La Chronique Agora

Le rêve californien

Etats-Unis, déclin, pauvreté

Des vies plus courtes, des prisons plus grandes, et un pays plein de peur et de ressentiment…

« Toutes les feuilles sont marron
Et le ciel est gris
Je suis sorti me promener
En ce jour d’hiver
Je serais au chaud et en sécurité
Si j’étais à L.A. »
~ John et Michelle Phillips, California Dreamin’

Nous voyageons. Nous restons à l’écoute. Voici ce que nous avons récemment entendu.

« Je me souviens encore de la première fois où j’ai été en Californie », nous a expliqué un homme âgé lors d’un dîner en France :

« C’était dans les années 1970. J’étais tellement impressionné. J’aurais voulu y rester toute ma vie.

Ca ressemblait au paradis… la musique… les plages… les voitures… je vivais le ‘rêve californien’ toute l’année. Et, surtout, j’aimais le sentiment que me procurait cette ville, cette sensation que rien n’était impossible. Toutes les portes étaient ouvertes.

Je n’ai jamais vraiment habité aux Etats-Unis. Mais à l’époque j’y allais presque chaque année.

Seulement, après le 11 septembre 2001, les Etats-Unis ont changé. Je suis arrivé à la frontière, et ils semblaient ne pas vouloir que j’y rentre. Tout le monde soupçonnait les étrangers. Les autoroutes de Californie s’étaient couvertes de trafic. Et les gens semblaient être en colère. Ou cyniques. Ou bien, ils avaient juste peur. Ce n’était plus pareil. Ce n’était plus aussi divertissant. Même la bonne musique semblait disparaître. Tout ce qu’il y avait était de la musique abrutissante. Il était impossible d’y échapper. Vous alliez prendre un petit-déjeuner dans un bon hôtel… et de la musique horrible retentissait. Hip Hop. Rap. Je ne sais pas comment ils appellent ce style, mais ce n’est pas pour moi.

Excusez-moi d’être si critique. Mais je dis cela parce que j’aime beaucoup les Etats-Unis… et je déteste voir ce que le pays est en train de devenir.

Je n’y suis pas allé pendant quelques années… lorsque le Covid nous empêchait de voyager… mais j’y suis retourné l’an dernier. J’ai été à New York et San Francisco. C’était déprimant. Choquant, en réalité… la manière dont ces villes sont devenues mornes… ennuyantes… et dangereuses…

Les Américains vivent dans leur petite bulle. Ils semblent obsédés par le racisme. C’est un grand gâchis de l’énergie du pays, selon moi.

Je n’y retournerai jamais. »

Déclin et chute

Les Etats-Unis ont glissé vers le bas des classements internationaux durant les 20 dernières années au moins… et, selon certaines statistiques, depuis plus de 50 ans. La part américaine du PIB mondial par exemple, a presque été divisée par deux, passant de 40% en 1960 à 25% à peine aujourd’hui.

Le pourcentage de personnes incarcérées, en revanche, a augmenté. Avec plus de 2 millions de personnes derrière les barreaux, statistiquement, vous avez plus de chance d’être emprisonné aux Etats-Unis que dans n’importe quel autre pays. Aucun autre pays n’en est proche. La Chine est la Russie, qualifiés de régimes « répressifs », ont en réalité beaucoup plus de citoyens libres que les Etats-Unis. La population de la Chine est plus de trois fois supérieure à celle des Etats-Unis, et pourtant, il a 2 fois moins de prisonniers qu’aux Etats-Unis.

En outre, les Américains sont les seuls habitants de pays développés dont l’espérance de vie raccourcit. Les Etats-Unis sont désormais à la 58e place du classement de l’espérance de vie moyenne, derrière la Chine, le Koweït et l’Albanie.

Selon un article de Home Knowledge :

« D’après le Dr Steven Woolf, auteur de l’étude et directeur du centre d’étude sur la société et la santé de l’université du Commonwealth de Virginie, le problème de la baisse de l’espérance de vie est plus ancien que ce qui avait été précédemment indiqué. 

L’étude récente illustre la persistance de cette tendance haussière de l’espérance de vie aux Etats-Unis jusqu’aux années 1950, quand le pays était à la 12e place du classement mondial. Cependant, à partir de 1955, le rythme de croissance a commencé à ralentir, et en 1968, les Etats-Unis ont chuté à la 29e position. »

Amour perdu

Peter Hitchens, un commentateur britannique a raconté son histoire d’amour avec les Etats-Unis pour le magazine American Conservative :

« Après m’être rendu aux Etats-Unis pour la première fois en 1977, je n’ai pas pu dormir paisiblement pendant un mois. Dès que j’étais rentré chez moi, je voulais y retourner…

Puis tout a changé. C’est évidemment le 11 septembre qui a marqué la transformation du pays, et a assombri le ciel avec la suspicion croissante et la bureaucratie sécuritaire. C’était déjà dur pour les Américains, mais peut-être encore plus consternant pour les admirateurs étrangers du pays. Peu à peu, le vernis s’est écaillé.

Lors de ma dernière visite, une correspondance dans un des aéroports les plus importants du pays a été vraiment mal gérée et épuisante, et l’aéroport lui-même si encombré et peu accueillant… Il y avait de longues queues de personnes découragées partout, qui ressemblaient à une armée défaite. Déjà il y a quelques années, l’insalubrité croissante de San Francisco commençait à devenir envahissante dans certains quartiers. Désormais, je redoute mon prochain voyage. Mais ces problèmes sont les symptômes d’un pays en déclin. Ce n’est pas seulement que le pays semble plus pauvre et misérable, notamment depuis la guerre d’Irak. C’est aussi que je n’ai plus la sensation de liberté ensoleillée que je retrouvais dans les années 1970 et 1980 à chaque fois que j’y mettais les pieds.

Les dernières fois que je m’y suis rendu, j’étais heureux d’en revenir… j’ai perdu mon amour pour les Etats-Unis. »

Ne vous inquiétez pas, Peter. Ce n’est pas vous… c’est nous.

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