** Hier, la Fed a commencé à acheter des T-Bonds. La Grande-Bretagne le fait déjà. Idem pour le Japon. L’ampleur du projet est immense.
* Vous vous souvenez comment ça fonctionne, cher lecteur ? Lorsque vous achetez un bon du Trésor américain, vous le payez avec du véritable argent — ou du moins aussi véritable que le dollar. L’argent change de mains. Pas d’augmentation nette de la masse monétaire. Mais lorsque la Fed achète un bon du Trésor, elle crée l’argent pour l’acheter, si bien que la masse monétaire augmente. On appelle ça "monétiser la dette" — ou transformer la dette en devise. Etant donné la taille des futurs achats du Trésor, la taille de la base monétaire américaine devrait augmenter de 500% dans les mois qui viennent.
* Y a-t-il un doute sur ce que cela signifie pour le dollar ? Pour le prix de l’or ?
* Eh oui…
* Hélas, plus nous apprenons, moins nous en savons. Plus nous découvrons de choses, plus nous découvrons ce que nous n’avons pas encore découvert.
* Rappelez-vous : nous nous inquiétions du fait que l’inflation est trop évidente. On peut la voir arriver à des kilomètres. Voilà pourquoi nous disons que les Etats-Unis peuvent rembourser leurs dettes dans une devise dont ils sont les seuls à contrôler la valeur…
* Mais si ce n’était pas vrai ? Si les autorités ne pouvaient pas contrôler la valeur du dollar ? Si l’inflation n’avait pas lieu — ou du moins pas comme nous l’attendons tous ?
* Commençons par une vérité : ce qui doit arriver arrivera.
* Lorsqu’on augmente la masse monétaire, toutes choses étant égales par ailleurs, le prix de la devise doit baisser. Voilà pourquoi le cours de l’or dépasse les 900 $, au lieu d’être à 750 $, par exemple. Les investisseurs voient des milliers de milliards de dollars arriver dans la masse monétaire mondiale. Ils ne sont pas nés d’hier. Ils savent ce qui va se passer ensuite. Ce n’est qu’une question de temps avant que le prix de l’or double… puis double encore.
* Mais le fait d’augmenter la masse monétaire ne signifie pas que les prix doivent grimper. Ca signifie seulement qu’ils peuvent grimper… dans certaines conditions.
* Ah… voilà l’os… voilà la fêlure dans notre petite clochette… voilà le petit caillou dans notre chaussure.
* Les Japonais monétisent leur dette depuis longtemps, écrit notre ami James Ferguson dans la version britannique de MoneyWeek.
* "Pour commencer, les autorités ont maintenu une croissance à deux chiffres de la masse monétaire pendant près d’une décennie, tandis que les banques refusaient d’admettre la réalité ; le gouvernement a ensuite injecté près de 10% du PIB dans le capital des banques. Pourtant, même après que l’argent, en tant que proportion du PIB, a doublé, les banques japonaises réduisaient encore leurs prêts".
* "La Banque du Japon, pensant qu’elle manquait peut-être juste d’imagination, a doublé une fois encore la masse monétaire M1, cette fois-ci sur une période bien plus courte — deux à trois ans à partir de 2001".
* Proportionnellement, c’est à peu près comme si la Fed ne dépensait pas 1 000 milliards de dollars pour racheter des T-Bonds, mais 10 000 milliards.
* "Pourtant, l’impact sur les prêts des banques japonaises a été… nul", continue James. "Les prêts bancaires ont continué de chuter de 5-6% par an, comme ils le faisaient depuis trois ans".
* James a vécu au Japon pendant de nombreuses années. Il rapporte que lorsque l’économie japonaise a finalement commencé à se reprendre en 2006, le gouvernement s’est inquiété de voir tout l’argent mis en circulation se transformer soudain en inflation des prix à la consommation. Mais cela ne s’est pas produit. Au lieu de cela, le petit bourgeon de croissance a été écrasé par la crise de 2007-2008… et les prix japonais semblent à nouveau en baisse.
* Comment se fait-il ? Les Japonais sont-ils particulièrement incompétents ? Ou bien affaiblir une devise est-il plus difficile qu’on le pense ?
** Ce serait bien plus simple pour nous, si le monde s’organisait de manière plus ordonnée et prévisible. Ce ne serait de loin pas aussi amusant, cependant. Même les autorités pourraient contrôler un monde de simplets. Comme ce serait morose !
Tout de même, les boussoles des navires ne nous mènent pas intentionnellement sur des récifs. Plus d’argent = plus d’inflation, c’est la règle. D’ailleurs, ce n’est pas uniquement une question d’argent. Les autorités américaines sèment clairement le vent, avec leur assouplissement quantitatif. Elles méritent de récolter la tempête.
* Mais attendez… c’est l’inflation qu’elles veulent. La nature, dans sa sagesse, donne rarement ce qu’il veut à un escroc. Au lieu de cela, elle lui donne ce qu’il mérite. Alors que méritent les autorités ? Nous connaissons leur crime… quelle sera leur punition ?
* Ah ah ! Peut-être qu’elles méritent le fond de cale… aux fers et sans aération !
* Les autorités veulent réduire le fardeau de dette en provoquant l’inflation. Elles veulent augmenter la vélocité de la devise — en l’allégeant un peu pour que les gens veuillent s’en débarrasser. Elles veulent pousser les prêteurs à prêter, et les consommateurs à consommer — qu’ils fassent tous tourner leurs dollars aussi rapidement que possible. Elles veulent transférer le fardeau des pertes, des gens qui en ont provoquées vers les gens qui ne les ont pas provoquées. Et si le dollar ne coopère pas ? S’il s’alourdit ? S’il semble plus solide ? Et si les dettes libellées engluaient, comme du goudron, les gens qui les subissent ?
* Ca semble impossible, n’est-ce pas ? Pourtant, c’est ce qui s’est produit au pays du Soleil-Levant.
* Notre hypothèse semblait si certaine… si étanche. Les autorités n’ont pas d’autre solution que d’essayer de gonfler leur devise. Parce que cela réduira le fardeau de dette qui pèse sur les consommateurs… ainsi que celui — et ce n’est pas une coïncidence — qui pèse sur le gouvernement américain. Cela poussera également les gens à dépenser leur argent, plutôt que de l’épargner. Ca augmentera la vélocité de la devise, qui aura un effet encore plus radical sur "l’instinct animal".
* Si elles ne réussissent pas du premier coup, les autorités essaieront encore et encore. Tôt ou tard, elles obtiendront l’inflation qu’elles désirent — d’abord modérément, puis exagérément.
** Mais… et si les choses ne se passaient pas ainsi ? Si les autorités américaines… et toute la classe des débiteurs… étaient torturées avant d’être enfin tuées ? Si nous — c’est-à-dire ceux qui pensent savoir ce qui se passe, et qui empilent les pièces d’or dans leurs coffres en anticipation — devenions fous suite à des corrections profondes et répétées du marché de l’or ? Si l’or chutait à 600 $… et y restait pendant des années ?
* Si les marchés restaient irrationnels plus longtemps qu’aucun d’entre nous ne peut rester solvable… éliminant d’abord les haussiers avec une nouvelle rupture majeure sur les marchés boursiers… puis éliminant les baissiers avec une nouvelle rupture majeure sur le marché de l’or ?
* Puis, lorsque nous aurons abandonné tout espoir… vendu toutes nos actions… et tout notre or… que nous serons roulés en boule dans un coin, gémissant, serrant dans nos poings une poignée de dollars tout froissés… peut-être qu’alors M. le Marché aura pitié de nous. Peut-être qu’il viendra finalement mettre fin à nos souffrances… nous assénant le coup de grâce d’une inflation explosive… à la Weimar ou à la Harare ?
* Tout est possible. Mais il y a de grandes différences entre le Japon et les Etats-Unis… et des raisons de penser que les autorités américaines pourraient réussir là où les autorités japonaises ont échoué. Pour l’instant, nous hissons notre pavillon d’Alerte au Krach du Dollar et nous attendons la suite…