** L’événement de la semaine écoulée tenait en une phrase :
"Nous sommes attentifs aux implications des changements de la valeur du dollar pour l’inflation et pour les attentes d’inflation, et nous continuerons à formuler notre politique pour contrer ces risques".
L’événement n’est pas tant la phrase en elle-même, d’ailleurs, que celui qui l’a prononcée — c’est-à-dire Ben Bernanke, président de la Fed. Après des années de "douce négligence", voire de tentatives de destruction pure et simple, la Réserve fédérale s’inquiète du sort du billet vert. C’est historique, rappelons-le — parce que d’ordinaire, ce n’est pas le rôle de la Fed, mais bien celui du secrétaire au Trésor US.
Quoi qu’il en soit, comme le rappelait Bill jeudi, "que pourrait faire la Fed pour protéger le dollar ? Facile… elle pourrait augmenter les taux d’intérêt. Mais si la Fed voulait protéger le dollar, pourquoi a-t-elle attendu aussi longtemps ? Le dollar a perdu près de la moitié de sa valeur depuis 2000, pourquoi n’a-t-elle pas essayé de le protéger plus tôt ?"
Et Bill de faire un petit rappel des faits : "durant la période de 15 ans appelée ‘Grande Modération’, les banques centrales ont pu augmenter leurs masses monétaires deux, trois, cinq fois plus rapidement que la croissance du PIB. Normalement, cela provoquerait de l’inflation. Ca n’a pas été le cas parce que les marchés mondialisés… ainsi que quelques autres tendances clé… maintenaient les prix à la consommation au plancher. La monnaie inflationniste passa donc dans des bulles d’actifs… les dot.com, les maisons et l’industrie financière".
Mais aujourd’hui, la tendance s’est inversée : "alors même que la demande des matières premières de base ralentit dans le monde développé, la demande des marchés émergents les rend plus chères. Aïe aïe aïe… la mondialisation n’agit plus pour le bien… mais pour le mal ! A présent, les revenus et les prix de l’immobilier chutent aux Etats-Unis, par exemple — tandis que les Américains sont contraints de lutter contre les Asiatiques pour la nourriture, le carburant et les emplois".
L’inflation cause des douleurs de plus en plus cuisantes aux ménages américains… cependant que les étrangers commencent à montrer des signes de nervosité devant l’érosion de la valeur du dollar. Prise ainsi entre le marteau et l’enclume, la Fed sort de sa réserve (pardon, je n’ai pas pu résister…) et prend fait et cause pour le billet vert.
Mais parviendra-t-elle à renverser la tendance ? N’est-il pas désormais trop tard pour agir ? D’autant que, comme nous le disait Philippe Béchade hier… "J.C. Trichet s’est empressé de torpiller la remontée du billet dès la conférence de presse qui a suivi le maintien du taux repo à 4%. Il a évoqué de la manière la plus abrupte — et sans recourir aux subtilités sémantiques habituelles — l’imminence d’un tour de vis monétaire d’ici le mois de juillet. […] Le résultat ne s’est pas fait attendre : le joli soufflé concocté par Ben Bernanke mardi est retombé en laissant s’échapper un pauvre panache de vapeur tiède, préfigurant l’inexorable avachissement de la valeur du dollar".
Quel est le but de Jean-Claude Trichet ? A-t-il pour la monnaie européenne des visions de devise de réserve mondiale ? Après l’étalon-or et l’étalon-dollar, aura-t-on droit à un l’étalon-euro ? Avec sa devise forte, la Zone euro est-elle destinée à devenir la Suisse du reste du monde ?
En tout cas, nous dit Philippe, "il y a une contradiction évidente et totale entre le discours des autorités monétaires européennes, qui fustige la faiblesse du dollar, et une stratégie consistant à ruiner les efforts de la Fed au lendemain même d’une initiative qualifiée d’historique par de nombreux cambistes. Si nous étions convaincu qu’il n’y avait pas de coopération entre les deux grands argentiers de la planète, nous soupçonnons à présent, de la part de l’un d’entre eux, une volonté délibérée de nuire à l’autre".
"Qui peut décemment croire que l’Europe a besoin d’une hausse de taux d’ici le 3 juillet prochain ? En quoi une telle mesure pourrait-elle faire reculer le prix des matières premières ? Et puis surtout, en affaiblissant le dollar, la BCE fait le jeu de ceux qui spéculent sur le pétrole pour maintenir le niveau de leurs revenus exprimés en livres sterling, en yens ou en euros".
La Fed avait-elle compté avec un tel adversaire ?
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