La Chronique Agora

Qui, du drapeau rouge ou du pavillon contrarien, flottera fièrement ?

Par Simone Wapler (*)

J’ai l’impression étrange de revenir à la fin des années 2000.

Notre drapeau rouge flotte encore… et toujours
Scrutant la marée montante de liquidités, il me semble apercevoir de moins en moins d’îlots accueillants, de ports susceptibles de nous abriter contre un ouragan, une lame de fond. Et, comble de malheur, à la marée habituelle s’ajoute la marée noire du pétrole.

Le drapeau rouge de la baignade dangereuse commence à être un peu effiloché : cela fait si longtemps qu’il flotte. Mais pourtant, aucune vraie vague n’est venue tout emporter… ou pas encore.

Et rien n’est suffisamment délaissé pour sortir le drapeau contrarien
Mon drapeau contrarien en revanche est très présentable, mais je ne peux pas encore le hisser. C’est qu’il y a si peu d’actifs vraiment délaissés en ce moment ! Vous savez, ces investissements qui font ricaner ceux qui sont "dans le vent" au moment où les contrariens les choisissent. Par exemple : trouver aujourd’hui quelque organisme de crédit sur la côte ouest des Etats-Unis ou un équivalent californien des ciments Lafarge, tellement massacré par la crise du bâtiment qu’on le paierait 2 $ (avec un euro). Non, rien encore ne justifie la sortie du pavillon contrarien. Ce que je vois n’est encore ni assez hideux, ni assez dégoûtant.

Et pourtant, tout le monde sait qu’un investisseur avisé investit en permanence, indifférent aux hauts et bas des marchés. Le terme "avisé" s’applique non pas au moment, mais au choix du couple "quoi et quand". Lorsque les rats fuient le navire, l’investisseur avisé et contrarien cherche les trésors dans les épaves. C’est donc que je ne dois pas assez bien scruter. Je reprends ma lorgnette.

L’Australie, Terre Promise du contrarien ?
Très, très loin à l’horizon, je vois une terre étrange.

La monnaie y est forte, l’Etat excédentaire et un relèvement des taux directeurs de la Banque Centrale y est âprement discuté. Ce pays médite de passer son taux d’intérêt de 6,5% à 7% en 2008. L’inflation y est sérieusement discutée. Non je n’ai pas rêvé, il ne s’agit pas d’un Contrariland mythique. Cette terre lointaine s’appelle l’Australie.

Pourquoi ne pas faire un peu de carry trade, cher lecteur ? Il suffirait de prendre quelques euros, de les transformer en dollars australiens et de les mettre sur l’équivalent d’un livret de Caisse d’Epargne. On dort paisiblement en encaissant 7% l’an et en profitant de l’essor du dollar australien par rapport à l’euro. Eh oui : en septembre, la parité euro/dollar australien était de 1,70 ; elle est maintenant de 1,60. Le dollar australien a gagné 6% en deux mois.

Mais j’ai honte, cher lecteur, de vous proposer ce marché d’épicier. En plus, vous allez me dire qu’il est vraiment trop compliqué d’ouvrir un compte d’épargne à Sydney.

En fait, je ne vous ai parlé de l’Australie que pour vous faire savoir qu’il y a des endroits où l’inflation est prise plus au sérieux que sous nos latitudes. Et pour vous signaler, en passant, que la force de l’euro était bien relative.

A l’heure où j’écris ces lignes, les marchés actions enregistrent quelques secousses et il est encore trop tôt pour déterminer s’il s’agit d’une vraie correction salutaire (qui nous laissera des épaves pleines de trésors) ou d’un incident de parcours qui sera encore trop vite oublié.

Meilleures salutations,

Simone Wapler
Pour la Chronique Agora

(*) Analyste, journaliste et ingénieur de formation, Simone Wapler a déjà contribué à des publications telles que Le Point, Enjeux les Echos, Chart’s… Spécialisée dans les valeurs technologiques et industrielles, elle est analyste en chef de L’Investisseur Or et Matières et se penche aussi sur l’or et les valeurs étrangères dans le cadre de Vos Finances – La Lettre du Patrimoine. Elle participe également régulièrement à L’Edito Matières Premières

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