La récession est désormais entamée, et ce ne sera pas facile. A quelle sauce allons-nous être mangés ? Panorama mondial de l’économie post-Covid 19.
Le doute n’est plus permis : nous entrons en récession et cela ne va pas être beau à voir. Cette fois, ce n’est donc pas « différent » et le cycle économique fait son grand retour.
Les uns diront qu’il a été ressuscité par le saint coronavirus, quand d’autres défendront que le financement d’une croissance économique toujours plus faible à grands renforts de déficits budgétaires toujours plus élevés ne pouvait pas durer éternellement.
Vous savez de quel côté je penche.
« Depuis la politique de taux bas et de QE, toute la courbe de la croissance est bloquée. Ou plutôt, la croissance est absente et la Fed essaie désespérément de cacher cela en subventionnant le système via la création de dette. Si l’on retire la dette des 11 dernières années, on arrive à une croissance zéro. Zéro. »
C’est l’occasion de refaire le point sur les prévisions de croissance dans le monde – tout particulièrement en Zone euro et en France. Je n’ai bien sûr pas de boule de cristal, mais j’ai tout de même quelques graphiques à vous proposer.
2017 : l’UE 27 représente 16% du PIB mondial, dont 2,5% pour la France
Commençons par nous rassurer un peu en constatant avec une récente note d’Eurostat qu’en 2017, l’économie européenne à 27 (c’est-à-dire sans le Royaume-Uni) figurait toujours sur le podium mondial (en standards de pouvoir d’achat – SPA), au coude à coude avec la Chine, laquelle est passée devant les Etats-Unis. A 2,5%, la France se situait alors à égalité avec le Brésil et le Royaume-Uni.
Si l’on ramène ces chiffres en PIB par habitant (toujours en SPA), l’histoire est bien sûr très différente. En 2017 toujours, un facteur de trois séparait le niveau de vie de Mme Michu de celui de Mme Wang, un facteur supérieur à quatre séparant le niveau de vie de cette dernière de celui de Mrs Smith.
Nos économies occidentales sont encore très loin devant celle de la Chine, mais l’Empire du Milieu nous rattrape, quoi qu’étant encore en-dessous de la moyenne mondiale en termes de PIB par habitant (en SPA).
La crise économique va-t-elle redistribuer les cartes ?
L’ère qui s’ouvre devant nous promet d’être « historique »
Le premier constat, c’est que tout le monde va ramasser.
La Banque d’Angleterre a prédit que la crise du coronavirus plongera l’économie britannique dans la plus profonde récession qu’elle ait connu depuis 300 ans
L’économie chinoise a connu son pire trimestre en 40 ans après le confinement, entraînant le monde dans la récession
Le Japon entre en récession et le pire est devant lui
La question centrale est bien sûr de savoir qui sera le plus affecté par la crise. Il est évidemment trop tôt pour le savoir de manière définitive, mais voici les dernières prévisions officielles ainsi que les chiffres des institutions privées.
Les autorités publiques ne savent plus sur quel pied danser
Au niveau mondial, le FMI a annoncé début mai qu’il allait devoir mettre à jour ses prévisions de croissance pour 2020. A mi-avril, le Fonds tablait encore sur -3% de croissance au niveau mondial, avec -6,1% pour les pays développés et -1% pour les pays émergents.
Cependant, Kristalina Georgieva vient de faire la déclaration suivante : « Les données économiques nous arrivant de beaucoup de pays sont en dessous de notre analyse déjà pessimiste pour 2020. » Timidement, la directrice générale du Fonds nous annonce qu’une lourde mise à jour s’impose.
Et pour cause : si l’on compare les chiffres du FMI avec les -16% de croissance mondiale qu’annonçait Goldman Sachs le 8 mai, on est loin du compte…
Focus sur les USA
Aux Etats-Unis, le président de la Fed a adopté une posture rassurante. Le 17 mai, lors de son interview dans l’émission 60 Minutes, Jerome Powell a déclaré :
« Si nous continuons à prendre les bonnes décisions, si nous continuons à fournir un soutien aux entreprises, aux ménages et aux chômeurs, si nous le faisons et si nous réfléchissons et faisons attention à la façon dont nous rouvrons l’économie […] alors la reprise économique pourra commencer assez rapidement. Et cela peut être une reprise robuste. »
Peut-on se fier à la parole de Jay Powell ? Chacun se fera sa propre opinion…
« C’est le même type qui vous a dit que l’économie était fondamentalement saine, qu’aucune récession n’était devant nous malgré l’inversion de la courbe des taux, et que les interventions sur le marché des repo n’étaient que temporaires. […] »
Mi-mai, c’était tout de même 17,6% de la force de travail américaine qui était au chômage suite au confinement.
A titre de comparaison, au creux de la récession de 1973-74, les Etats-Unis n’étaient jamais montés qu’à 4,9% de chômage, et à 4,3% au pire moment de la récession de 2007-2009.
Ajoutez à ce chômage de masse un surendettement assez généralisé, des faillites d’entreprises et un système bancaire qui n’est pas au mieux de sa forme, et vous avez la recette parfaite pour que l’ambiance de crise demeure encore quelque temps.
Le 15 mai, la Fed d’Atlanta a abaissé sa prévision de croissance pour le deuxième trimestre à -42,8%. Cela concorde grosso modo avec les chiffres d’Oxford Economics, qui table sur du -40%.
Libre à vous, donc, de faire confiance à Jerome Powell… ou pas.
« Powell 2020 : je ne prévois pas de dépression. Powell 2019 : je ne prévois pas de récession. »
Du côté de la Chine…
En Chine, figurez-vous que les camarades communistes viennent subitement d’arrêter de faire des « prévisions » de croissance.
Si vous aussi vous vous demandez « pourquoi ? », permettez-moi de vous proposer cette réponse assez simple : ils n’ont pas la moindre idée de ce qu’il va se passer.
Tout au plus, ce que l’on sait, c’est que la croissance économique chinoise s’oriente dangereusement vers le plancher.
« Une économie planifiée sans plan ? La Chine laisse tomber son objectif de PIB cette année car les perspectives sont ‘difficiles à prévoir’ en 2020. L’économie chinoise n’a presque jamais manqué son objectif ! »
Quelle surprise, au pays des rois de l’économie planifiée, n’est-ce pas ? Comme le rappellent les auteurs de ce graphique, « l’économie chinoise n’a presque jamais manqué sa cible », d’où la proximité entre la courbe noire (objectifs de croissance) et la courbe rose (croissance « observée »).
Si cet exploit vous laisse bouche bée, je vous renvoie à cette célèbre situation de Churchill :
« Je ne crois aux statistiques que lorsque je les ai moi-même falsifiées. »
Dans l’empire du Soleil Levant
Pour ce qui est du Japon, comme l’indique 20 Minutes :
« En rythme annualisé, le PIB nippon a chuté de 3,4% au premier trimestre. Mi-avril le Fonds monétaire international (FMI) a prédit une chute de 5,2% du PIB japonais sur l’ensemble de l’année, en partant du principe d’une reprise de l’économie à partir du second semestre. De son côté, la BoJ table sur une contraction de 3% à 5% du PIB japonais sur l’exercice 2020/21, entamé le 1er avril. »
Nul doute que le FMI annoncera un chiffre supérieur à 5,2% lors de sa prochaine communication.
Et la Zone euro dans tout ça ? J’aborderai la question en détails dans mon prochain article…