patrimoine, en ayant une vision à 360 degrés et en intégrant des sujets sur le conseil en investissement financier, sur l’ingénierie patrimoniale, la gouvernance familiale, le private equity et l’immobilier.
Il peut s’agir d’un accompagnement précieux en matière de planification patrimoniale, avec le conseiller et son client qui dessinent ensemble le chemin d’une vie afin de définir, un peu comme un architecte, les plans du futur patrimoine.
Le but est de réfléchir avec le client sur toutes les problématiques d’ordre patrimonial, avec des pôles d’expertise à forte valeur ajoutée en interne, pour ensuite déployer ce conseil auprès de l’écosystème historique du client que sont les banques privées, les notaires, les avocats et les experts-comptables.
Les personnes qui désirent un tel accompagnement sont souvent des entrepreneurs, des familles ou encore des clients qui sont en train de constituer leur patrimoine et qui ont besoin de conseils sur la structuration, le private equity, l’immobilier voire en matière de philanthropie.
Quant à ceux dont le patrimoine est déjà constitué, ils sont davantage intéressés par les problématiques d’ingénierie patrimoniale ou de gouvernance familiale et préparent la transmission en aspirant à ne pas trop perdre d’argent avec le frottement fiscal.
Toutefois, et malgré son intérêt, le family office reste très faible dans le monde de la gestion patrimoniale. Le terme CGPI, lui, ne veut en réalité pas dire grand-chose et quand on y réfléchit bien, il ne s’agit dans certains cas que d’un très bon vendeur de solutions (immobilière ou financière) dans des milieux autorisés.
D’aucuns limiteraient même son rôle à celui d’un « supercomparateur » de produits. Rien de péjoratif en cela, et le fait est qu’il y a moins de 20% de la population qui facturent aujourd’hui des honoraires de conseils à leurs clients.