La Chronique Agora

Si l’économie a besoin d’une remise à zéro…

Pourquoi vouloir toujours empêcher l’économie de suivre son cours ? Ne vaudrait-il pas mieux la laisser faire son travail, plutôt que tenter de freiner et d’entraver les mouvements de correction ?

Toujours pas d’accord formel sur un plan d’aide et de relance aux Etats-Unis. Les démocrates trouvent qu’on n’en fait pas assez, les républicains trouvent qu’on en fait trop.

Un compromis a été trouvé : l’extension des mesures de financement actuelles pendant une semaine, le temps que tout ce beau monde accorde ses violons.

Mais attendez… le gouvernement US est ruiné… et déjà en bonne voie pour un déficit de 2 000 Mds$ sur l’année fiscale 2021. Ses poches sont vides. Son compte en banque est à découvert. Il a déjà retourné les coussins du canapé : c’est le désert.

Comment pourrait-il alors aider des gens dans le besoin ?

On fait le mort

Ce n’est là qu’une seule question…

« Pourquoi devrait-il aider les gens ? » en est une autre. Pourquoi penser que distribuer de la fausse monnaie pour compenser une vraie crise est une bonne idée ? Ou même distribuer du véritable argent, d’ailleurs ?

Si l’économie a besoin d’une remise à zéro… d’une récession pour corriger les prix des actifs et nettoyer les mauvais investissements et les entreprises en perdition… pourquoi s’y opposer ?

Pourquoi le taux de chômage devrait-il être inférieur à 5% et non supérieur à 10% ? Pourquoi le Dow devrait-il être proche des 30 000… plutôt que des 15 000 ?

Pourquoi ne pas laisser les choses simplement suivre leur cours, en d’autres termes ?

Qu’en dit la science ?

En 1919-1920, la grippe espagnole a tué 675 000 Américains. C’est bien pire que le coronavirus ; proportionnellement, ce serait l’équivalent d’1,8 million de décès aujourd’hui. Suite à quoi l’économie est entrée en dépression.

Le gouvernement est-il passé immédiatement à l’action ?

Pas du tout. Il a fait le mort : pas de gros déficits. Pas d’assouplissement quantitatif (QE). Pas de renflouages. Pas de chèques expédiés aux citoyens.

Le chômage a grimpé à 8,7% en 1921, selon l’économiste Christina Romer. Pourtant, l’administration Harding, selon les critères actuels, n’a rien fait.

Elle a même fait pire que rien. Au lieu de relancer l’économie, on pourrait dire qu’elle l’a étouffée… en réduisant les dépenses et en accumulant un excédent budgétaire.

Oh, les affreux sans-cœurs !

Destruction créatrice

Comment les économistes de 1921 savaient-ils ce que le taux de chômage devrait être ? Comment les économistes actuels en savent plus ?

Après tout, le capitalisme fonctionne en détruisant sans remords des emplois… de sorte que les travailleurs sont disponibles pour de nouvelles compétences, de nouvelles entreprises et de nouveaux secteurs.

Si le taux de chômage était à zéro, le progrès s’arrêterait.

Or le progrès, c’est exactement ce qui a eu lieu après 1921 – sans l’aide (ou les entraves) des autorités. Selon Christina Romer, en 1923, le taux de chômage US était de retour sous les 5%.

Selon les chercheurs économiques actuels, lorsqu’une économie tourne de l’œil, les autorités doivent avoir « le courage d’agir », pour reprendre l’expression hagiographique de Ben Bernanke. Ils doivent fournir les sels dont les marchés manquent.

Sinon… eh bien… sinon quoi ?

Nous n’en savons rien nous non plus.

Une terrible erreur

L’économie n’est pas une vraie science. C’est principalement du charlatanisme mêlé de fraude.

Ceux qui la pratiquent sont diplômés, cependant. Au XXème siècle, ils ont essayé de surclasser leur discipline, la faisant passer d’une sous-catégorie de la philosophie morale – ne dépensez pas plus que vous ne gagnez ! – à une pseudo-science avec des chiffres… des formules… des sigmas… des alphas… et aussi des deltas.

Nous avons vu hier que la science fondatrice du système monétaire actuel – le monétarisme – était une terrible erreur. Elle n’avait pas pris la mesure de l’importance de l’étalon-or traditionnel. Elle pensait pouvoir faire mieux avec l’étalon de la Réserve fédérale.

Mais tandis que le dollar US de 1913 (année de création de la Fed) valait tout autant que le dollar de 1971 (lorsque l’étalon-dollar a été créé), le dollar de 2020 ne vaut, en termes relatifs, que trois cents environ.

Pourquoi ?

Parce que lors d’une crise, la tentation d’« imprimer » plus d’argent est toujours irrésistible. Le bilan de la Fed – une mesure de l’ampleur de l’impression monétaire – n’était que de 6% du PIB US en 2008. A fin 2021, il sera probablement proche des 50%.

Qu’en dit la science ?

Selon la Fed, les Etats-Unis devraient avoir une cible d’inflation à 2%. Pas 1%, pas 10%. Qu’en dit la science ?

Elle dit que les taux d’intérêts doivent être aux alentours de zéro… ou moins. D’où est-ce que ça sort ?

Les autorités pensent devoir lutter contre la récession avec plus de cash et de crédit – allant même jusqu’à distribuer des chèques de 1 200 $ à des millions d’Américains, dont la majorité travaillaient et touchaient encore des salaires. Quoi ? Quelle science leur dit d’agir ainsi ?

Une question de vie ou de mort

Notez que lorsque nous parlons de « science », nous ne parlons pas d’ingénierie. L’ingénierie appliquée et pratique absorbe les leçons du passé… et, tout en innovant et en expérimentant, revient toujours à ce qui fonctionne.

Les constructeurs de ponts romains, par exemple, ont construit des ouvrages que l’on utilise encore 2 000 ans plus tard – comme le Pons Fabricius à Rome. Pour démontrer sa confiance, l’architecte se tenait sous ses arches tandis qu’on démontait les échafaudages.

Cela avait deux utilités : concentrer l’attention de l’architecte sur ce qui serait, pour lui, une question de vie ou de mort… et éliminer les incompétents aussi bien du patrimoine professionnel… que du patrimoine génétique.

Si seulement nous avions un Pons Fabricius pour les ingénieurs financiers ! Quelle joie ce serait de les voir tous rassemblés sous une immense arcade.

Mme Yellen qui, il y a seulement trois ans, promettait que nous ne verrions plus de crises financières « de notre vivant » – à coup sûr, elle serait là.

Et M. Bernanke.

Nous y trouverions aussi Steven Mnuchin, ce charlatan… ainsi que Paul Krugman… Joseph Stiglitz… Jeffrey Sachs… et de nombreux autres.

Quelle superbe opportunité ! Vite… démontez les échafaudages !

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