Au mois d’octobre, pendant que les politiques français s’écharpaient au sujet de nos origines gauloises, Barack Obama s’entretenait avec le directeur du MIT Media Lab Joi Ito, entretien retranscrit dans le prestigieux magazine techno américain Wired.
Au menu de cette interview, l’intelligence artificielle et les enjeux qui en découlent : les voitures autonomes ; les nouvelles formes du travail ; le pouvoir des GAFA (les géants de l’internet Google, Amazon, Facebook et Apple) ; le rôle de l’Etat dans ce domaine ; la cybersécurité…
Eh oui, un président peut avoir une vision de l’avenir du monde ! Certes, pas une vision particulièrement originale, mais l’homme est en tous cas suffisamment bien entouré pour savoir qu’un responsable politique de premier plan ne peut pas se passer d’une maîtrise globale de la révolution numérique, tant ce sujet est crucial.
Les hommes politiques ont dans leur panoplie toute une kyrielle de moyens pour condamner un pays. L’une d’entre elles, particulièrement redoutable, consiste à ignorer majestueusement le déroulement d’une révolution technologique qui se déroule pourtant devant nos yeux et qui n’en est qu’à ses balbutiements.
Les précédentes révolutions technologiques ont toujours redistribué les cartes. Les pays qui en sont sortis plus forts sont ceux qui ont réagi à temps pour permettre à des institutions adéquates de se mettre en place.
Vous en doutez ? Prenons le cas de la première révolution industrielle. L’accueil réservé par Colbert à Denis Papin, lorsqu’il lui présentait ses expériences sur le vide, n’était pas des plus chaleureux.
Quelques années plus tard, la machine à vapeur voyait le jour de l’autre côté de la Manche. Papin finit membre de la Royal Society of London, institution née d’une initiative privée avec des membres intégrés par cooptation et libres de mener les recherches dans la direction où ils l’entendaient.
L’Académie Royale des Sciences parisienne, créée par Colbert, est quant à elle demeurée cadenassée par le pouvoir politique avec les résultats que l’on sait.
L’incompétence, l’inertie, ou pire, le déni pour transformer une opportunité économique en défaite
Le numérique n’est pas une technologie dont les effets se cantonnent à certains domaines, comme l’information et la communication. Avec Uber, c’est le domaine du transport de personnes qui change. On nous annonce la même chose avec la blockchain et les fintechs au niveau des activités bancaires. L’intelligence artificielle pourrait quant à elle rapidement bouleverser des domaines aussi variés que la comptabilité, la médecine ou encore la justice. Les technologies numériques transforment tous les business models.
Ignorer la révolution numérique est à peu près aussi grave que de faire abstraction de l’électricité dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Sans parler des enjeux de la robotisation…
Que voyons-nous ? D’un côté, la Maison Blanche tweete : « I’m a science geek. I’m a nerd, and I don’t make any apologies for it » [« Je suis un fondu de science. Je suis un nerd et je ne m’en excuse pas », ndlr], et de l’autre, le candidat que les médias nous vendent comme notre avenir, Juppé, 71 ans, pour qui les réseaux sociaux sont la « poubelle de l’univers » avec laquelle nous sommes bien obligés de vivre, même s’il vaut mieux ne pas y fouiller. Mais qu’attendre dans une France où le président en exercice n’a pas d’écran d’ordinateur sur son bureau et où le président sortant a découvert l’existence du Bon Coin au mois de mai 2016 ?
Certaines personnalités, comme le chirurgien-urologue, auteur et chef d’entreprise Laurent Alexandre, s’efforcent de porter ces enjeux à l’attention des politiques. Avec peu de succès jusqu’à présent, ce qui est d’autant plus inquiétant à l’heure où les GAFA viennent de conclure un partenariat sur l’intelligence artificielle en vue de définir de « bonnes pratiques » sur le plan éthique. L’état d’esprit « anti-techno » d’une grande partie de la classe politique française pourrait se révéler aussi nuisible à terme que son étatisme. Un autre très bon moyen de couler la France.
Un problème d’âge, ou une question de volonté ?
De Gaulle et Pompidou, lorsqu’ils ont permis à la France de leur époque d’entrer dans la modernité, n’étaient plus dans leur prime jeunesse. Comme bien souvent, le problème tient plus à une réelle volonté de sortir de ses habitudes, de sa zone de confort, pour agir. Les hommes politiques doivent d’abord accepter que le monde dans lequel ils vivent n’est plus celui dans lequel ils ont commencé leur carrière. Soit, pour une grande partie d’entre eux, les années… 1970.
Une embellie se profile du côté de l’offre politique, elle aussi confrontée au risque de l’uberisation. Des initiatives comme La Primaire des Citoyens visent à renouveler notre système démocratique en utilisant la puissance des outils numériques. Elles permettent de faire émerger des candidats qui traitent ces enjeux comme un sujet majeur de la campagne présidentielle de 2017, comme c’est le cas de Régis André.
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3 commentaires
Technologie numerique et intelligence artificielle ne feront rien d’autre que de supprimer un certain nombre d’emplois existants aujourd’hui et ainsi augmenteront le chomage .C’est peut etre pour cela que nos politiques sont peu pressés de se mettre à la mode………..Les inventions d’ aujourd’hui (ordinateur,technologie numerique,robot,etc) sont destructrices d’emplois et personne ne changera rien à cela, et cette constatation pose la question suivante : que va t on faire de tout ces gens laissés sur la touche ?? les interner??les faire disparaitre?? Les gens seront ils mieux soignés lorsque le medecin sera remplacé par un robot ?.Où est le benefice ?
Technologies, Techonologies…. C’est bien de rappeler qu’historiquement elles ont permises de faire des bonds à des civilisations…. Mais historiquement parlant aussi, des civilisations ont aussi régressé, et non pas parce qu’elles ne parvenaient plus à progresser technologiquement, mais parce qu’elles n’avaient plus assez de ressources pour continuer de progresser et subsister. OR, votre article oublie de rappeler que les technologies dépendent de l’énergie ! Mais pour produire de l’énergie il faut des ressources et des matières premières ! Même pour stocker des mails, il faut absolument de l’énergie, donc des ressources ! D’ailleurs votre directrice de rédaction Simone Wapler le rappelle lors de sa conférence ici :
https://www.youtube.com/watch?v=Zp3jLMhx42s
Qu’en est il de tout votre système informatique et de vos technologies sans électricité et sans ressources pour la produire ? Car pour le moment, tout laisse à penser que l’on aura moins d’énergie demain ! Alors un monde avec autant de technologies est-ce si réaliste ?
Oui l’article pose le problème. Si c’est vrai que la techno supprimé beaucoup d’emploi, on sait depuis les canuts que foutre les métiers à tisser dans le Rhône est imbécile.
De plus à Long terme la techno apporté beaucoup de solutions. Il faut juste être volontariste pour guider l’utilisation techno. Dans notre cas cela veut dire convertir la force de travail et règlementer les développements déviant de l’intérêt de l’humanité. Sinon nous laissons aux prédateurs la puissance technologique et en subirons la domination.