L' »économie de services », tant vantée par nos décideurs, peut être démontée pièce à pièce comme l’imposture qu’elle est en réalité
Nous avons prévenu que la Fed ne procèderait pas à un relèvement sensible des taux d’intérêt. Du moins pas volontairement.
Chaque fois que Janet Yellen, la présidente de la Fed, ouvre la bouche, elle sous-entend que de nouveaux relèvements de taux vont peut-être se produire.
Mais à chaque fois, il s’avère que l’économie n’est pas aussi solide qu’elle le pensait… et que, finalement, relever les taux n’est pas une bonne idée.
Les économistes conventionnels balaient régulièrement de la main les inquiétudes relatives au chômage et à la production de l’industrie manufacturière.
« Ne vous tracassez pas là-dessus » disent-ils. « Notre économie des services est solide ».
Mais voilà, nous avons appris il y a quelques jours que l’économie des services n’était pas si solide qu’on ne le pensait. D’après Bloomberg :
La chute nette enregistrée mardi sur l’Indice ISM Services, ramenant ce secteur à un plus-bas sur six ans, s’inscrit dans une longue série de données médiocres relatives aux mois d’août.
Par ailleurs, la promesse d’une économie des « services » a toujours été une imposture. On ne peut pas tous devenir riche en tondant les pelouses les uns des autres et en garant les voitures des uns des autres !
On peut gagner de l’argent en offrant des services, mais seulement si quelqu’un a les moyens de se les offrir. En outre, on ne peut payer les services d’un tiers que si l’on fait quelque chose qui génère de la richesse réelle.
Une ponction sur la richesse
Prenons l’exemple de l’Inde…
Ce pays dispose d’un demi-milliard de personnes prêtes à faire n’importe quoi pour des clous.
Les services ? Il y en a autant que vous voulez. Mais ce n’est pas ce qui fait de l’Inde un pays riche.
On ferait mieux de percevoir les services comme une ponction sur la richesse, et non une façon de l’augmenter.
Disons que vous voulez aller au cinéma. Au lieu de surveiller vous-même vos enfants, vous engagez une adolescente du voisinage.
Admettons que vous la payez 20 $ pour la soirée. Cela augmente de 20 $ le revenu généré par le secteur des services, et en ce qui vous concerne, vous avez pu profiter de ce service.
Vous aviez 20 $. A présent, quelqu’un d’autre possède les 20 $. Où est la richesse supplémentaire ?
L’industrie manufacturière, par contre, crée de la richesse. Vous prenez 20 000 $ de main-d’œuvre et de matériaux. Vous produisez et assemblez une voiture que vous vendez 25 000 $. La voiture vaut 5 000 $ de plus que son coût de production. Votre « richesse » a augmenté de 5 000 $.
Mais attendez… Vous devez vous dire qu’à présent il manque 5 000 $ à quelqu’un. Pas du tout. Celui qui a acheté la voiture avait 25 000 $ de liquidités. A présent, il a une voiture d’une valeur de 25 000 $. Il est quitte, et la richesse du monde vient d’augmenter de 5 000 $.
Le crack et Snapchat
Nos lecteurs vont prestement nous faire remarquer que la Silicon Valley a fait augmenter la richesse réelle du pays grâce à ses multiples services et innovations.
Les sociétés spécialisées dans les réseaux sociaux, à elles seules, vaudraient 500 milliards de dollars parait-il, preuve qu’elles rapportent énormément de richesse dans le monde.
Il est vrai que certaines contribuent à améliorer la productivité du monde. Elles accélèrent la production de la richesse réelle.
Mais même les innovations rentables peuvent aussi bien détruire de la richesse qu’en créer. Le crack et la télévision, par exemple, ont probablement coûté des milliers de milliards de dollars au pays, en termes de production réelle. Quant à Facebook et Snapchat, sont-ils très différents ?
Comme dans les autres secteurs des services, l’argent passe d’une personne à l’autre. Mais est-ce que l’on crée de la richesse ? Ou est-ce qu’on la détruit ?
Regardez les smartphones, tablettes et ordinateurs portables de vos enfants. Dites-nous ce que vous y voyez. Des idioties, de l’oisiveté, de l’insipidité : la plupart de ce que l’on trouve sur les réseaux sociaux est une perte de temps.
Et quid d’internet ? Ce n’était qu’une illusion perdue, aussi, au bout du compte ?
Peut-être.
Depuis l’avènement d’internet, les taux de croissance de l’économie ont été divisés par deux, à peu près. Et le revenu moyen des ménages américains a chuté de 20% en tenant compte de l’inflation réelle, et non des chiffres bidons du gouvernement.
« Services », tu parles !
7 commentaires
Sur L’illusion d’une économie de services
Très bon article ! Mais il y a un aspect manquant: l’étalement de la richesse.
En fait mêm si , à première vue, l’économie de services ne produit rien de « réel », elle permet de déplacer l’argent des poches de ceux qui en possèdent vers celles de ceux qui en ont moins. Ce qui, in fine, permet à ces derniers d’augmenter leur niveau de consommation de produits « réels », donc finalement avoir une incidence réelle sur l’économie en général.
M. Bonner:
Quel plaisir de lire un philosophe, doublé d’un économiste non conventionnel ! Le sens commun est souvent ennemi du Bon Sens car facile à manipuler par les parasites.
Oui ! Un service n’est rentable que s’il procède de « destructions créatrices » . Ainsi internet apporte au PIB en détruisant des emplois à la Poste. Un logiciel de co-voiturage, détruit des emplois de transports ( de taxis par ex). Un emploi d’entretien de jardins supprimera des achats de matériel de jardinage ….Notre économie de « services » (80% du PIB je crois) ne peut que faire diminuer le PIB. A moins de rémunérer de plus en plus ces services au delà de leur seuil de rentabilité (ce qui sera le cas tôt ou tard)
D’autre part, cette économie est liée à un choix politique: la mondialisation. Le marchand a pris le pas sur le producteur. Pourquoi produire ici ce que je peux produire ailleurs pour moins cher grâce à des manipulations monétaires ?
Si ma monnaie est forte, j’augmente mes bénéfices en installant mes usines ultra modernes dans des pays à monnaie faible. Je remplace ainsi des producteurs locaux difficiles à gérer, par des commerciaux interchangeables.
Enfin, tous ces bouleversements sociaux seront plus faciles, s’ils s’accompagnent d’une promotion des femmes qui justement plébiscitent ces « services ».
Voilà le tableau de nos sociétés occidentales: féminisation des emplois par les « services » + mondialisation + manipulations monétaires.
Tout est lié et hyper profitable pour celles et ceux qui initient le processus.
A COURT TERME !
Car bientôt, les pays producteurs (la Chine …) détiendront les commandes, leurs monnaies deviendron fortes et les pays de services devront dévaluer. Et tout s’inversera. Inéluctablement.
Ce fut déjà le cas à maintes reprises dans le passé. (Florence au 15ième siècle, Angleterre au 19 ième …).
Le crédit gratuit et la dette en sont le signe. Comme le noble ruiné qui maintenait son statut à la cour du roi et qui ne laissait à ses héritiers que des dettes, car de son vivant il était « too big to fail »
Même raisonnement que les physiocrate qui pensait que seul l’agriculture était productrice de richesses (en schématisant). En réalité la production n’est rien d’autre qu’une forme de service différé. Les biens manufacturés n’ont qu’une durée limitée. De plus le fait de se rendre mutuellement service nous permet de nous spécialiser dans notre meilleurs domaine de compétence, et donc d’augmenter le niveau global de productivité. Infine l’industrie toute entière sera automatisée et l’économie reposera entièrement sur les services.
Sébastien: J’ai apprécié vos critiques. Oui, toute production est une forme de service et chaque corps de métier se spécialise pour être le plus performant possible. Oui, peut-être qu’un jour toute l’industrie sera robotisée… Cependant, je persiste à voir une différence entre production et services. Pour produire il faut des matières premières, transformées par un savoir faire. Tout cela est lié à un territoire et sa population.
Prenons l’exemple du charbon et du fer européens. L’Europe ne fut jamais aussi prospère et puissante que lorsqu’elle tirait ces ressources de son sol. Bien sûr, le commerce peut procurer ces matières premières à moindre coût à l’étranger (grâce aux différences monétaires). Mais il y a un danger.
Tôt ou tard, le savoir faire se répandra dans les pays producteurs, à moindre coût. Les pays qui perdent la production et ne conservent que les services (ex : la recherche) finissent par perdre aussi les services liés à cette production, puis d’autres services devenus trop coûteux. Florence perdit ainsi ses métiers de la laine et des draps au profit des Pays-Bas au 15 ième siècle.
Une politique économique digne de ce nom doit envisager l’avenir lointain. Ce n’est plus le cas en Occident depuis les années 1960/70, quand nos dirigeants choisirent la consommation et les services au détriment des producteurs. Ces choix commencent à montrer leurs conséquences négatives. De plus en plus cruelles sur le long terme.
Sans producteurs, une économie se meurt.
Oui notre économie française et une grande partie de nos économies européennes, sont complétement déconnectées de l’économie physique ! En effet, les services ne sont que ponctions de richesses !
Mais actuellement, les plus gros transferts de richesses par l’économie de services, se font par les maisons de retraite et les retraités ! Les retraités dépensent leurs patrimoines et leurs rentes en services : maisons de retraite, restaurant, voyages etc
@bga80
Et donc vous souhaiteriez que les retraités se contentent de s’assoir paisiblement dans un coin et d’attendre que la mort vienne les cueillir?
Euthanasie pour tous??
@ DirtyHarry
Ce n’est pas ça, c’est le fait que ça ne créée pas de richesses, disons que les maisons de retraites sont un service nécessaire pour prendre en charge des personnes âgées, MAIS ce n’est pas ça qui prépare l’avenir pour les futures générations et ce n’est pas ça qui assure la pérennité d’un pays !