▪ Eh bien, évidemment, cette semaine, tous les regards étaient portés vers l’Egypte et les événements se déroulant au Proche-Orient. Je ne vais pas vous refaire l’analyse d’une situation qui aura de toute façon changé entre le moment où j’écris ces lignes et celui où vous les lisez : je vous renvoie plutôt à l’excellent article de Jean-Claude Périvier pour un éclairage clair et concis sur les événements.
Non, je vais plutôt vous parler des nouvelles qui sont restées souterraines ces derniers jours — éclipsées par les fumées de la "Révolution de Jasmin".
Comme l’emploi américain, par exemple : les dernières statistiques étaient plutôt encourageantes, mais comme le disait Philippe Béchade, "en ce qui concerne le chômage réel, Wall Street se fie à une calculette en guimauve où certaines touches s’écrasent sous la pression sans qu’aucun chiffre n’apparaisse à l’écran".
"Les chômeurs en fin de droit, pfuitt, envolés ! Les demandeurs ayant renoncé à pointer toutes les semaines, plouf, plouf, comptés pour zéro ! La masse salariale qui n’augmente pas, c’est comme si on tapait sur ‘+/-‘. Une fois éliminées toutes les personnes qui respirent encore mais qui ne touchent aucun salaire dans la plus grande furtivité statistique, l’économie américaine donne l’impression de créer des emplois".
▪ Ah, et il y avait ça, aussi : l’agence de notation Standard & Poor’s a dégradé la dette japonaise. Le fait n’a pas échappé à Bill Bonner :
"Selon l’agence Standard & Poor’s, le Japon n’avait pas de plan plausible pour échapper à la faillite. Le pays a le ratio dette/PIB le plus élevé au monde. Et il ne fait que s’endetter plus encore".
"Est-ce un problème ? Les prêteurs — en grande partie constitués des Japonais eux-mêmes — ne semblent pas être de cet avis. Ils prêtent de l’argent au gouvernement japonais pendant 10 ans et ne demandent que 1,24% d’intérêt. Vous imaginez ? Si le yen ne perdait que 2% par an — ce qui est la cible dans la majeure partie des économies avancées — le taux d’intérêt réel serait négatif. Ce qui signifie que le prêteur perdrait de l’argent chaque année".
"Et comment les Japonais rembourseront-ils ? Les prêteurs donnent de l’argent à un emprunteur qui, comme le dit S&P, n’a ‘pas de plan plausible’ pour le rembourser. Et ils ne demandent que 1,24% de taux d’intérêt. A quoi pensent-ils ? Pensent-ils tout court ?"
"Les taux d’épargne diminuent, au Japon. Les gens vieillissent. On trouve plus de personnes prenant leur retraite que de nouveaux arrivants sur le marché de l’emploi. Comment ce film pourrait-il avoir une fin heureuse ?"
Mais, vous demandez-vous peut-être, sagace lecteur — et me demandez donc à moi, par extension — "pourquoi s’intéresser à un chapelet de 6 852 îles (oui, 6 852 !) perdues de l’autre côté du continent ?"
Oui, pourquoi ?
Eh bien tout simplement parce que depuis bientôt vingt ans, le Japon préfigure ce qui attend les économies matures comme les Etats-Unis ou l’Europe : récession molle, croissance molle aussi, vieillissement de la population, plans de relance et interventions gouvernementales à la pelle, cuisine monétaire (rappelez-vous le carry trade sur le yen…), endettement de l’Etat… et désormais dégradation de la dette souveraine.
A chaque fois, le Japon nous précédait d’une étape ; à chaque fois, nous l’avons suivi… au lieu de tirer les leçons de l’expérience nippone.
Il en sera de même cette fois-ci : la dette française et européenne prend un virage vers le pire depuis des mois — et c’est votre épargne qui est en bout de ligne.
Meilleures salutations,
Françoise Garteiser
La Chronique Agora