** Allez, cher lecteur, sacrifions à la tradition… et faisons un petit tour d’horizon des prévisions de nos rédacteurs pour l’année 2009 — en gardant en tête les déclarations de Bill hier : "le problème, c’est que nous ne savons rien. En dehors de ce que nous voyons et entendons directement, ce ne sont qu’hypothèses, déductions et conjecture".
Voici donc les "hypothèses, déductions et conjecture" de quelques-uns de vos correspondants, à commencer par Frédéric Laurent, de Vos Finances – La Lettre du Patrimoine.
"Je suis convaincu que nous n’avons pas fini de voir les indices décrocher, jouer au yo-yo avec une volatilité féroce", estime-t-il. "Il faut reconnaître que le climat est loin d’être propice aux actions, les investisseurs fuyant le risque et n’ayant plus aucune confiance dans les marchés. En plus, après une année sinistre sur le plan boursier, la nouvelle année risque d’être compliquée (et c’est un euphémisme) sur le plan social. Il faut remonter presqu’un siècle en arrière pour voir des usines automobiles fermer pour quatre semaines consécutives. C’est dire si la machine économique s’est arrêtée brutalement. Dans ces conditions, la perspective de voir l’indice CAC 40 évoluer entre 2 300 points et 4 000 points me paraît tout à fait envisageable. Un point bas devrait être touché au cours du premier semestre 2009. Cela devrait vous donner l’opportunité de revenir sur les marchés actions dans d’excellentes conditions. Rappelez-vous : c’est quand tout le monde déserte qu’il faut acheter ! Mais pas inconsciemment. Attendons encore un peu d’avoir touché le fond — ou du moins ce que nous estimons être le fond".
"Toutefois, il faudra rester extrêmement vigilant sur le choix des valeurs, l’endettement de certaines sociétés présentant bien des risques pour l’année à venir, le remboursement de leurs échéances et la reconduction de leurs covenants en matière de crédit étant sujet à de grosses frictions".
"Autre avantage de la crise, pour nous, investisseur, va être la difficulté des entreprises à trouver des capitaux", continue Frédéric. "Comme je vous l’expliquais dans ma dernière lettre, les investisseurs détenant des liquidités et des prêts à les investir seront choyés. Beaucoup de sociétés devraient distribuer des dividendes importants avec des rendements bien supérieurs aux rendements des obligations d’Etat. Comptez sur moi pour vous aider à trouver les sociétés présentant le meilleur rapport risque/rendement, avec d’alléchants dividendes, mais capables de continuer à les payer sans risque de faillite !"
** Dans Défis & Profits, Jean-Claude Périvier se montre plus optimiste (mais avec prudence !) :
"L’année 2008 qui s’achève aura été vraiment extraordinaire. Les dégâts sont nombreux, les sociétés touchées aussi, les portefeuilles écornés encore plus. Le vôtre aussi ? A bien y réfléchir, il était improbable de traverser une telle période sans en subir quelques conséquences. […] La raclée a été sévère si l’on regarde les choses de manière instantanée. Surtout pour ceux qui ont oublié qu’un portefeuille d’actions est un investissement sur le long terme, un pari sur le développement économique du monde auquel vous participez en votre qualité d’actionnaire".
"Détenir un portefeuille peut se limiter parfois à boursicoter, agioter, jouer la volatilité sur le court terme. Mais détenir un portefeuille, dans mon esprit, c’est investir son argent. Investir, c’est avoir des convictions sur des pays, sur des secteurs, sur des entreprises. C’est chercher celles qui ont un bilan solide, une trésorerie confortable, aussi peu de dettes que possible, un management efficace et expérimenté ; c’est chercher des actions dont le cours ne demande qu’à exploser. L’angle d’investissement de Défis & Profits est de trouver des compagnies nichées sur des besoins forts, incompressibles et inaltérables dans le futur, quel que soit celui-ci".
"Certaines valeurs sont incroyablement dégriffées pour un bon moment. Si vous pouvez accepter de geler votre argent sur ces valeurs pendant ce laps de temps, alors ces sociétés vous offriront des profits significatifs lors du rebond. Car un marché haussier va succéder au marché baissier. Les Bourses anticipent les sorties de crises six à dix mois avant la sortie réelle de l’économie. Cela s’est vérifié à chaque récession. Et comme les récessions durent de six mois à deux ans et que nous sommes entrés en récession ‘réellement’ il y a bientôt six mois, il n’est pas irréaliste d’anticiper une fin de récession au bout de l’année prochaine, avec une marge d’erreur bien entendu".
"Dès lors, les Bourses américaines pourraient repartir de l’avant au deuxième trimestre 2009, ce qui correspondrait à la montée en puissance de la nouvelle administration de Barack Obama, et l’Europe suivrait avec quelques mois de décalage. A condition qu’il ne se produise pas de nouveau drame financier, ou de tragédie géopolitique. Vous pensez sans doute comme moi : il est peut-être temps de monter à bord du train, car il pourrait ne pas tarder à partir. Les révisions à la baisse des perspectives des entreprises sont en réalité déjà dans les cours, marqués par des excès irrationnels, valorisant parfois des entreprises bien en-dessous de la situation nette de la société. Les rendements des dividendes deviennent alors incroyablement élevés. Cette situation ne durera pas. Tout en conservant une prudence proportionnelle à l’incertitude qui règne, je pense qu’il ne faut pas laisser passer les bonnes affaires qui s’étalent sous vos yeux".
** Quant à Simone Wapler, rédactrice en chef de MoneyWeek mais également de L’Investisseur Or & Matières, elle sacrifie à une autre tradition de la nouvelle année… celle des bonnes résolutions :
"Je vous suggère une bonne résolution pour 2009, et s’il n’y en avait qu’une seule, je ne vous suggérerai que celle-là : n’achetez que ce qui monte. Ah oui, allez-vous me dire, le bon conseil : rien ne monte !"
"Faux, absolument, faux. Il y a toujours quelque chose qui monte, même dans les plus vilains marchés. Mais c’est beaucoup plus difficile à trouver".
"Et puis tenez, si vous êtes vraiment paresseux, prenez des fonds bears, ces fonds qui répliquent l’inverse d’une performance. Comme tout baisse et que ce n’est probablement pas fini, vous n’aurez pas beaucoup de chances de vous tromper".
Vous voyez… surmonter la crise, ce n’est pas si compliqué !
Meilleures salutations,
Françoise Garteiser
La Chronique Agora