Faut-il s’attendre à un rebond rapide… ou à une lente dégringolade comme dans les années 1970 ?
Comme nous l’avons vu dans notre précédent article, le marché s’oriente désormais vers une lente dégringolade, potentiellement plus destructrice pour les investisseurs qu’un krach brutal. La Fed ne semble pas pressée d’intervenir.
Donald Trump déclare qu’il veut que les taux d’intérêt baissent, mais il ne sacrifiera pas volontairement le marché actions pour l’obtenir.
Pour autant, les actions et les rendements des obligations pourraient baisser d’eux-mêmes pour des raisons qui ont peu à voir avec Trump ou la Fed, mais tout à voir avec un ralentissement de la croissance et une potentielle récession aux Etats-Unis. Quand les actions baisseront, Trump reprochera simplement à la Fed de ne pas avoir baissé les taux davantage et plus tôt.
Avec les baisses de taux, il faut faire attention à ce que l’on souhaite. La plupart des gens considèrent les baisses de taux comme un « stimulus ». Il n’en est rien.
Les baisses de taux sont liées à une dépression et à une récession. Dans un contexte de vigueur économique, les taux augmentent un peu car des rendements plus élevés sont disponibles et les entrepreneurs rivalisent pour obtenir des financements.
En ce moment, les signes de récession abondent de toutes parts, aux Etats-Unis.
L’indicateur GDPNow de la Réserve fédérale d’Atlanta [NDLR : indicateur de croissance du PIB] vient juste de s’effondrer. Le 26 février, ses prévisions de croissance du PIB pour le premier trimestre était de +2,3% (annualisé). Mais le 7 mars, l’indicateur affichait -2,4%. C’est une baisse de croissance stupéfiante de 4,7 points de pourcentage en une semaine !
Les signes de récession se manifestent de toutes parts
Les analystes imputent ce chiffre à une flambée des importations en février, censées échapper aux tarifs douaniers instaurés par Trump. Ces importations ont fait augmenter le déficit commercial, ce qui a pénalisé le PIB. Cette interprétation tient la route, mais l’histoire ne s’arrête pas là.
Les ventes au détail et la confiance des consommateurs sont également en baisse. La participation à la main-d’oeuvre – nombre d’individus, au sein de l’économie, qui travaillent réellement (qu’ils soient techniquement « au chômage » ou non) – est également en baisse. Les embauches ont freiné net il y a des mois et, à présent, les licenciements commencent. De grands détaillants comme Walmart, Target et Best Buy ont tous signalé que leurs chiffres d’affaires et leurs profits ralentissaient.
Ces signes de récession ne se limitent pas aux Etats-Unis…
L’Allemagne, le Royaume-Uni, le Japon et le Canada sont tous en récession ou s’en rapprochent. La croissance de la Chine ralentit rapidement. Officiellement, le gouvernement chinois a annoncé une croissance de 5%, mais la réalité est plus proche de 2%, si l’on retranche les investissements gaspillés. Même la Chine pourrait s’orienter vers une récession.
Aux Etats-Unis, le chômage est passé de 3,4% en avril 2023 à 4,1% aujourd’hui. Ce n’est pas un niveau élevé ni une énorme augmentation, mais cette tendance devrait inquiéter. L’inflation est passée de 2,4% (annualisé) en septembre 2024 à 3% aujourd’hui. Là encore, ce n’est pas un niveau incontrôlable, mais cette tendance est aussi préoccupante.
Le dilemme de la Fed
La Fed est prise entre le marteau et l’enclume.
En ce moment, elle s’inquiète davantage de l’inflation. D’ici le mois de mai, elle s’inquiètera davantage de l’emploi. Elle ne peut pas simultanément baisser les taux d’intérêt pour lutter contre le chômage et les relever pour lutter contre l’inflation. Voilà pourquoi, en gros, elle est résignée et ne fait rien.
Rien de tout cela n’a grand-chose à voir, directement, avec la performance du marché actions.
La Fed pourrait difficilement avoir moins de pertinence, en ce moment. Mais elle a une importance symbolique dans l’esprit des investisseurs lambda et des médias financiers.
La Fed ne va pas être supprimée dans la vague de démolition du Deep State actuellement menée par le DOGE. Mais le gouvernement a fait appel à la Cour suprême pour statuer sur la question de savoir si Trump a le droit de révoquer le dirigeant d’une agence soi-disant « indépendante ». La cour pourrait surprendre les observateurs en décidant que Trump a le droit de révoquer tout dirigeant d’agence indépendante sur le fondement de la séparation des pouvoirs. Si cela se produit, il n’y a aucune raison que la Fed échappe à cette décision.
A ce stade, Trump brandirait l’épée de Damoclès au-dessus de la tête des dirigeants de la Fed. Je m’attendrais à ce que Jerome Powell démissionne pour protester, auquel cas Trump nommerait un allié, et la Fed lui serait entièrement acquise. Cela ferait les gros titres mais, là encore, cela a peu de pertinence pour les actions.
Les investisseurs devraient alléger leur exposition aux actions afin de limiter les pertes au cours de cette baisse du marché. Des gains substantiels pourraient être réalisés dans le secteur intermédiaire du marché des bons du Trésor américain à mesure que les taux d’intérêt commenceront à s’effondrer. Allouer des fonds aux liquidités et à l’or est également conseillé pour réduire la volatilité, augmenter ses liquidités et se protéger des risques géopolitiques.