La semaine passée, nous avons vu que nombre de politiques ont quelques carences en maths et économie. Mais ce n’est pas tout…
Nos dirigeants sont assez peu portés sur la chose technologique. Vous vous souvenez peut-être que François Hollande se vantait de ne pas utiliser d’ordinateur lorsqu’il était à l’Elysée. En parfait représentant de cette inamovible génération formica, l’ancien président préférait le bon vieux papier aux écrans LCD.
Christine Albanel nous avait en son temps gratifié d’une prestation passablement risible. L’ancienne ministre de la Culture et de la Communication (2007-2009) avait en effet expliqué aux députés que son ministère utilisait comme pare-feu Open Office. Si vous aviez raté cette scène d’anthologie, c’est ici.
Pas de geeks au Sénat
Depuis, notre personnel politique souffre toujours d’un handicap sévère en matière de culture numérique, en particulier au Sénat. Interrogés sur les usages de l’intelligence artificielle, certains parlementaires de la chambre haute ont fait montre d’une ignorance assez crasse. Au palais du Luxembourg, on n’a « pas d’avis bien particulier sur le dossier » des chatbots, ou encore qu’il pourrait être souhaitable d’élargir le data mining… enfin « pourquoi pas » !
Bref, vous aurez compris qu’on n’a pas la moindre idée de ce dont il s’agit et que de toute façon, tant que Gérard Larcher continuera à faire entretenir les courts de tennis, on aura d’autres préoccupations.
Qu’il est difficile de se glisser dans la peau des entrepreneurs
L’élection présidentielle avait été l’occasion de nous rappeler que pour l’immense majorité des candidats à la plus haute charge étatique, le monde se divise en deux parties : la sphère privée, dont la bonne gestion est tributaire de certains facteurs ; et la sphère publique, qui fonctionne parfaitement en toutes circonstances et qui peut donc faire abstraction des contingences d’organisation, de conditions de travail ou de financement.
On aurait donc affaire à deux mondes que tout oppose, y compris les lois élémentaires de la gestion d’entreprise.
Pour Bruno Le Maire, c’est surtout en fonction de la dichotomie petites entreprises/grandes entreprises qu’il faut concevoir l’économie. Pour notre ministre, que certains voudraient faire passer pour « libéral », il suffirait de « diriger » l’argent des épargnants-contribuables vers les PME pour que ces dernières grandissent.
Ah, que l’économie est simple dans l’esprit de ce ministre dirigiste mais bien intentionné. Question : quelqu’un au ministère a-t-il depuis expliqué à Bruno Le Maire pourquoi nombre de PME n’emploient que 49 salariés ? Notre ministre sait-il que le passage de 49 à 50 salariés n’est pas sans entraîner moult nuisances administratives, fiscales et sociales absolument rédhibitoires pour nombre de PME ?
Mais laissons Bruno Le Maire tranquille et intéressons-nous plutôt aux déclarations de quelqu’un dont l’intelligence est indiscutable.
On n’y comprend rien ? Faisons faire un rapport idiot par une grosse pointure !
Vous avez certainement entendu parler du rapport Villani sur l’intelligence artificielle. Voici ce qu’en dit Philippe Silberzahn, professeur à l’EM Lyon Business School et chercheur associé à l’Ecole Polytechnique :
« La France a renoué avec une vieille tradition : demander à quelqu’un d’intelligent d’écrire un rapport idiot. »
Pourquoi « idiot » ? Parce qu’une fois posé le constat que la France est en retard sur l’IA, la solution proposée est l’archétypique de la vieille tambouille à la sauce dirigiste : « vite un plan national. Des subventions, des initiatives, une agence, tout plein de petits fours et de pique-assiettes ».
Exit donc une approche qui consisterait à envisager que les acteurs privés n’ont peut-être pas besoin que des fonctionnaires les aident en les tenant en laisse, mais au contraire que l’Etat fasse un pas en arrière en direction des affaires qui le regardent (le régalien) pour laisser nos entreprises libres se développer comme elles l’entendent.
L’Etat n’a pas vocation à utiliser l’argent des contribuables pour tenter de créer de toutes pièces des mastodontes du numérique. Il doit au contraire offrir aux entreprises privées les conditions politiques, fiscales, sociales et réglementaires propices au développement de tels acteurs.
Au final, Cédric Villani a beau n’afficher que 44 ans au compteur, « le rapport Villani est un rapport de vieux, la hype de notre ami Cédric en plus », conclut Philippe Silberzahn.
Au cas où vous auriez besoin d’un dernier exemple pour être convaincu que les subventions, ça ne fait rien avancer, je vous ai gardé le meilleur pour la fin : le plan de sauvetage de Presstalis, le principal distributeur de la presse française.
Ce n’est d’ailleurs pas le premier ! Sans doute savez-vous que la presse française, en particulier la presse généraliste grand public, est fortement subventionnée. Sans cet argent, nombre de titres manquant de lecteurs accompliraient leur destin, à savoir mettre la clé sous la porte.
Non contente de forcer chaque contribuable à financer les salaires de certains journalistes, la ministre de la Culture Françoise Nyssen a annoncé mi-mars que l’Etat allait prêter la coquette somme de 90 M€ à Presstalis pour permettre la survie de cette entreprise zombie déjà sauvée de la faillite grâce à votre argent en 2012.
Le Monde précise que « Mme Nyssen a confirmé que le sauvetage du groupe allait nécessiter de revoir les règles de distribution de la presse » car bien sûr, ce secteur fait l’objet d’une méticuleuse réglementation, l’Etat sachant évidemment mieux que les kiosquiers ce qu’il convient de mettre en vente dans les rayons.
Plutôt que de laisser cette entreprise faire faillite et de permettre au secteur de se réorganiser, l’Etat va permettre à une société en situation de quasi-monopole de prélever quelques livres de chair supplémentaires sur le dos des contribuables et des petites éditions.
Les politiques, ces grands enfants qui se font plaisir à nos dépends
Le bloggeur Franck Boizard rappelle souvent la définition que donnait Delbecque de nos politiciens : des « carencés en tout », qui « sont restés à l’école jusqu’à ce qu’elle ferme », qu' »on place dans l’Etat et à qui on dit ‘Maintenant, c’est toi le chef’ ; c’est comme donner un flingue à un enfant de cinq ans en lui disant ‘Maintenant, fais toi plaisir' ».
Malheureusement, cette marque de fabrique n’est pas une question de générations. Comment progresser et apprendre de ses erreurs si vous êtes à l’abri des conséquences de vos erreurs ?