La Chronique Agora

Sous la neige de la dette : quand le dégel révèle l’inflation

Frozen icicles on a gray pipe after a thaw in winter. Background. Form.

Les déficits s’accumulent. La dette doit être refinancée. Et plus le coût du service des dépenses passées est élevé, moins il y a de ressources disponibles pour le présent.

« Det som göms i snö, kommer fram vid tö. » (« Ce qui est caché dans la neige se révèle au dégel. ») – Ancien dicton norrois

Il y a bien des sujets qui mettent les gens en colère. Et beaucoup concernent les politiques idiotes mises en avant par les politiciens et l’élite en place. Les pronoms personnels, la distribution gratuite de préservatifs, les compétitions sportives entre hommes et femmes, « l’annexion » du Groenland, les vaccinations forcées… et en voici une nouvelle, en direct de la Maison-Blanche :

« En vertu de l’autorité qui m’est conférée en tant que président par la Constitution et les lois des Etats-Unis d’Amérique, il est ordonné ce qui suit : l’anglais est déclaré langue officielle des Etats-Unis. L’adoption d’une langue nationale commune est essentielle à l’unité et à la cohésion de la société. Les Etats-Unis tirent leur force d’une citoyenneté capable d’échanger librement des idées dans une langue partagée. »

Vraiment ?

La Suisse a cinq langues. L’Inde compte 122 langues principales et 1 599 langues secondaires. Pourquoi les gens ne peuvent-ils pas parler la langue qu’ils veulent ? Aux Etats-Unis aujourd’hui, presque tout le monde parle anglais. Diriez-vous qu’il s’agit d’une société unifiée et cohésive ?

Comme tous les soi-disant améliorateurs du monde, ils veulent forcer tout le monde à adopter un mode de vie unique. Mais il est clairement injuste d’avantager les anglophones de naissance. Pourquoi ne pas égaliser les chances en désignant une langue que personne ne parle comme langue officielle ? Nous recommandons le vieux norrois.

Apprendre le vieux norrois offrirait aux Américains un lien direct avec les premiers explorateurs européens ayant foulé leur sol, tout en stimulant à la fois l’économie et les esprits fatigués et complaisants de leurs citoyens. De plus, cette connaissance pourrait s’avérer précieuse pour comprendre ce que diront les Groenlandais lorsque les Etats-Unis auront pris possession de leur territoire.

Mais si ces questions marginales attirent l’attention des médias, elles ne représentent pas en elles-mêmes des menaces existentielles. Que les Américains parlent anglais ou estonien, les Etats-Unis atteindront les 50 000 milliards de dollars de dette avant la fin du second mandat de M. Trump, dans tous les cas.

Les déficits s’accumulent. La dette doit être refinancée. Et plus le coût du service des dépenses passées est élevé, moins il y a de ressources disponibles pour le présent. Il s’agit là d’une manière intrinsèquement et manifestement farfelue de gérer une nation. Elle garantit le chaos, l’inflation, les défauts de paiement et la pauvreté. Mais c’est la direction prise par toutes les administrations depuis l’époque de Jimmy Carter.

Les quatre premiers mois de l’année fiscale en cours ont ajouté 830 milliards de dollars à la dette. A ce rythme, même si Elon Musk cherche des pièces sous les coussins des sièges, la dette sera comme l’eau qui jaillit des égouts et des collecteurs d’eaux pluviales : malodorante et difficile à nettoyer. A un taux d’intérêt de 5% (qui pourrait augmenter), la charge d’intérêt s’élèverait à 2 500 milliards de dollars par an, soit environ la moitié de toutes les recettes fiscales fédérales.

Insider Investor ajoute :

« L’investisseur milliardaire Ray Dalio a déclaré que ‘la dette s’accumule comme une plaque d’athérome’ dans un système financier, ce qui pose un ‘problème’ aux gouvernements, car les paiements d’intérêts absorbent une part de plus en plus importante de leur budget.

M. Dalio s’est comparé à un médecin qui parlerait à un patient : ‘Vous courez un risque élevé de crise cardiaque ; qu’allez-vous faire maintenant ?’

‘N’attendez pas que cela se produise pour tenter d’améliorer la situation’, a t-il déclaré. »

Le gouvernement fédéral a dépensé environ 6 750 milliards de dollars au cours de la dernière année fiscale, mais n’a perçu que 4 920 milliards de dollars de recettes, ce qui représente un déficit de 1 800 milliards de dollars, selon le site web du Trésor. La dette nationale a plus que triplé depuis 2000 pour atteindre un montant estimé à 36 200 milliards de dollars, selon le site web.

Le seul membre de la Chambre des représentants à se montrer réellement préoccupé par cette question est l’inébranlable Thomas Massie, du Kentucky. Il a été le seul républicain à voter « non » au dernier projet de loi républicain sur les dépenses.

M. Massie a expliqué son vote à ses électeurs sur X en écrivant : « La résolution budgétaire du GOP qui a été adoptée par la Chambre cette semaine augmente la limite de la dette de 36 000 milliards de dollars à 40 000 milliards de dollars, et dépense suffisamment de dollars pour faire passer la dette de 36 000 milliards de dollars à 56 000 milliards de dollars au cours des 10 prochaines années. Mais bravo pour les réductions d’impôts ! »

Massie était peut-être sarcastique. En effet, la mesure adoptée la semaine dernière ne contient aucune réduction d’impôt réelle. Il s’agit plutôt d’une astucieuse arnaque fiscale, sur laquelle nous reviendrons demain.

Pour l’instant, elle est cachée sous la neige, c’est-à-dire sous des dépenses presque record, une dette record… et des cours boursiers record. Mais la neige finit toujours par fondre. Lentement, l’inflation refait surface, surgissant du gel avec la même délicatesse que les premiers crocus au printemps.

Verðið á varðbergi. (Restez attentif.)

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