En matière de politique étrangère, les Etats-Unis se sont considérablement éloignés des principes défendus par les pères fondateurs de la république… et cela fait peser un risque considérable sur leur empire.
Nous sommes en 1991…
Malgré les vantardises de M. Khrouchtchev pendant les décennies précédentes, les Etats-Unis ont enterré l’Union soviétique. Leurs forces sont facilement venues à bout de la quatrième plus grande armée mondiale – celle de l’Irak – en quelques semaines.
L’Amérique se dresse sur la planète entière comme un nouveau colosse… et fait pâlir tous ses rivaux potentiels.
Ses armées commandent aux quatre coins du globe, sa flotte règne sur les sept mers. Pour l’ancien chef d’état-major de l’armée indienne :
« La leçon de l’opération Desert Storm est qu’il ne faut pas s’attaquer aux Etats-Unis sans avoir l’arme nucléaire. »
C’était la Pax Americana… la « fin de l’Histoire ». Le capitalisme américain, la démocratie américaine représentaient le sommet de la civilisation, son zénith, sa perfection.
Mais les dieux sont des êtres jaloux…
Ils seront ravis de remettre à sa place tout mortel qui se croirait plus puissant qu’il n’est. Ils ne tolèrent pas l’orgueil – surtout quand il est mal placé…
Le sale tour des Russes
Le scientifique politique russe Georgi Arbatov avait peut-être deviné leurs viles intentions à la fin de l’ère soviétique. A l’époque, il déclarait – avec une sorte de sourire félin dans le ton – : « Nous allons vous faire la pire des choses que nous puissions vous faire. »
De quoi parlait-il donc ?
« Nous allons faire disparaître votre ennemi. »
Il avait tout à fait raison, c’est à craindre…
Une superpuissance a besoin d’un ennemi autant que la police a besoin de criminels… autant que le psychiatre a besoin de fous… autant que l’Eglise a besoin du diable. Sans ennemi, elle perd toute direction. Plus de vigueur. Plus d’élan vital.
Elle se perd, sans ancrage, sans but et sans gouvernail.
Entre les guerres mondiales, Winston Churchill, guerrier sanguinaire, se lamentait du « ciel insipide de la paix » qui s’étendait alors au-dessus de la Terre.
Ce même ciel insipide de la paix surplombait aussi la Terre à la fin de la guerre froide.
Aujourd’hui, 30 ans plus tard… après l’arrivée de la tempête… après que les dieux ont imposé leur volonté malveillante…
Un autre monde
L’Amérique a fait une nouvelle tentative en Irak – pour libérer le pays de son propre dirigeant et lui présenter Thomas Jefferson. Le résultat pourrait bien être sa plus grosse erreur en matière de politique extérieure – pire encore que le Vietnam.
L’Afghanistan est le cimetière des empires. Les drapeaux sont mis en berne… et les porteurs du cercueil chargent l’Empire américain dans le corbillard.
« Vous, les Américains, vous avez les montres, » disent les talibans. « Mais nous avons le temps. »
C’est bien vrai – ils ont le temps.
Les Américains sont un peuple impatient et impulsif. Ils sont constamment prêts à bondir, toujours à l’affût de la prochaine occasion, toujours en train d’essayer de voir ce qui les attend au-delà de la prochaine colline.
Les Américains ne font donc pas de bons impérialistes. Ils n’ont simplement pas la patience nécessaire.
Ils ont les montres, certes… mais ils n’ont pas le temps.
Les fondateurs des Etats-Unis avaient étudié l’Histoire ; ils connaissaient les pièges des empires…
Combattre les monstres à l’étranger
L’Amérique « ne se rend pas à l’étranger en quête de monstres à détruire », disait John Quincy Adams, le sixième président des Etats-Unis.
Malgré cela, l’ancienne République américaine modeste s’est mise à leurs trousses à la fin du XIXème siècle. Son premier monstre fut la diabolique Espagne.
Depuis, les Etats-Unis naviguent aux quatre vents. Ils ont chassé les monstres pendant les deux guerres mondiales, en Corée, au Vietnam, en Irak (à deux reprises) et en Afghanistan.
Pour chaque ennemi vaincu, un autre se dresse. Hitler a repris le flambeau après le Kaiser. Staline après Hitler. Oussama Ben Laden après Staline.
Peut-être le président Xi prendra-t-il la suite d’Oussama Ben Laden ?
Nous ne le savons pas. Mais si ce n’est pas lui, il y a fort à parier qu’un autre monstre prendra sa place…
Il y a toujours un autre monstre. Puis un autre encore.