La Chronique Agora

Mangeons les riches !

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Le contrat social est en train de céder… et dans un système corrompu, les élites ont recours aux mêmes vieilles méthodes pour préserver leur statut : elles préparent couteaux et fourchettes.

La foule, lors d’un récent meeting politique pour Elizabeth Warren, s’est spontanément mise à scander : « mangeons les riches… mangeons les riches… »

C’est partout sur les réseaux sociaux. On peut même trouver des recettes sur Twitter. L’une d’entre elles, par exemple, recommande de « mijoter 100 000 £ en cash dans le sang extrait de la carcasse. Servir sur un lit de roquette, avec un peu de coleslaw« .

A la mode 

En ce qui nous concerne, nous évitons les foules, les modes passagères et les sottises. Par réflexe aussi bien que par réflexion, nous allons donc éviter la doctrine « manger les riches ».

Par ailleurs, nous n’aimons pas la roquette. Trop frisée. Trop aérienne. Nous préférons le croquant frais de la laitue iceberg ou de la romaine.

Mais les goûts changent. On peut désormais acheter des assiettes peintes avec les mots « Mangeons les Riches ». Des groupes sortent des albums « Mangeons-les-riches ». Et bien entendu, des t-shirts « Mangeons les riches » font fureur dans certains cercles.

Le contrat social – les principes généralement acceptés qui lient les riches et les pauvres ensemble – est en train de céder.

La détresse des « non-riches »

Pourquoi pas, après tout ? Le système est corrompu. Quelques personnes deviennent plus riches que jamais, tandis que la majorité des gens – même avec la technologie du XXIème siècle à disposition – prennent du retard.

En termes qui nous sont familiers, à La Chronique Agora, l’intellectuel de gauche Chris Hedges décrit la détresse de nombre de « non-riches » aux Etats-Unis :

« Quelque 41,7 millions de travailleurs, soit un tiers de la main-d’oeuvre [américaine], gagnent moins de 12 $ l’heure, et la plupart d’entre eux n’ont pas accès à une assurance santé financée par l’employeur. Une décennie après l’effondrement financier de 2008, écrivait le Times, la valeur nette d’une famille de la classe moyenne est plus de 40 000 $ inférieure à ce qu’elle était en 2007. La valeur nette des familles noires a chuté de 40%, et pour les familles latino, ce chiffre a chuté de 46%. 

Quelque quatre millions d’expulsions sont déposées chaque année. Un ménage locataire sur quatre dépense environ la moitié de ses revenus avant impôts en salaire. Toutes les nuits, 200 000 personnes environ dorment dans leur voiture, dans la rue ou sous un pont. Ces chiffres douloureux représentent la belle époque que Biden et les dirigeants du parti démocrate promettent de restaurer. 

A présent, alors que le chômage réel frôle probablement les 20% – le chiffre officiel de 10% exclut les personnes en chômage technique ou celles qui ont arrêté de chercher du travail – 40 millions de personnes environ risquent l’expulsion d’ici à la fin de l’année. On estime que 27 millions de personnes devraient perdre leur assurance santé. Les banques accumulent des réserves de cash pour affronter la vague prévue de faillites et de défauts de paiement sur les prêts immobiliers, prêts étudiants, prêts automobiles, prêts personnels et dette sur carte de crédit. » 

Le contraire du capitalisme

  1. Hedges pense décrire l’échec du capitalisme. Mais ce ne sont pas les capitalistes qui ont mis les taux d’intérêt proches du zéro… qui ont gonflé le marché boursier… qui ont transféré des milliers de milliards de dollars à leurs clients favoris… ou qui ont imprimé de la fausse monnaie.

Non… ce n’était pas du capitalisme. C’était le contraire du capitalisme. C’était de la politique… où on s’enrichit non pas en améliorant le sort des autres… mais en l’empirant.

Le vrai capitalisme produit de la richesse réelle en exigeant des gens qu’ils fournissent aux autres de vrais biens et services pour gagner leur argent.

La politique se contente de « transférer » la richesse d’un groupe à un autre… soit par la taxation, soit par l’impression monétaire. Certains finissent plus riches ; la majeure partie sont plus pauvres.

Après que le système monétaire a été modifié en 1971, les démocrates et les républicains se sont entendus pour truquer la partie, en faveur des élites des deux partis.

Durant le demi-siècle qui a suivi, ils ont « transféré » des milliers de milliards de dollars vers le complexe financier/militaire/industriel/médical/Etat-providence/prison – et vers « les riches » d’une manière générale.

Problème résolu !

Les inégalités, l’injustice, la corruption et la malhonnêteté du système pourraient facilement être effacées. Ce serait une question d’heures.

Il suffirait de revenir à un système de monnaie honnête, sans aucun bricolage de la part des autorités.

Les actions s’effondreraient, perdant plus de la moitié de leur valeur actuelle. Les obligations aussi imploseraient. Le marigot se viderait soudain. Les distributions gratuites prendraient fin.

Hop ! Problème résolu.

Au menu ce soir…

Evidemment, il y aurait aussi une dépression ; l’économie mettrait du temps à s’adapter. Il y aurait aussi des grimaces, les gens réalisant qu’ils doivent désormais gagner leur argent honnêtement.

Fini, les guerres impossibles à gagner… les gabegies infinies… Terminé, les primes de 600 $ par semaine pour ne pas travailler… Fini aussi, les renflouages pour l’industrie financière… et les déficits à 4 000 milliards de dollars…

C’est pour cette raison que les élites ne veulent pas vraiment reconnaître ou résoudre le vrai problème. Parce que toute cette fausse monnaie vient rembourrer les luxueux fauteuils dans lesquels les élites – qu’elles soient républicaines ou démocrates – posent leur arrière-train.

C’est aussi pour cela que cette escroquerie ne se terminera pas si Joe Biden et Kamala Harris prennent le relais de Donald Trump et Mike Pence. Même les gauchistes le savent.

Hedges ne comprend peut-être pas comment l’escroquerie fonctionne, mais il sait que « le système » est contrôlé par « les élites régnantes », qui « pillent et se servent de manière éhontée ».

Comme le reste de l’intelligentsia, il ne veut pas réfléchir trop profondément à la manière dont les élites s’y prennent. Il préfère simplement insister pour qu’on fasse quelque chose.

« Manger les riches », par exemple.

Les élites vont donc sortir fourchettes et couteaux, nouer leur serviette sous leur menton… et, au bénéfice des masses affamées…

… mettre « les riches » au menu.

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