Aucune situation n’est si sombre… ou si désespérée… qu’un leadership déterminé à Washington ne puisse l’aggraver.
Oh oh… voici les derniers propos de la technophile Cathie Wood :
« La révolution Reagan s’est prolongée sous l’administration du président Clinton, entraînant une baisse des impôts, une croissance plus forte du PIB et un marché haussier récompensant la gestion active des actions qui a duré près de 20 ans. Nous pensons que ce marché haussier vient juste de commencer à s’étendre. »
Vraiment ?
Donald Trump fait face à une situation économique particulièrement délicate, bien différente de celle qui a précédé Ronald Reagan. Là où Reagan a débuté son mandat avec un taux des fonds fédéraux de 20%, Trump doit composer avec un taux bien plus bas, à 4,5%.
Et lorsque Reagan a examiné les comptes de l’Etat fédéral, la dette nationale s’élevait à 900 milliards de dollars. Aujourd’hui, elle atteint un niveau vertigineux de 36 000 milliards de dollars, avec une progression de plus de 3 milliards de dollars par jour. Quant aux actifs, en 1980, leurs cours étaient en baisse depuis 1966, contrairement à aujourd’hui, ayant été multipliés par 44 au cours des 44 dernières années.
Reagan a également bénéficié du travail d’un véritable combattant de l’inflation à la Fed, Paul Volcker, qui était en mesure de réduire les taux d’intérêt lorsque l’inflation se calmait. Des taux plus bas signifiaient des prix d’actifs plus élevés. Et comme Volcker gagnait la bataille contre l’inflation, les « justiciers obligataires » pouvaient ranger leurs éperons. On n’avait plus besoin d’eux.
Mais aujourd’hui, les prix des actifs sont déjà très élevés et prêts à subir une correction. Et depuis la fin du Grand Boom, en juillet 2020, la Fed ne peut plus soutenir le marché boursier sans connaître de conséquences fâcheuses.
D’abord, comme on le voit depuis septembre, les justiciers obligataires se remettent en selle. La Fed baisse les taux courts… et les taux longs augmentent. Les investisseurs savent à quoi s’en tenir. Ils s’attendent à davantage d’inflation. Et ce n’est pas tout… ils semblent douter de la bonne foi du gouvernement américain lui-même.
Les taux d’intérêt du Trésor américain n’ont jamais été aussi élevés depuis des décennies par rapport aux taux d’intérêt des autres pays.
Non seulement les rendements des obligations du Trésor sont bon marché par rapport aux actions, mais ils sont également bon marché par rapport aux obligations d’entreprises, aux obligations d’autres pays et aux taux de capitalisation de l’immobilier commercial.
En d’autres termes, les obligations du Trésor ont perdu de la valeur par rapport au reste de l’univers des actifs… les actions, les obligations étrangères, les obligations d’entreprises, les obligations de pacotille, l’immobilier, etc.
Ce qui implique que les investisseurs évaluent spécifiquement la solvabilité du papier du gouvernement fédéral.
Deuxièmement, des taux à long terme plus élevés déclenchent des tendances opposées à celles des années Reagan. Au lieu d’une hausse de la valeur des actifs réels, nous devrions assister à une baisse. Au lieu d’un boom économique, nous devrions assister à un effondrement. Et au lieu de financer de petits déficits à des taux d’intérêt en baisse, l’équipe de Trump en financera de gros à des taux réels en hausse.
Aucune situation n’est si sombre… ou si désespérée… qu’un leadership déterminé à Washington ne puisse l’aggraver. Et puisque nous nous intéressons aux scénarios les plus pessimistes, regardons un peu plus loin.
Parmi les risques supplémentaires, l’appel à la mise en place de barrières commerciales figure en bonne place. Les Etats-Unis ne se contentent pas d’importer des produits. Ils en exportent également, pour une valeur de 3 500 milliards de dollars par an. Il ne serait pas surprenant que les pays qui subissent l’augmentation des droits de douane américains mettent en place leurs propres droits de douane. C’est ce qui s’est produit après que Messieurs Smoot et Hawley ont promulgué une loi tarifaire aux Etats-Unis en 1930. Les échanges commerciaux ont diminué et une grande partie du monde a sombré dans la dépression.
Le commerce est ce qui permet à l’économie mondiale de fonctionner. Seuls les pays très pauvres – qui n’ont rien à exporter et pas d’argent pour acheter des produits importés – ne dépendent pas du commerce pour une part substantielle de leur PIB. Les autres ont besoin d’acheter et de vendre… et en dépendent non seulement pour satisfaire leurs besoins quotidiens, mais aussi pour faire face à leurs dettes.
Toute la stupidité de la période du boom et de la bulle, de 1980 à 2024, a été due au rôle des taux d’intérêt. Ils sont passés de deux chiffres – 15% pour un bon du Trésor à 10 ans en 1981 – à l’absence totale de chiffres. Le 3 août 2020, le rendement d’un bon du Trésor à 10 ans ne représentait qu’une fraction de 1%.
Poussés à la baisse par les banques centrales du monde entier, les taux de prêts ultra-bas ont conduit à une surabondance de dette… qui s’élève aujourd’hui à plus de 300 000 milliards de dollars.
Si l’on retire les 25 000 milliards de dollars du commerce international, ou même une petite partie de ceux-ci, il devient beaucoup plus difficile d’honorer les paiements de la dette. Bloomberg analyse les propositions de Trump en matière de droits de douane :
« Sur l’ensemble des biens échangés dans le monde, 20% sont destinés aux Etats-Unis ou en proviennent. Dans notre modèle avec droits de douane, ce chiffre devrait tomber à 9%. »
Nous ne sommes pas sûrs à 100% de ces chiffres, mais cela représente pour l’économie américaine une perte d’environ 10% de son PIB. Et puis… les prêts de toutes sortes ne sont pas remboursés. Les bénéfices des entreprises diminuent. Les banques font faillite.
Bref, en plus de la correction financière massive décrite ci-dessus, nous pourrions connaître une nouvelle dépression mondiale… semblable à celle qui s’est produite dans les années 1930.
C’est un terrible scénario. Mais ce n’est pas le « pire des scénarios ». En d’autres termes, ce ne serait pas la fin du monde.