Par Jean Chabru (*)
Un baril de pétrole à près de 100 $… Des banques américaines qui n’en finissent pas d’annoncer des pertes liées aux subprimes… Une récession annoncée aux Etats-Unis à cause de la crise immobilière… Autant de raisons pour que les marchés financiers corrigent violemment et pourtant… ils tiennent !
C’est à y perdre son jargon d’analyste
C’est très étonnant, voire même incompréhensible de mon point de vue d’analyste financier : deux des principales banques américaines — Merrill Lynch la semaine dernière et Citigroup lundi — ont annoncé une aggravation de leurs pertes liées aux subprimes. Une énième douche froide pour les investisseurs.
Les pertes annoncées sont gigantesques, mais au-delà des chiffres, chaque nouvelle annonce de ce type pèse un peu plus sur la confiance des investisseurs. Or la confiance est le carburant des marchés financiers. Et pourtant… pourtant, contre tout entendement, les marchés s’accrochent à leurs niveaux. Mais s’il n’y avait que cela…
Pétrole : spéculation et fondamentaux tirent le marché à la hausse
A quasiment 100 $ le baril, l’or noir n’a jamais aussi bien porté son nom. Il bat ses records atteints lors des chocs pétroliers des années 70 et 80. Sauf qu’il y a 30 ans, ces niveaux résultaient des décisions politiques prises par l’OPEP.
Aujourd’hui, l’OPEP apparaît plus divisée que jamais et semble incapable de parvenir à un consensus. Par ailleurs, les fonds considèrent que, dans ce contexte de croissance mondiale très forte, l’effet de rareté conduira à une poursuite de la hausse des cours. Alors ils spéculent… Mais au-delà de la simple spéculation, il existe des raisons évidemment plus structurelles.
Le Peak Oil, vous connaissez ?
Alors, cher lecteur, j’ai mené mon enquête et… surprise ! Le 22 octobre dernier, un rapport des Experts d’Energy Watch Group (EWG) publié à Londres a mis le feu aux poudres — ou plutôt aux réserves de pétrole — en annonçant que le pic pétrolier (le fameux Peak Oil), ce point culminant où la moitié des réserves de brut de la planète a été épuisée, aurait été atteint en 2006 !
Voilà qui n’a rien pour vous surprendre. Mes collègues et rédacteurs de La Chronique Agoravous en parlaient depuis déjà bien longtemps. L’extraction de l’or noir serait désormais sur une pente déclinante de 3% par an. Si ces conclusions alarmantes sont à relativiser au vu de la couleur politique de ce groupe d’experts (créé par un député vert allemand), leurs estimations donnent à 854 milliards de barils les réserves restantes. Ce qui contredit les estimations "officielles" qui évaluent les réserves mondiales à 1 200 milliards de barils !
Si le niveau exact des réserves est invérifiable, il est clair que certains pays producteurs utilisent cette arme pour se maintenir au centre du jeu politique internationale. Mais ils se retrouvent déjà face à une baisse de leur production. Cette thèse rappellera sans doute à mes lecteurs les plus fidèles celle de La Face Cachée du Pétrole d’Eric Laurent dont je vous avais recommandé la lecture durant l’été 2006.
Quand il n’y aura plus de pétrole, d’autres énergies prendront le relais !
Ce rapport sert clairement la cause de l’EWG, dont les responsables militent pour les énergies renouvelables et pour un renforcement de l’efficacité énergétique, seuls capables de résoudre la crise à leurs yeux. Mais le plus étonnant, c’est que ce discours a été relayé par Georges David, le patron d’United Technologies l’un des plus importants conglomérats industriels américains. Il a expliqué sans ambages lors d’un entretien accordé aux Echos, le 5 novembre, que "la crise pétrolière est bonne pour le monde. Pendant des années, on a bénéficié d’une énergie bon marché sans vraiment faire attention à notre consommation. Maintenant, cette énergie est moins disponible et plus chère. Cela va nous forcer à trouver des solutions".
Le renouvelable, le nouveau moteur des économies et de votre portefeuille ?
Si les grands industriels commencent à être d’accord avec les activistes écologistes, il y a sûrement des raisons d’espérer. Et c’est là que nos économies trouveront les ressources nécessaires pour transformer leur dépendance au pétrole vers davantage d’énergies renouvelables. Mais tout cela doit se faire au travers de très forts investissements.
Je reviendrai sur ce sujet dans les prochains numéros, car je peux déjà vous dire que nous placerons 2008 sous le signe du renouvelable !
Meilleures salutations,
Jean Chabru
Pour la Chronique Agora
(*) Depuis plusieurs années, Jean Chabru est à la tête de Small Caps Profits, une lettre d’information consacrée uniquement aux petites valeurs. S’appuyant sur l’une des plus grandes bases de données françaises sur les petites valeurs, Jean Chabru déniche les pépites cachées des marchés pour le plus grand profit de ses lecteurs. Pour plus de détails