▪ Les marchés financiers mondiaux font face à une mer démontée. Les devises, les obligations et les actions sont extrêmement volatiles et toute reprise des cours est aussitôt suivie par une nouvelle baisse. Les marchés sont-ils totalement déboussolés ? Les facteurs d’influence traditionnels ne sont-ils plus valables ?
Les banques centrales et les gouvernements ont passé des années à essayer de sortir de la crise économique et financière mondiale via une politique monétaire ultra-expansive et en laissant les déficits budgétaires atteindre des montants jamais vus jusque-là. On sait maintenant que, sans réformes structurelles, ce chemin conduit à l’échec — comme l’illustre très bien le cas du Japon et celui des pays de la périphérie sud de la Zone euro, dont la France. L’utilité marginale de la baisse des taux d’intérêt et du recours sans limite à la dépense publique est nulle depuis déjà longtemps, voire négative. Maintenir cette stratégie sera contre-productif.
Comme le montre l’exemple de la Grèce, la méthode qui consiste à avoir continuellement recours aux déficits publics pour sortir l’économie d’un creux conjoncturel est une impasse. Depuis le début de la crise en 2007, la dette mondiale est passée de 57 000 milliards de dollars à 199 000 milliards (source : McKinsey). Le Japon a le taux d’endettement le plus élevé au monde, soit environ 500% du PIB, tous secteurs confondus : quid de sa stabilité financière ? Neuf pays dans le monde ont un ratio de dette publique supérieur à 300% et 39% des pays ont un ratio supérieur à 100%.
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Le recours au déficit budgétaire s’étant avéré insuffisant pour permettre le retournement de la situation économique, les gouvernements et les banques centrales se sont retrouvés totalement tributaires de la politique monétaire. Les principales banques centrales du monde poursuivent leur politique monétaire ultra-expansive : la Fed, la BCE et la Banque d’Angleterre depuis 2009, et la Banque du Japon depuis 1990. Cette politique monétaire n’a donné aucun véritable résultat économique ni aux Etats-Unis, ni dans la Zone euro, ni au Royaume-Uni et ni au Japon.
Le recours au déficit budgétaire s’étant avéré insuffisant pour permettre le retournement de la situation économique |
La politique des taux d’intérêt Zéro (ZIRP), les taux monétaires négatifs (INEP), l’assouplissement quantitatif (QE) et les rendements obligataires extrêmement faibles sont loin d’être une panacée. La Fed a augmenté son bilan de presque 1 000 milliards de dollars fin 2008 au niveau actuel de 4 500 milliards… mais le PIB nominal n’a augmenté que de 2 700 milliards. Environ 900 milliards de dollars ont été investis sur les marchés financiers et ont provoqué un triplement du prix des actions américaines.
Les premiers signes laissant penser que quelque chose pourrait changer dans ce château de cartes ont fait trembler l’ensemble du bâtiment. Si la Fed décide effectivement de mettre en œuvre une première hausse de taux pour revenir à une structure de taux d’intérêt normalisée, cela entraînera probablement de fortes turbulences comme on a pu le voir, à la mi-août, quand on a appris le ralentissement économique en Chine, ce qui a causé une importante sortie de fonds. Depuis la mi-juin, la valeur de l’ensemble des actions chinoises a chuté près de 4 500 milliards de dollars US. La chute à Shanghai a provoqué un krach dans le monde entier.
▪ Où va maintenant s’investir tout cet argent ?
Pour calmer les marchés, la Banque de Chine populaire a abaissé les taux d’intérêt directeurs chinois de 5,75% à 4,6% et tente d’aider les marchés en achetant des actions. Résultat : tout semble être rentré dans l’ordre et les marchés sont en hausse. Les banques centrales maintiennent leur politique monétaire très expansive. Tout le monde espère que ZIRP, INEP et QE créeront, de nouveau, de bonnes opportunités sur les marchés financiers. Et effectivement, « l’argent intelligent » coule de nouveau vers les actions, en particulier dans la Zone euro. La BCE promet également la mise en oeuvre intégrale du programme d’achat de titres pour au moins 1 100 milliards d’euros jusqu’en septembre 2016.
Cependant, ce placebo ne peut pas maintenir, sur long terme, la stabilité d’une politique économique saine. Les banques centrales ont épuisé toutes leurs munitions. Si les turbulences sur les marchés financiers finissent par se répercuter sur le développement économique, les banques centrales n’auront plus aucune nouvelle flèche dans leur carquois. Les taux du marché monétaire sont pratiquement nuls et passer en territoire négatif serait contre-productif.
Les banques centrales ont épuisé toutes leurs munitions |
Continuer les achats de titres ne fera que causer plus de dommages à l’ensemble du système financier. Les rendements presque nuls des obligations souveraines bloquent toute volonté de réformer la politique budgétaire — ce qui ne fait que conduire à la montée des dettes publiques et à l’augmentation du service de la dette qui, plus tard, empêchera toute action via le budget de l’Etat. La course à la dévaluation sur le marché des changes et les mesures de protection dans le commerce extérieur sont préjudiciables à l’économie mondiale. Un rétablissement à court terme sur les marchés financiers en raison de l’excès de liquidité toujours excessive peut cacher le fait que les dangers d’une nouvelle crise financière augmentent de jour en jour.
La Banque pour les règlements internationaux (BRI) voit des dangers de turbulences sur les marchés financiers internationaux, dans le cas d’une hausse des taux américains. Mais elle souligne que la Fed a déjà préparé les marchés pour un tel événement. Les taux directeurs américains sont depuis très longtemps extrêmement faibles, et cela a conduit à une forte hausse des risques sur les marchés financiers. Plus l’augmentation des taux d’intérêt est reportée, plus la situation devient risquée. La Chine accuse la Fed de provoquer la forte volatilité des marchés financiers, mais la Fed n’a rien à faire de ces critiques. En fait, cette politique monétaire dure déjà depuis trop longtemps. Il y a trop de liquidité en circulation, bien au-delà des besoins de l’économie réelle. Et, malgré cela, la BCE et la BoJ font toujours tourner la planche à billets.
Conclusion : la crise financière et économique mondiale est loin d’être résolue. L’année en cours verra encore une forte volatilité sur les marchés. Tout le monde est piégé dans le surendettement grotesque. La ferme conviction que tout peut être réglé par la politique monétaire seule conduit dans une impasse. Faire accroire ou croire que tout s’est très bien passé jusqu’à présent ne fait qu’empirer la crise.