Je crois qu’il est temps, cher lecteur, de faire le point sur ce qui s’est passé sur les marchés boursiers ces dernières semaines. Puisque nous avons maintenant le recul nécessaire, nous le ferons donc dans le calme et la sérénité pour pouvoir en tirer les conséquences immédiates et tenter surtout d’évaluer le futur — seule chose qui, finalement, nous intéresse.
Les causes de la tempête
A mon avis, vous ne deviez pas, comme beaucoup d’opérateurs, suivre assidûment la Bourse de Shanghai. Moi non plus, car j’avoue que j’ai toujours estimé que son influence sur les marchés mondiaux était encore limitée — et je ne change pas d’opinion pour le moment : c’est encore et toujours la Bourse américaine qui donne la tendance. Que s’est-il passé concrètement ?
En fait, une baisse significative à Shanghai (-9%) — mais pas non plus catastrophique — a provoqué, par sa brutalité, une onde de choc "asiatique" qui s’est produite au moment où Wall Street et les autres places mondiales enregistraient un recul. Il s’agit donc au départ plus d’une coïncidence qu’autre chose.
La bourse asiatique avait plus que doublé (+130%) en 2006, sans que les médias en fassent leur Une et que la communauté financière ne pousse de hauts cris. Qu’une forte prise de bénéfices ait eu lieu n’a rien d’anormal : ce ne sont ni les premières ni les dernières, je vous le dis tout de suite !
Penser que la Bourse de Shanghai puisse à l’heure actuelle avoir une influence telle qu’elle déstabiliserait l’ensemble des places du monde occidental relève de l’exagération, voire du fantasme : il n’y a aucun lien mécanique ou psychologique, comme le précise un responsable d’une grande banque française implantée à Shanghai justement.
La volatilité du marché chinois en particulier, et des marchés asiatiques en général, a toujours été très élevée — bien plus que ce que nous connaissons sur les grandes places européennes ou américaines et qui pose problème aux investisseurs occidentaux. Ne soyez pas inquiet pour la Chine : les résultats des entreprises y sont très bons actuellement, grâce à une bonne productivité et un taux de croissance du PIB pour 2007 estimé à 9,5%.
Le trou d’air chez nous a été certes marqué, mais ce ne fut pas un abîme de désolation. Les grandes valeurs du CAC 40 sont restées relativement calmes. Il est vrai que leur valorisation n’était pas excessive, que leurs résultats étaient excellents et que leur avenir semble rassurant. Enfin, ayez toujours à l’esprit que l’environnement économique, boursier et financier est instable par nature et que les changements rapides y sont courants depuis un certain temps.
Quels risques planent sur nos marchés ?
Les indices boursiers se sont d’abord nettement repliés pour connaître ensuite un petit rebond… mais qui n’a pas été à la hauteur des espérances. Les inquiétudes ont vite repris le dessus et une nouvelle vague de baisse se profile à l’horizon US — donc chez nous par mimétisme. Il faut reconnaître que le taux de défaillance des prêts hypothécaires aux Etats-Unis n’a jamais été aussi élevé depuis quatre ans. Les investisseurs redoutent alors que les grandes banques en subissent les conséquences et que l’économie tout entière en pâtisse.
Ce qui est certain c’est qu’à court terme, tant que l’on ne connaîtra pas l’ampleur des dégâts, les risques de baisse sont grands chez nos amis américains. D’autant que les craintes sur l’inflation — sans être fortes –, n’en demeurent pas moins un sujet de sourde inquiétude permanent. Dans ce climat d’où la visibilité est absente, les pires excès peuvent être commis. N’oubliez pas que l’économie américaine est un des moteurs de la croissance mondiale. Si elle venait à ne plus tourner rond, c’est là que les impacts sur les places mondiales seraient énormes. Imaginez alors ce qui en résulterait. Une baisse peut donc toujours en cacher une autre…
Où va le CAC 40 ?
J’imagine sans peine que c’est une question que vous devez vous poser, à juste titre. Notre indice CAC 40 est passé brièvement sous les 5 300 points il y a peu. C’est un support important, dont je vous parle depuis longtemps. Une fois enfoncé il nous entraînerait bien plus bas — d’où mon attention particulière à son sujet. Il ne s’agit pas de paniquer mais de regarder les faits et leurs conséquences sur les graphiques. Une pause, après une belle hausse quasi continue de sept mois, est inévitable. L’enjeu est de savoir si ce n’est qu’une pause de durée limitée, salutaire, qui permet d’assainir le marché… ou si elle peut se transformer en signal de changement de tendance.
Pour ma part et compte tenu de ce que nous savons, les 5 300 points peuvent se révéler solides en tant que premier obstacle à la baisse, mais une rupture des 5 270 points nous amènerait d’après moi sur les 5 140 points.
Besoin d’assurance
Bien sûr, je peux me tromper, mais il faudrait alors un changement important aux USA et une avancée de la croissance mondiale suffisante pour rassurer les marchés, ce qui nous permettrait alors de revenir sur les 5 800 points, voire plus. Mais une chose est sûre : les investisseurs ne repartiront pas à l’assaut des sommets sans quelques solides assurances. Ce qui manque à présent à notre marché ce sont des fondamentaux — les résultats des sociétés étant connus — et quelques nouvelles rassurantes sur l’évolution des prix en regard de la croissance économique qui, si elle ralentissait dans le même temps, provoquerait un tsunami.
En attendant, les liquidités disponibles sont abondantes ce qui, ajouté à quelques projets de fusion, est propre à limiter de futures baisses — mais dans quelles proportions ? Je vais me répéter mais lorsque l’on investit, il faut le faire dans des sociétés solides, capables de résister aux coups de tabac de l’océan boursier, ou dans des secteurs non corrélés directement avec les places internationales. Dans ces temps tourmentés, la diversification s’impose.
Perspectives de plus long terme
Il ne faut pas déduire de ce qui précède que le long terme sera marqué par la tendance actuelle. A long terme, les marchés conservent de belles perspectives qui n’ont aucune raison d’être remises en question. Un certain nombre de valeurs du CAC 40 ont justement des prévisions à l’horizon 2010/2012 qui, si elles de réalisent, feront ressortir la faiblesse des cours d’aujourd’hui. Vous entendrez alors autour de vous les investisseurs murmurer "si j’avais su… !"
Ne soyez dans cette catégorie ; vous savez ce que je pense des regrets. Quand je vous recommande un titre c’est que j’ai confiance, et cette dernière n’est pas donnée pour trois ou six mois seulement. Si je vous conseille de vendre en cours de route, c’est que j’estime que prendre ses gains est plus raisonnable que d’attendre six mois encore pour grappiller quelques pourcents — au risque d’en perdre aussi.
Dites-vous bien que la bourse c’est avant tout du pragmatisme et du bon sens et ce quelque que soit l’horizon de placement. Mais à Vos Finances – La Lettre du Patrimoine, nous avons pris le parti du moyen/long terme car un patrimoine se constitue à l’aide de placements solides et sains : il faut se donner le maximum de chances, donc du temps, pour atteindre l’objectif fixé.
L’impatience est mauvaise conseillère ; bien des opérateurs boursiers (chevronnés) vous le diront. Je vous le dis aussi.