Si nous vieillissons mieux, nous n’échappons pas pour autant aux maux de l’âge. Défauts visuels ou auditifs, ostéoporose, affections de la prostate et incontinence… Ces maladies sont de vraies mines d’or pour les laboratoires pharmaceutiques, d’autant plus que, mécaniquement, à mesure que le contingent des seniors s’accroît, leurs bénéfices progressent également. Ces sociétés ont toute leur place dans un portefeuille anti-âge.
La cataracte touche 30% des plus de 70 ans. La correction de ce défaut de l’oeil est même l’acte chirurgical le plus pratiqué au monde, avec plus de sept millions d’opérations par an. La croissance du marché des produits liés à cette dégénérescence est de 4% à 10%, selon Carl Zeiss Meditec (AFX), spécialiste allemand des équipements ophtalmologiques. L’autre leader est l’américain Alcon (ACL), dont les lentilles intraoculaires ont fait la renommée depuis 1994. D’une manière générale, la chirurgie de l’oeil est un "secteur peu affecté par les ralentissements économiques", selon Carl Zeiss Meditec.
"En temps de crise, résiste ce qui est vital, d’autant plus lorsque c’est remboursé par la Sécurité sociale", ajoute le gérant à la Financière de Champlain. En revanche, l’appareillage de confort, prothèses auditives ou dentaires par exemple, cher, est boudé, comme en témoigne la moins bonne santé du spécialiste de l’audition, Audika (ADI).
Avec l’âge, le principal souci des femmes est l’ostéoporose. En Europe, en 2012, 70 millions de personnes seront concernées par ce mal. Le marché mondial du traitement de cette fragilité osseuse est estimé à 8,7 milliards de dollars en 2018, selon une étude américaine. Les grands laboratoires se sont lancés dans une course à l’innovation. Le blockbuster de Merck & Co, dont les ventes ont atteint trois milliards de dollars en 2007, subit la concurrence de copies génériques moins chères et devra affronter le Denosumab. La firme de biotechnologie américaine Amgen (AMGN), à l’origine de ce nouveau traitement, vient de s’allier à la puissance commerciale d’un autre géant pharmaceutique, GlaxoSmithKline. Ventes visées : deux milliards de dollars d’ici 10 ans.
Le mal des hommes, ce sont les affections de la prostate. Une petite biotech française, Hybrigenics (ALHYG), issue de l’Institut Pasteur, est en pointe avec son traitement en développement, l’inécalcitol.
Enfin, l’incontinence affecte 5% à 7% de la population totale, explique le papetier suédois SCA (SCA B), fabricant des couches Tena, mondialement connues. Au deuxième trimestre 2009, les ventes de ce type de produits ont augmenté de 16% en un an. Malgré ces soucis de santé, les seniors veulent rester chez eux le plus longtemps possible. D’ailleurs, les pouvoirs publics encouragent le maintien à domicile, notamment via le développement subventionné des services à la personne ou des aides financières spécifiques. La raison : cela revient en moyenne trois à dix fois moins cher que l’hospitalisation.
S’est donc développé tout un créneau d’appareillages médico-techniques, du lit médicalisé au déambulateur en passant par des installations plus lourdes comme des équipements de chimiothérapie ou d’assistance respiratoire, et de produits de nutrition-perfusion. Ce marché pèserait plus de 4 milliards d’euros en France. Les spécialistes français sont des groupes de taille modeste : Bastide Le Confort médical (BLC) et LVL Médical Groupe (LVL), pour ne citer que les sociétés cotées.
Air liquide (AI), avec ses enseignes VitalAire et Orkyn’, est bien connu pour ses prestations d’assistance respiratoire. D’ailleurs, le géant industriel peut remercier son pôle de gaz et services liés à la santé, le seul dont le chiffre d’affaires a progressé au premier semestre, dopé par les soins à domicile en Europe. D’autres grands groupes se sont également placés sur le créneau grâce à des acquisitions, comme Philips, qui vise les patients atteints de difficultés respiratoires dans leur sommeil.
L’avancée en âge implique une plus grande dépendance, c’est-à-dire des besoins élevés d’assistance pour les actes essentiels de la vie quotidienne et des soins médicaux de plus en plus poussés, que seules des structures spécialisées peuvent offrir. Mais les places sont chères : "Seulement 20% des personnes âgées de plus de 80 ans sont prises en charge dans des établissements spécialisés", constate Barthélemy Renaudin.
Or le taux de dépendance est de 30% pour les plus de 80 ans, de 50% pour les plus de 85 ans, l’âge moyen des résidents de maisons de retraite. Les Français concernés se compteront en millions en 2015. A cela s’ajoute la nécessité d’une prise en charge spécifique pour les personnes atteintes de maladies neurodégénératives, comme Alzheimer. Dans les établissements Le Noble Age (LNA), les places prévues dans chaque structure sont prises d’assaut. Le plan Alzheimer, annoncé en fanfare l’an dernier, ne démarre que lentement, malgré l’évidence des besoins.
Le financement de la dépendance est hautement politique. Le gouvernement français voudrait créer un "cinquième risque", afin d’en assurer la prise en charge financière, au même titre que la maladie, le chômage, les accidents du travail et la famille. D’une manière générale, toute remise en question du système de santé est délicate, comme en témoigne l’actualité américaine.
Public ou privé, voilà l’autre aspect du débat. "Sur les 2 800 établissements de santé français [Ndlr : hors Ehpad, établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes], 1 850 seraient du domaine privé, avec, d’un côté, de grands exploitants tels que la Générale de santé, Medica, Korian, Vitalia, Orpea, Domus Vie, etc. — par ailleurs actifs sur le parc des maisons de retraite médicalisées — et, de l’autre, de petites structures indépendantes", écrivait en février dernier L’Agefi.
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