A quelques heures de l’allocution présidentielle, la stratégie choisie pour faire oublier les contrariétés actuelles aux Français est celle d’une menace de guerre imminente… De quoi semer la zizanie quelques jours avant les élections européennes.
Cette chronique a été rédigée à quelques heures de l’allocution présidentielle sur les plus grandes chaînes publiques et privées hexagonales. La thématique sera bien entendu le contexte géopolitique et le rôle de la France (qui n’a évidemment fait l’objet d’aucun débat à l’Assemblée, mais qu’importe…).
Alors que la notation de la dette de la France vient d’être dégradée à « AA- » par Standard & Poor’s, nos concitoyens sont submergés de promesses d’austérité budgétaire, de casse des acquis sociaux à perte de vue, de déremboursements de frais médicaux, de captation de leur épargne au profit d’entreprises de l’UE (et non exclusivement nationales) et d’un effort de renforcement de la défense européenne, voire ukrainienne.
Il n’y a pratiquement que du négatif à l’horizon et cela fait beaucoup de contrariétés à faire oublier aux électeurs : cela semble tout bonnement mission impossible !
Une diversion parfaite
Mais heureusement, il restait des euro-atlantistes au fond de la boîte à outils ! Cette vieille ficelle bien connue de toutes les dictatures qui se respectent : brandir la menace d’une guerre imminente avec une puissance hostile (très très méchante) qui rêve de nous envahir.
Le péril, c’est donc Poutine, sur-diabolisé, dont les troupes sont bloquées depuis deux ans à l’est du Dniepr, mais qui ne mettront que deux semaines pour venir défiler sous la Porte de Brandebourg à Berlin, et une semaine de plus pour arriver au pied de l’Arc de Triomphe, bouteille de vodka à la main.
Je n’invente rien : Zelenski vient d’avertir les Philippines qu’une fois que Poutine aura conquis l’Ukraine, ce sera au tour de l’Europe, et puis pourquoi pas d’un pays d’Asie, comme les Philippines (et ses milliers d’îles). Zelensky y était invité ce lundi 3 juin et il a lancé cette mise en garde (lunaire) en présence de son hôte, le président Marcos, qui n’a su quoi lui répondre !
La raison a-t-elle quitté les dirigeants les plus en vue de la planète ?
Je ne parle même pas de ceux qui ont des trous de mémoire, confondent les noms et les époques et ceux qui se perdent en quittant les podiums d’où ils s’adressent à leur nation.
Des dirigeants qui jouent aux chefs de guerre
Tout ce qui relève de la sphère géopolitique semble sortir d’un mauvais film. C’est à qui racontera les plus gros mensonges et les plus grandes absurdités, tandis que la plupart des médias (majoritairement pro-atlantistes) véhiculent toutes ces fake news avec le même aveuglement militant qu’une « Pravda » des années 70.
Comme le disait un humoriste : « Quand les bornes sont franchies, y’a plus d’limite » !
Et ils n’ont effectivement plus de limites. Confrontés à l’envol des déficits, à la stagnation économique et redoutant l’explosion d’une cocotte-minute sociale, plusieurs hauts dirigeants européens et décideurs bruxellois se travestissent en chefs de guerre et tentent même de ressusciter le vieux réflexe du « faire barrage au péril rouge ».
Ils prennent bien soin depuis deux ans de ne jamais soumettre leurs décisions à l’aval d’un Parlement, ni leurs largesses financières en faveur de l’Ukraine (abondées par l’argent des contribuables dont l’opinion est tout bonnement ignorée, voire pire, méprisée) à un vote démocratique.
Les citoyens réduits à un rôle passif
Comment ne pas voir que, derrière ces menaces de guerre, c’est l’OTAN qui tire les ficelles ?
Cela débouche d’une part sur un « permis de tuer » au nom de la démocratie ou de la lutte contre le terrorisme, et d’autre part, sur un « permis de faire les poches » du citoyen occidental qui n’est plus jamais consulté, ni directement (qui serait d’accord pour faire la guerre ou pour financer l’instauration d’une technostructure kafkaïenne et belliqueuse), ni par le biais des représentants du peuple.
Nous voici condamnés à écouter les monologues présidentiels, sans possibilité de débattre, avec la certitude que cela va coûter cher au contribuable et en espérant que cela ne nous coûtera pas prochainement très cher en vies humaines !
J. Biden, V. Zelensky et E. Macron étant réunis sur les plages de Normandie, il serait étonnant que leurs conversations portent sur la finesse des bulles du cidre du Calvados ou le charme de la côte bocagère entre Arromanches et Cabourg. Ils vont forcément convenir de la stratégie à suivre dans le conflit russo-ukrainien. Tout semble pointer en direction d’une intensification, donc d’un risque de généralisation.
Surtout n’évoquez jamais les obstacles qui se dressent sur la route des marchés, ils n’en tiennent jamais compte, particulièrement quand ils sont encore lointains (ou 2 000 km à l’est de nos frontières)…
Des nouvelles réjouissantes du côté de la Bourse ?
S’il s’agit d’un platane, il sera toujours temps de s’en soucier lorsque Wall Street sera encastré dedans (comme pour les subprimes). Il y a de bien plus réjouissantes échéances à célébrer ces prochaines heures, comme la baisse des taux de la BCE de 4,00% à 3,75%, ou les nouveaux records du S&P 500 ou du Nasdaq mercredi soir (avec un doublé « intraday/clôture »).
Des records inscrits avec la plus réduite de titres « au zénith » des 25 dernières années.
Mais l’impact de la flambée de Nvidia (+145% depuis le 1er janvier) est tellement massif que cela masque le recul d’une majorité de composantes du S&P 500 cette année.
Même s’il y avait 99% de composantes en baisse annuelle, le S&P gagnerait quand même du terrain grâce à cinq titres : Nvidia, Alphabet, Microsoft, Meta et Apple.
Le petit trou d’air indiciel de la fin mai est comblé en trois séances, de nouveaux records tombent, des commentateurs commencent à reparler « d’alignement des planètes » et du « meilleur des mondes » économique. Mais ils perdent de vue que le retour de l’optimisme béat du marché repose sur la performance d’un unique titre, dont le cours est multiplié par six en un an.
Souvenons-nous que la plus redoutable des corrections boursières, c’est celle que personne n’a vu venir. Beaucoup la considèrent d’ailleurs comme une opportunité d’achat.
Relisez les dernières déclarations de Marie-Agnes Strack-Zimmermann et d’Emmanuel Macron. Demandez-vous si les marchés ont raison de parier sans réserve sur l’avènement « d’une ère de prospérité et exempte d’inflation », dans un “monde en paix et soucieux de résoudre pacifiquement les conflits ».